Viggo Mortensen

Viggo Mortensen
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Acteur
États-Unis

Un peu de barbe pour cacher le menton, de longs cheveux pour l'allure héroïque, Viggo Mortensen était né pour incarner Aragorn, le héros torturé du Seigneur des anneaux. D'allure royale, il lui fallut pourtant attendre que les ans passent pour conquérir son actuelle dimension d'homme par-delà les hommes. Honnête et droit, il lui faudra tout son talent pour se détacher du rôle de sa vie, tant son aventure néo-zélandaise au pays de Tolkien laissera des séquelles.

VIGGO, LE ROI DE LA POMME DE TERRE (DU MILIEU)

Il y a quelques années, certains auraient bien vu Sean Connery dans le rôle de Gandalf et Harrison Ford incarnant le bel Aragorn. Deux étalons-mâles, acteurs au service de la virilité, êtres enfin dignes d'incarner les archétypes du Mage et du Roi déchu et errant. Le destin en décida pourtant autrement en choisissant deux acteurs méconnus, un Ian McKellen shakespearien en diable et un certain Viggo Mortensen, ignoré du grand public, dont les faits d'armes notables se comptaient sur les doigts d'une main. Pourtant, ce sont eux qui décrochèrent la timbale, en s'inscrivant directement au firmament de ces rôles touchés par les étoiles. Nul doute que ce destin aime jouer des tours puisque Viggo Mortenson - 40 ans en 1998 - n'était pas le premier choix du réalisateur Peter Jackson. En effet, il lui avait préféré un jeune loup d'à peine 26 ans à la même époque: Stuart Townsend. Ce n'est que quatre jours après que le tournage su Seigneur des anneaux ait débuté que le jeunot fut éjecté en raison d'un teint primesautier convenant peu à la sagesse d'un Aragorn de lignée royale. Appelé à la rescousse en catastrophe, ce fut son jeune fils de 10 ans qui convainquit Viggo Mortensen d'accepter le rôle. C'est alors d'un claquement de doigts qu'il signa pour plusieurs années de balade en Terre du Milieu, reconstituée dans les plaines de la Nouvelle-Zélande. Les antipodes d'Hollywood où se préparait fébrilement une certaine trilogie épique et excitante. Les fans purent souffler; de nombreux doutes avaient été émis sur Internet quant à la capacité de Townsend d'incarner l'héritier d'Isildur. Mortensen possède ce physique atypique et mature, cette nature sombre et étrange et ce charisme spontané indispensables pour personnifier l'héritier de Nummenòr.

VIGGO DES CARPATES

La suite est évidente, le succès des trois films rejaillit plus ou moins sur ceux qui surent faire fructifier le capital sympathie du casting. Elijah Wood poursuivit glorieusement sa carrière déjà bien entamée alors que Viggo Mortensen, la quarantaine déjà bien sonnée, devait se réinventer pour trouver sa place dans un système hollywoodien privilégiant les primes jeunesses. Incontestablement, l'homme affectionne les expériences lointaines. Tout petit déjà, ses parents forgeaient son goût pour l'éclectisme et le mélange. Né d'un père danois et d'une mère new-yorkaise, il vécut en Argentine, au Venezuela et au Danemark où, à chaque fois, il apprit la langue locale. Ce fut lors de ces expériences qu'il commença également à se définir en tant qu'artiste et accoucha de ses premiers poèmes. Plus tard, de retour à New York, puisque ses petits boulots lui laissaient suffisamment de temps, il s'inscrivit à des courts d'art dramatique. Peu de temps après, il incarna un jeune Amish dans le Witness de Peter Weir, aux côtés d'Harrison Ford et Kelly McGillis. Ce rôle, peu remarqué, permet de définir parfaitement sa carrière précédant Le Seigneur des anneaux: beaucoup de bons films, mais peu de personnages marquants, tout à fait éclipsés par les premiers rôles. C'est ainsi qu'il tournera avec Woody Allen dans La Rose pourpre du Caire, mais ses scènes ne survivront pas au montage. En 1991, Sean Penn l'engage pour incarner Frank Roberts, le frère violent et dépressif de David Morse pour The Indian Runner. Il le retrouvera d'ailleurs deux ans plus tard dans L'Impasse, de Brian De Palma, où Viggo hérite une fois encore d'un second rôle discret face à Penn et Al Pacino.

VIGOUREUX VIGGO

Après avoir tourné dans l'étrange Darkly Noon, Viggo Mortensen fut engagé par les frères Scott. D'abord Tony en 1995 avec U.S.S. Alabama, où il incarne l'un des officiers du sous-marin commandé par Denzel Washington et Gene Hackman. Puis, deux ans plus tard, il s'offre le rôle du militaire moustachu, misogyne et sadique qui harcèle une Demi Moore rasée dans G.I. Jane du frère Ridley. Entre-temps, il donne la réplique à Nicole Kidman dans Portrait de femme, de la néo-zélandaise Jane Campion. Puis il s'insère dans le casting de la première réalisation de Kevin Spacey, Albino Alligator, et roule des mécaniques avant de finir écrasé dans un tunnel effondré - alors que le chien est sauvé - pour le Daylight du tâcheron Rob Cohen. En 1998, c'est l'heure des remakes de Hitchcock, puisqu'il reprend tout d'abord le rôle de Sam Loomis dans le Psycho de Gus Van Sant, copie carbone et colorisée du Psychose version 1960. Ensuite vint l'inutile Meurtre parfait, dont le seul intérêt est d'exposer les propres peintures de Viggo dans l'atelier d'artiste de son personnage. Car Mortensen est un artiste honnête et multicarte. Outre l'art dramatique, c'est un peintre accompli, un photographe, un poète et un musicien qui a déjà publié plusieurs disques et ouvrages célébrant son talent. C'est ainsi que lors du tournage du Seigneur des anneaux, son appareil photo ponctua les prises de vue d'Aragorn. De plus, il invita les acteurs jouant les Hobbits à une jam session enfiévrée, une façon sympathique de se dégourdir les petons velus entre deux volets de la trilogie.

VIRAGO

La période post-Retour du Roi reste la plus difficile à négocier. Terrible virage que de passer des seconds rôles perdus à icône bizarrement sexy. C'est alors qu'il choisit de ne pas trop jouer la carte du contre-pied en incarnant Frank Hopkins, héros américain et à cheval - qu'il rachètera à la fin du tournage, tout comme son Brego du Seigneur des anneaux - dans le mou mais sympathique Hidalgo, de Joe Johnston. Mais c'est chez David Cronenberg que l'homme trouvera enfin un rôle capable de l'utiliser de façon décalée. A History of Violence reste l'histoire d'un homme perdu pour lequel Viggo Mortensen reprend son menton aiguisé comme un couteau. Être lumineusement sombre, le personnage de Tom Stall se déplace dans les méandres de l'univers du réalisateur comme un poisson dans l'eau, mêlant anatomie et sexualité dans l'un des meilleurs films de 2005. La suite reste prometteuse avec Alatriste, tourné entièrement en espagnol, où il incarne à nouveau un militaire moustachu dans un XVIIe siècle rongé par les guerres en Europe. Sans renier Aragorn, il est clair que l'homme cherche à se trouver un second souffle, favorisant les projets décalés, plus adultes, lorsque ses anciens collègues - plus jeunes - s'embarquent dans des îles perdues de série télé ou dans les délires obscurs de Robert Rodriguez. Et pourtant Viggo, roi parmi les rois, gardera son nom éternellement gravé dans les pierres d'un décor néo-zélandais où un jour, un petit gros du nom de Peter Jackson rêva d'y récréer le monde de la Terre du Milieu.

par Nicolas Plaire

En savoir plus

2006 Alatriste 2005 A History of Violence 2004 Hidalgo 2003 Le Retour du Roi 2002 Les Deux Tours 2001 La Communauté de l'anneau 1998 Psycho 1997 G.I. Jane 1996 Portrait de femme 1996 Albino Alligator 1995 U.S.S. Alabama 1993 L'Impasse 1991 The Indian Runner 1985 Witness

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