Mel Gibson

Comme le dit oncle Benny dans L'Arme fatale 4, Mel Gibson est une fripouille. Devenu l'un des acteurs les plus en vue d'Hollywood, puis réalisateur reconnu et oscarisé, c'est désormais à travers ses engagements religieux qu'il fait parler de lui. Ce qui devait être l'expression d'une passion envers les écrits bibliques s'est révélé être le point d'orgue d'une carrière bien remplie qui a su alterner blockbusters et films plus personnels. Retour sur l'homme de la controverse.

SUR LA ROUTE

Contrairement à ce que raconte la légende, Mel Gibson n'est pas australien, ou du moins pas complètement. Mel Columcille Gerard Gibson est né le 3 janvier 1956 à Pickskill dans l'état de New York, aux Etats Unis. C'est seulement en 1968 que son père, un employé des chemins de fers américains, décide d'émigrer en Australie, dans la famille de sa femme, pour que ses fils ne soient pas envoyés au Vietnam. Le cadre de vie du futur acteur prend ici ses sources: une famille nombreuse vivant dans le calme et la prospérité. En 1975, après son collège de Sydney et son année d'étude à la New Zealand Drama School de Wellington, Mel Gibson rentre en Australie pour intégrer l'université de Sydney et le National Institute of Dramatic Arts. C'est dans ce contexte qu'il fait ses débuts au cinéma, en 1976, avec un second rôle dans le douteux thriller Summer City. Pendant les 3 années qui suivent, il enchaîne de nombreuses représentations théâtrales et des apparitions dans des séries télé australiennes. Sur les planches, il sera notamment Roméo dans une adaptation de la pièce de Shakespeare dont il partage l'affiche avec Judy Davis, une ancienne camarade de classe. En 1979, il décroche le premier rôle éponyme de la comédie romantico-dramatique Tim. Son interprétation d'un simple d'esprit confronté aux préjugés d'une petite bourgade lui vaudra de remporter non seulement le prix du meilleur acteur dans un film Australien, mais également le casting de Mad Max de George Miller.

Ce petit film de série B au budget modeste de 350 000 dollars, sorti en fin d'année 1979, va connaître un succès inattendu à travers le monde. Avec un box office international qui plafonne ça à 100 millions de dollars en 1982, il lance définitivement la carrière de Mel Gibson. Rebelle des années quatre-vingt aux allures de cow-boy solitaire dans un écrin aux yeux d'acier, il touche tous les publics, les lettres de fans affluent de tous les pays, en l'espace d'un seul film Mel a mis la Terre a ses pieds. Paradoxalement, c'est par le biais d'un service de petites annonces qu'il rencontre, à cette période, sa future épouse, la belle Robyn Moore qui, en plus de vingt ans de mariage, lui donnera sept enfants, la famille idéale selon l'acteur. A peine un an plus tard, Mel revient avec un Mad Max 2 encore plus décapant que le premier volet, le public est une fois de plus au rendez-vous. La même année, le réalisateur australien Peter Weir lui offre avec Gallipoli un très beau rôle de soldat perdu dans les campagnes turques de la première guerre mondiale. Malgré un petit succès à l'étranger, le film rafle la plupart des prix de l'Australian Film Institute dont meilleur acteur pour Mel Gibson, meilleur film et meilleur réalisateur. En 1982, le même Peter Weir le fait jouer aux côtés de Linda Hunt et Sigourney Weaver dans L'année de tous les dangers. Nommé dans toutes les catégories de l'Australian Film Institute, auréolé d'un oscar pour la prestation de Linda Hunt et présenté en compétition officielle au Festival de Cannes, le film lui ouvre les portes dorées d'Hollywood.

UNE ARME A TOUTE EPREUVE

C'est en 1984 que Mel tourne son premier film américain, Le Bounty, avec Anthony Hopkins, reprenant le rôle de Christian Fletcher qui avait été tenu auparavant par Clark Gable et Marlon Brando. C'est donc sans surprise qu'en 1985 People Magazine le classe comme étant l'homme le plus sexy du monde. Un côté beau gosse qui ne plait guère à Mel Gibson qui décide qu'il ne fera désormais plus que des films d'action et des films "à rôle". C'est dans cette optique d'alternance qu'il avait déjà donné la réplique à Diane Keaton dans Mrs Soffel et Sissy Spacek dans La Rivière en 1984 (avant d'incarner Hamlet en 1990) et qu'il signe pour le dernier volet de la trilogie Mad Max en 1985. Si le succès de ce Mad Max et le dôme du tonnerre est mitigé, le film qui va suivre sera son plus gros triomphe. En effet, en 1987, Mel Gibson est, aux côtés de Danny Glover, à l'affiche de L'Arme fatale de Richard Donner, le buddy movie culte des années 80-90. Il y incarne Martin Riggs, un flic hors normes aux punchlines qui n'auront d'égales que celles de John McClane, un rôle sur mesure dans lequel il s'amuse tout autant que son public. Un blockbuster qui engendrera trois suites échelonnées sur dix ans rajoutant à chaque épisode un nouveau membre dans la grande famille Riggs/Murtaugh. En 1988 l'équipe s'est vue complétée d'un Joe Pesci très OK, en 1992 c'est une Rene Russo en inspectrice de choc et de charme qui est venue grossir les rangs, enfin en 1998 le jeune et talentueux Chris Rock a apporté la touche finale à ce tableau hétéroclite.

Fort du succès du premier épisode, Mel continue de plus belle dans sa conquête du continent américain en travaillant avec de nombreuses têtes d'affiche. En 1988, il donne la réplique à Michelle Pfeiffer et Kurt Russell dans le sulfureux Tequila Sunrise du grand scénariste Robert Towne. Deux ans plus tard il enchaîne les deux comédies Comme un oiseau sur la branche, avec Goldie Hawn et David Carradine, et Air America où il fait connaissance de son désormais grand ami Robert Downey Jr. En 1994 on le retrouve en cow-boy séduisant et tricheur dans Maverick de Richard Donner, aux côtés d'une sublime Jodie Foster en tenues de danseuse de Saloon. Puis il s'oriente vers trois rôles de déjantés adeptes du "pétage" de plomb: La Rançon (1996) de Ron Howard avec Rene Russo et Gary Sinise, Complots (1997) de Richard Donner avec Julia Roberts et, sûrement le meilleur des trois malgré son statut de première oeuvre, Payback (1999) avec les débutantes Maria Bello et Lucy Liu. En 2000, Mel a signé pour trois autres films très différents et des plus intéressants malgré leur petit succès public. Second rôle pour le superbe Million Dollar Hotel de Wim Wenders sur un scénario de Bono, The Patriot, le chemin de la liberté, sur la guerre de sécession, et Ce que veulent les femmes, une comédie romantique aux côtés de Helen Hunt. En 2002 Mel Gibson est revenu sur les écrans avec le très peu remarqué Nous étions soldats mais surtout le superbe Signs dernier coup de poing de M. Night Shymalan.

SUR TOUS LES FRONTS

En 1992 et 1993, avec respectivement Forever Young et L'homme sans visage, Mel Gibson ajoutait deux nouvelles cordes à son arc. Pour le premier, il fonde sa propre boite de production Icon et passe à la réalisation avec le second. Si les deux films restent mineurs, ils marquent une nouvelle étape dans l'implication morale de l'acteur et servent de salle d'attente à son coup de maître de 1995. Endossant la triple casquette de réalisateur, acteur et producteur avec Braveheart, il séduit une fois de plus la planète entière, de Sophie Marceau à l'Académie des Oscars (meilleur film et meilleur réalisateur), en passant par quelques princes d'Ecosse et le magazine People qui le nomme 37ème star la plus sexy de l'histoire du cinéma. Les années passent, Mel développe une foi religieuse inébranlable et annonce au tournant du XXIème siècle qu'il se lance dans la réalisation d'une adaptation de la passion du Christ tournée intégralement en langues mortes. A sa sortie en cette années 2004, La polémique fait rage (lire notre gros plan sur le sujet ), La Passion du Christ peine à trouver des distributeurs aussi bien aux Etats-Unis que outre Atlantique. Malgré les fortes attaques qui pèsent contre lui, Gibson en sort vainqueur avec déjà 315 millions de dollars engrangés après seulement un mois d'exploitation. De quoi éponger le relatif échec de sa précédente production The singing Detective (octobre 2003) qui, en dépit de son sublime casting, n'a pas encore franchi les frontières américaines.