Apocalypto
États-Unis, 2006
De Mel Gibson
Scénario : Mel Gibson, Farhad Safinia
Avec : Jonathan Brewer, Dalia Hernandez, Rudy Youngblood
Photo : Dean Semler
Musique : James Horner
Durée : 2h19
Sortie : 10/01/2007
Le jeune maya Patte de Jaguar se fait kidnapper par une bande rivale lors d’un assaut sur sa tribu. Emmené de force vers un temple pour y être sacrifié, il va tout faire pour s’échapper…
CE VIEUX RÊVE QUI BOUGE
Il y a sous Apocalypto un grand film qui gigote et tente vainement d’émerger. Malheureusement, le nouvel opus de Mel Gibson semble presque effrayé par son propre potentiel et reste trop souvent dans une demi-mesure assez tiède. Le pari a pourtant tout d’original: faire un film sur une civilisation méconnue, les Mayas, et le tourner dans la langue de l’époque. Fort du carton de La Passion du Christ, dont le point de départ était à peine moins casse-gueule, Gibson tente l’aventure mais paraît s’arrêter à mi-chemin vers son sujet, comme en atteste la citation qui ouvre le film, "Une grande civilisation n’est conquise de l’extérieur que si elle s’est détruite de l’intérieur", qui laisse présager une œuvre ample qui ne viendra jamais. L’histoire est celle de Patte de Jaguar (un très bon Rudy Youngblood), enlevé avec sa tribu par un clan rival et qui, dans la cohue, parvient à sauver sa femme et son fils en les cachant dans une crevasse. La description que fait Gibson du mode de vie maya dans la première partie est pointue et rafraîchissante. S’ensuit une longue traversée de la jungle, où Apocalypto glisse peu à peu vers un film d’aventure beaucoup plus banal, à mesure que Patte de Jaguar s’éloigne de son village et que la perspective de la mort s’approche pour sa famille, restée coincée sous terre.
THE HUNTED
La deuxième partie du film est la plus frustrante. Gibson nous y donne le premier (et seul) aperçu de la civilisation maya sous la forme d’une scène de sacrifice ambitieuse mais partiellement ratée et, après ce qui ressemble fort à un climax visuel et narratif, Apocalypto se contente de n’être qu’un film de survie à travers la jungle. L’action est rondement menée et l’intense originalité des participants, que ce soit par leur charisme ou leur aspect (les maquillages sont extraordinaires), fait passer la pilule. Mais Gibson semble s’autoriser à ne faire qu’une poursuite efficace et sans plus, comme si l’univers qui entoure les protagonistes se suffisait à lui-même. La dernière partie tente une mise en perspective du futur de la civilisation maya, mais elle est amenée d’une manière trop bâclée pour réussir. De La Passion du Christ qui, malgré ses boursouflures, faisait preuve par moments d’un vrai souffle, Gibson ne semble retenir que les mauvais côtés, comme ces saillies de violence grotesques et ces fautes de goût (un improbable accouchement sous-marin) dont il semble être devenu coutumier. Malgré toute l’ambition du film, Apocalypto laisse une sensation d’inachevé. De l’œuvre de Gibson cinéaste, on continuera à préférer Braveheart, certes moins osé sur le papier, mais tellement plus abouti et cohérent par rapport à ses intentions.