Temps qui reste (Le)
France, 2005
De Francois Ozon
Scénario : Francois Ozon
Avec : Valeria Bruni-Tedeschi, Daniel Duval, Jeanne Moreau, Melvil Poupaud
Durée : 1h25
Sortie : 30/11/2005
Romain, jeune photographe de 30 ans, apprend qu’il est atteint d’une maladie qui ne lui laisse plus que quelques mois à vivre.
N’OUBLIE PAS QUE TU VAS MOURIR
Sablier retourné, François Ozon profite de l’urgence pour dénuder son cinéma. Un réalisateur déshabillé par le temps qui s’en va, mettant de côté le ludisme de Swimming Pool ou la maison de poupées de 8 femmes, les refrains de boîte à musique dans Gouttes d’eau sur pierres brûlantes ou le dispositif formel de 5x2. Débarrassé de ses déguisements, nu et vulnérable, le vent froid de l’irrévocable en pleine gueule. Le Temps qui reste trace son chemin, tout droit, vif et sec (1h25), à partir d’un argument de base minimal. Inéluctable et résigné: là où Sous le sable, l'un des sommets de Ozon, courait après ses fantômes, une apparition indistincte sur la plage ou une impossible résurrection, Le Temps qui reste regarde la mort en face, tout en dispersant ses petits cailloux sur la route qu’il y a encore à parcourir. Romain, fier et arrogant, fragilisé par un déni farouche (quelques écarts verbaux dans un dîner de famille, quelques gifles avec son amant) et un désir impérieux, attraper ce temps qui reste et ne pas le gaspiller.
LE TEMPS NE DETRUIT PAS TOUT
Un objectif braqué vers sa sœur en forme de rapprochement et de réconciliation pudiques, si loin et si proche, ou quelques clichés d’un ancien amoureux pendant son sommeil, ses yeux clos, son bras dénudé, le bas de son ventre qui se soulève et se repose. Des images que le jeune photographe capture pour fixer le temps et un sentiment qui flotte, célébré le court espace d’un flash. Une étreinte avec une aïeule, entre sincérité vacharde ("tu es comme moi, tu vas bientôt mourir") et tendresse démesurée, assez pour faire exister un personnage, celui de la grand-mère, précieuse interlocutrice aux heures longues et au vécu sinueux, elle aussi sur les traces languides des nuits éternelles. Des nuits où brillent quelques étoiles, comme une main posée sur le cœur pour s’apercevoir que, finalement, il bat encore, loin des backrooms à charcuterie. Le Temps qui reste se nourrit de premier degré et de naïveté pour accoucher d’une élégie bouleversante, à peine perturbée par quelques maladresses (les retours à l’enfance un peu appuyés). Images récurrentes, le soleil qui décline, jusqu’à tomber dans la bouche entrouverte du héros (Melvil Poupaud, magnifique), et une plage qui se désole, une fois le sablier écoulé.