Tron

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Dillinger, vice-président d’Encom, a gravi les échelons grâce aux jeux vidéo qu’il a dérobés à Flynn, programmeur de génie, et ancien salarié de la grande entreprise informatique. Avec l’aide de ses anciens collègues, Alan et Lora, Flynn s’introduit chez Encom pour pirater leur serveur et récupérer les fichiers qui prouveraient le vol de ses créations. Mais le Maître Contrôle Principal (MCP), super-logiciel intelligent d’Encom, utilise un laser expérimental pour numériser Flynn et l’envoyer au cœur du système informatique. Le jeune programmeur va devoir affronter le logiciel sur son propre terrain à l’aide de Tron, un programme de sécurité mis au point par Alan.

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Le début des années 80: l’informatique explose aux Etats-Unis. Steve Jobs et Bill Gates sortent de leurs garages et deviennent rapidement les symboles de la révolution informatique. Parallèlement, les jeux vidéo envahissent les fast-food et remplacent les flippers. Les salles d’arcade font leur apparition: tous les quarters des adolescents passent dans les bornes Pac-Man, Pong et Space Invaders. Ces événements quasi légendaires pour les hardcore gamers trouvent un écho dans la trame scénaristique de Tron. Tout un public est séduit par un film faisant du programmeur génial (et joueur invétéré) le premier protagoniste de son histoire: l'explosion du jeu vidéo a quasiment créé l'adolescent attardé devenu aujourd'hui un poncif psychologique. Tron s'empare du vidéoludisme et propose à son public un défi cinématographique révolutionnaire: représenter des acteurs réels dans un univers informatique artificiel. L’histoire ne suppose rien de moins que la création d’un jeu vidéo en trois dimensions, et nous sommes au tout début des années 80! Le recours à l’infographie s'impose comme un choix artistique essentiel. Le film doit être électronique, pour ne pas dire numérique: il proposera une vision originale de ce que devrait être un jeu vidéo vu de l'intérieur. Syd Mead (Blade Runner) et le grand dessinateur Mœbius seront les créateurs de ce monde virtuel, et produiront un design inédit et attractif où les formes circulaires prédominent (disques, cycles, etc.). À la fois pari artistique et défi technologique, le film ne ressemblera à rien, version hallucinée et libérale du cahier des charges "disneyen". Cette hybridité intrinsèque fait aujourd’hui de Tron un ovni cinématographique, tant il reste frais et dynamique, et s’avère par moments contemplatif et bizarroïde.

Principale curiosité du film: l’emploi de la rotoscopie, une technique consistant à superposer sur une prise de vue réelle une animation image par image. Elle impose des plans fixes correspondant aux décors dans lesquels ont été préalablement filmés les acteurs, soient des structures totalement noires sur lesquelles vont être plaqués les décors du monde électronique. La caméra doit rester fixe pour que le décor virtuel se superpose exactement sur chaque image. Le résultat est désespérément statique: les panoramiques et les travellings sont exclus quand les personnages se déplacent dans un décor. Pourtant, quelque chose se passe: les bruitages synthétiques et l’absence fréquente d’accompagnement musical créent un univers fascinant et étrange. Le charme de Tron tient beaucoup de ces explorations des personnages rebelles à travers le logiciel: une sorte de voyage initiatique aux résonances mystiques, où l’on boit littéralement l’énergie à une source. Quand la technique fait défaut, il y a toujours une idée pour y pallier. Ainsi, les "combats de gladiateurs" pour lesquels Tron est si célèbre ne sont pas une fin en soi. Ils sont certes des concepts visuels hautement jouissifs et spectaculaires (la palme va à la course de "moto lumières", à l’inventivité et au découpage inégalés) et contribuent au culte du film, mais ils ne masquent jamais la profondeur insoupçonnée de l’histoire.

A.I.

Il faut bien le reconnaître, les déboires des programmeurs dépossédés par la méchante multinationale ont tout du simple prétexte. L'intérêt du film est au-delà de cette piètre intrigue de techno-thriller (si l'on y pense forcément, War Games n'est sorti qu'en 1983). Seul importe le monde virtuel. Et ce qui s'y passe a tout d'une guerre de religion. Steven Lisberger passe son univers numérique à la peinture prophétique: les programmes croient en leurs créateurs/utilisateurs (les usagers), une croyance que combat le MCP. En tant qu'intelligence artificielle, il veut devenir Dieu à la place de l'Homme dans le cœur des programmes. Tron est un prophète, le juste combattant du dogme classique, le héraut des humains, signe d'harmonie électronique, grand éradicateur de bugs. Il deviendra même David combattant Goliath lors de l'affrontement final. Quant à Flynn, investi des pouvoirs divins de l'usager (ressuscitant les programmes, maîtrisant les véhicules), il devra reprogrammer le MCP maléfique de l'intérieur. Non, vous ne rêvez pas, il s'agit bien d'une production Disney destinée au jeune public (et la résolution se fera dans les règles, joyeuse et colorée). Mais Tron donne beaucoup plus que ça, il propose une exploration. On découvre une faune de programmes bigarrés entre deux affrontements, on traverse une mer de données sur un vaisseau solaire, le long d'un faisceau de données. Collines macroscopiques et particules composent un paysage psychédélique et hypnotique, qui rappelle le cinéma expérimental. Tron est un sort jeté à l'imagination, un trip cinématographique, un Disney sous acides. Prophète en son temps, il reste incroyablement unique: dans ses choix artistiques et technologiques, il a tout du film avant-gardiste.

par Benjamin Hart

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