Public Enemies
Public Enemies
États-Unis, 2009
De Michael Mann
Avec : Christian Bale, Marion Cotillard, Billy Crudup, Johnny Depp, Stephen Dorff
Durée : 2h10
Sortie : 08/07/2009
Basé sur l'histoire vraie de John Dillinger, un braqueur de banque hors pair qui a sévi à de nombreuses reprises dans l'Amérique des années 30. Avancé comme "l'ennemi public numéro 1" par le patron du FBI, John Edgar Hoover, Dillinger sera traqué sans relâche par Melvin Purvis, l'un des agents fédéraux des plus efficaces.
Pas vraiment étonnant de voir Michael Mann s’atteler à un projet tel que cette adaptation (légèrement ?) romancée de la vie de Dillinger et de l’époque qui l’a vu s’imposer comme l’ennemi public numéro un. Car d’une certaine façon, ce film, Mann l’a déjà réalisé avec Heat, qui était lui-même un remake de son L.A. Takedown (téléfilm méconnu et aujourd’hui quasi invisible). Comme si Mann creusait le même terreau depuis des années, comme si ces deux films constituaient d’habiles répétitions pour ce qui devrait devenir un jour son chef d’œuvre, au sens premier du terme. Malheureusement, malgré ses qualités innombrables, ses fulgurances indiscutables, sa mise en scène classieuse, sa photographie granuleuse, Public Enemies ne parvient non seulement que rarement à égaler l’illustre face à face que se livraient De Niro et Pacino, mais ne se hisse même pas au niveau de ses autres films. Public Enemies est une déception car, contrairement à Miami Vice, autre film mal aimé du cinéaste au scénario défaillant, ce nouveau métrage ne parvient que peu à imposer des personnages extrêmes, charismatiques, élégants. Les acteurs ne sont certes pas responsables : Depp parvient à retrouver dans son jeu le classicisme des acteurs d’époque (magnifique hommage de le voir regarder un film mettant en scène Clark Gable dans le rôle de… John Dillinger ; mais aussi incroyable idée de confronter le personnage à son double filmique) et livre ici l’une de ses meilleures compositions. Bale, dans un rôle plus ingrat, parvient à imposer une figure en retrait, dont les émotions intériorisées et contradictoires sont susceptibles d’exploser à tout moment. Cotillard, Crudup et Dorff font, à leurs côtés, ce qu’ils peuvent.
Le problème résiderait plutôt dans un scénario qui échoue à faire de ce face à face une légende, de cette rencontre une date, à l’image de cette scène magique de Heat qui voyait De Niro affronter Pacino autour d’un simple café. La comparaison avec le seul et unique face à face entre Depp et Bale ne tourne malheureusement pas forcément à l’avantage de Public Enemies. Pourtant, les restes sont beaux : majestueux, à l’image de ce plan furtif montrant Dillinger face à un champ de blé et que, un temps, le film s’arrête, beau et mélancolique ; troublants, à l’image de cette scène (imaginée ?) montrant ce même Dillinger visiter le bureau de police à l’insu de tous ; haletants, comme peut l’être cette scène d’ouverture extraordinaire, qui égale en spectacle et en tension la fusillade centrale de Heat ; passionnants, tels ces prémices d’un Hoover encore à la recherche de financement pour son FBI qui patauge… Parce que Michael Mann reste encore et toujours l’un des cinéastes les plus captivants au monde, construisant film après film une œuvre fascinante explorant les différentes facettes d’une même Amérique, et que sa mise en scène reste toujours aussi ample et tendue. Peut être, au lieu de refaire le même film en se contentant de le déplacer temporellement (on n’énumèrera pas ici les ressemblances entre Heat et ce quasi remake Public Enemies, mais encore une fois elles sont nombreuses), aurait-il du s’engager sur une autre voie ? Le film pose en tout cas la question de l’avenir du cinéaste, dont l’inspiration pourrait bien se tarir, ce que l’on pouvait déjà pressentir dans Miami Vice. Nous n’avons jamais réellement eu d’inquiétude à son propos. Public Enemies, en tant que semi réussite, se clôt en point d’interrogation.