Princesse Mononoké
Mononoké Hime
Japon, 1997
De Hayao Miyazaki
Scénario : Hayao Miyazaki
Photo : Atsushi Okui
Musique : Joe Hisaishi
Durée : 2h13
Dans le Japon médiéval de l’ère Muromashi, le Prince Ashitaka, rongé par une terrible malédiction, doit quitter son village pour partir à la recherche d’un remède. Lors de sa quête, il se retrouve au centre d’un conflit opposant les humains, menés par Dame Eboshi, et les Dieux de la Forêt à travers San, jeune fille sauvage élevée parmi les loups.
Fresque historique, fable écologique, poème épique, Princesse Mononoké est tout cela à la fois. Ce chef-d’œuvre d’une finesse et d’une richesse thématique époustouflantes a permis au maître Hayao Miyazaki d’être enfin reconnu internationalement, au-delà du cercle des fans des mangas ou des observateurs du cinéma japonais. Le thème principal de Princesse Mononoké, ou tout du moins le plus fort, c’est la lutte sans fin de l’homme et sa technologie face à la nature. Rarement un long métrage de cinéma, et a fortiori jamais un film d’animation, n’a aussi bien exprimé toute la force, la beauté, l’omniprésence des éléments naturels, tout le courage, la volonté, et l’impossibilité de l’homme à dominer ces éléments. La beauté mais aussi la sauvagerie de la nature sont illustrées par des images d’une magnificence inouïe. Au niveau des personnages, le graphisme d’un classicisme et d’une simplicité maîtrisée bouleverse moins. Il ne nuit en tout cas pas à leur complexité, les sentiments qu’ils font passer étant parfois très contradictoires, loin d’un quelconque manichéisme. Ainsi, le personnage de Dame Eboshi est admirable de par sa modernité, son féminisme avant l’heure, mais inquiète par sa cruauté et sa froideur. Quant à San, sa sauvagerie et sa haine envers les hommes en font une héroïne assez extrême.
De cette manière, Miyazaki n’a pas la prétention de vouloir donner des leçons, mais souhaite seulement poser certaines questions. La cohabitation entre ces deux univers est-elle possible? La violence et la guerre mènent-elles quelque part? L’amour peut-il sauver le monde? Gagnant en gravité, Miyazaki n’en a pas pour autant perdu son âme d’enfant. Les personnages des Kodamas, esprits de la forêt facétieux et mignons tout plein, en attestent et contribuent à la poésie du film. Une dimension spirituelle confirmée par la mise en œuvre d’un véritable panthéon animiste, avec des animaux et créatures surnaturelles particulièrement expressifs. Mais Princesse Mononoké n’est pas un film intimiste comme par exemple Mon voisin Totoro. Entre les plages contemplatives derrière lesquelles se glisse un subtil questionnement philosophique, les morceaux de bravoure se succèdent. Ces sautes de rythme dans l’histoire sont parfaitement illustrées par la partition de Joe Hisaishi. Les multiples degrés de lecture du film permettent de le revoir quasiment à l’infini avec le même plaisir, celui d’en prendre plein les yeux, celui qui titille votre intelligence, et surtout celui d’être touché au plus profond de son âme.