La Fiancée de Frankenstein

La Fiancée de Frankenstein
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Fiancée de Frankenstein (La)
The Bride of Frankenstein
États-Unis, 2008
De James Whale
Avec : Colin Clive, Boris Karloff
Durée : 1h12
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Le Dr Frankenstein et sa créature ont survécu. Un savant fou, le Dr Pretorius, kidnappe la femme du Dr Frankenstein, et l'oblige à tenter de nouveau l'horrible expérience, dans le but cette fois de créer un monstre féminin...

THE MONSTER DEMANDS A MATE!

"Nous avons dénombré dix scènes où le monstre étrangle ou écrase des gens à mort sans compter les meurtres des autres personnages. Montrer tant de morts est inconsidéré et nous vous conseillons instamment de les limiter" : ainsi parlait Joseph Breen, le censeur en chef du comité d’éthique, à la vision d’un premier montage de La Fiancée de Frankenstein en novembre 1934. James Whale rétorqua simplement : "Tuez-les tous, Bree fera le tri". La créature remet donc le couvert, alors que Whale était réticent à l’idée d’une suite. Le scénario de celle-ci a d’ailleurs connu quelques errances avant d’aboutir à un classique du genre, surpassant pour beaucoup le premier épisode. Un premier traitement a été effectué par l’ex-journaliste Tom Reed, raconte le critique Scott MacQueen. Une base pour le moins grand guignol qui voit Elizabeth se faire tuer pour ses organes, tandis qu’on vole sa tête à une "géante de foire suicidée", entre autres récupérations de cadavres lors d’un accident de train, le tout dans une farandole de protagonistes faite de villageois, prêtres et danseurs homos. Mais Reed pose néanmoins quelques thèmes et figures repris ensuite: le monstre se mirant dans l’eau, son amitié avec un aveugle, le fait qu’il soit doté de parole et bien sûr, l’apparition de la fiancée. Plus tard, l’écrivain Lawrence Blochman s’inspire du Freaks de Tod Browning et envoie Henry et Elizabeth dans une fête foraine où, devenus marionnettistes, ils rejouent l’histoire de la créature. Cette piste sera finalement abandonnée.

Whale, qui accepte finalement de tourner cette suite, souhaitait apporter plus de légèreté et d’humour au traitement. Le résultat est ce film plus excentrique, avec la présence du crypto-gay Dr Pretorius, des bouffonneries d’Una O’Connor, ou de parenthèses dans le récit comme la séquence des personnages miniatures. Si l’archevêque endormi réussit à détourner la censure, il n’en va pas de même pour un bébé rapetissé, qu’on ne voit plus à l’écran. Whale, joueur, revient aux fondations de l’histoire en ajoutant un prologue où dissertent la jeune Mary Shelley, Lord Byron et Percy Shelley, lors de cette fameuse nuit où va naître la créature dans l’imagination de l’écrivaine. En projection ludique, Whale emploie la même actrice, Elsa Lanchester, pour jouer Mary et, plus tard, ladite fiancée (alors que pour ce dernier rôle, c’est la femme robot de Metropolis, Brigitte Helm, qui était pressentie). Celle-ci est restée culte pour son look fabuleux, sous le signe de l’Egypte : d’abord enroulée dans des bandelettes telle une momie, ensuite coiffée à la façon d’un Néfertiti art déco. Pour son rôle sans dialogue qui nécessitera néanmoins quelques cris, Lanchester dit s’être inspirée des cygnes et de leur sifflement menaçant. La fiancée est devenue une icône du fantastique, pratiquement au même titre que la créature, évoquée du Rocky Horror Picture Show à Small Soldiers en passant par La Fiancée de Chucky, où les cris de la fiancée s’enfoncent dans le bain de Jennifer Tilly lorsque sa télévision lui tombe dessus, Tilly à son tour flanquée d’un monstre comme compagnon.

Mais derrière les fantaisies subsistent des thèmes du premier épisode, cette tragédie de l’individu hors des conventions et qui se heurte à la meute et au rejet social, ce qui concerne aussi bien le monstre que le vieil homme aveugle, figure biblique et esseulée avec laquelle la créature fait eucharistie, avant d’apprendre les bases du langage (idée d’abord rejetée par Karloff, craignant la démystification de son personnage). Las, cette parenthèse d’humanité sera refermée dans les flammes, à l’apparition des chasseurs. Toujours en délicatesse avec Dieu, la créature implore des enfants (dont Marilyn Harris, la fillette… tuée dans le premier film) devant une statue du Christ qui l’a bel et bien abandonné, renverse une statue d’évêque au cimetière près d’une autre sculpture de Jésus (celle qu’il renverse dans le script original), lui qui, à un moment du film, se fait littéralement crucifier par la foule. Whale donne un style particulier à ces scènes, celle de la fuite en forêt, où l’on ne voit jamais de vrai ciel (seulement une peinture ténébreuse qui laisse croire qu’un orage va éclater à tout moment), jouant sur la rupture entre les bois merveilleux, avec leurs fleurs et leurs cascades, puis la traque dans une forêt de cauchemar, aux arbres nus et à la végétation calcinée. Le clou sera pour le finale, leçon de montage où la lumière de Mescall est à son apogée. Alors Joseph Breen pourra bien effacer onze des vingt et une morts originales, La Fiancée demeure immortelle, un peu comme Elizabeth et Henry, morts dans le premier montage, mais une fois de plus sauvés dans la version finale.

par Nicolas Bardot

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