Chateau dans le ciel (Le)
Tenku no Shiro Laputa
Japon, 1986
De Hayao Miyazaki
Scénario : Hayao Miyazaki
Musique : Joe Hisaishi
Durée : 2h04
Perdue entre ciel et terre, une île à la dérive déchaîne les passions les plus aveugles. L’île légendaire de Laputa, dont seule Sheeta, fugitive malgré elle, connaîtrait l’accès. Ballottée entre l’armée et les pirates de l’air, avant de tomber littéralement dans les bras d’un aventurier en herbe, la jeune fille entame une course effrénée pour échapper à ses poursuivants et découvrir le secret de la pierre bleue qu’elle porte autour du cou.
TERRA INCOGNITA
Film baptême du studio Ghibli et pièce incontournable de l’animation japonaise, Le Château dans le ciel enterre toute concurrence à sa sortie. Deux ans après les tâtonnements de Nausicaä de la vallée du vent, Miyazaki jette à nouveau les dés d’un pari audacieux. Disposant d’un budget plus conséquent et d’une meilleure maîtrise technique, Le Château dans le ciel propulse Ghibli sur le devant de la scène. Seize ans après sa réalisation, le film continue d’être une inépuisable source de jouvence pour tous ceux qui s’en inspirent. Cité par les récents Atlantide de Disney et Géant de fer de Brad Bird, Le Château dans le ciel est lui-même au croisement de plusieurs influences européennes : Les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift, Le Roi et l’oiseau de Paul Grimault, les romans de Jules Verne ou de Saint-Exupéry. Un brassage culturel qui, loin d’étouffer Miyazaki, attise plus que jamais son imagination. Véritable profession de foi, Le Château dans le ciel contient déjà tous les germes de son univers : la fascination des machines volantes, l’utopie écologique, l’ingénuité de l’enfance se heurtant à une société belligérante.
LA POURSUITE INFERNALE
De son héritage littéraire, Miyazaki a gardé un goût immodéré pour la narration. Aventure picaresque, intrigue politique, réminiscence mythologique ou conte fantastique, le film emprunte à tous les genres et exploite intelligemment une matière foisonnante. Produit par un mélomane averti (Isao Takahata), Le Château dans le ciel bénéficie d’une structure réglée au diapason, savant équilibre entre temps morts et accélérations. D’une redoutable précision rythmique, le film maintient pendant deux heures un suspens trépidant, en creusant jusqu’à épuisement la notion de mouvement. Débutant par l’attaque d’un vaisseau volant, avant d’enchaîner sur une poursuite en voiture puis en train, Le Château dans le ciel renouvelle sans cesse les motifs de son action. Un pont menaçant de s’effondrer, une tour en flammes prise d’assaut par un robot géant, une ascension dans le brouillard… Chaque espace investi donne lieu à des séquences d’une étourdissante inventivité. Passé un court pré-générique dans les airs, le film s’ouvre sur une magnifique galerie de crayonnés, où Miyazaki laisse libre cours à sa passion pour les avions et les moulins à vent.
PAR-DELA LES NUAGES
Avant même Porco Rosso et son défilé d’hydravions, le studio Ghibli démontre l’étendu de son savoir-faire dans d’éblouissantes séquences aériennes. Du ciel aux entrailles de la terre, des mines à la cité volante, le film entraîne ses personnages dans un monde en apesanteur, bouleversant les repères et les extrémités, inversant l’altitude et la profondeur. Héros funambules, Pazu et Sheeta se jouent des précipices et reculent les limites de l’impossible. En confrontant plusieurs groupes de personnages, le film offre un large éventail de caractères et de tonalités. Et passe, avec une infinie aisance, de la fable au drame et de la comédie au rêve. Soutenu par un scénario en perpétuelle effervescence et une mise en scène stupéfiante, Le Château dans le ciel est un spectacle total, un vertige des sens d’une beauté telle, qu’on peine à croire que le film date de 1986. Projeté dans quelques festivals, le film bénéficie aujourd’hui d’une nouvelle partition musicale orchestrée par Joe Hisaishi - destinée au public américain -. Sur les conseils avisés de John Lasseter, la copie distribuée en France est la version originale restaurée.