Festival de Cannes 2014 - ultimes pronostics
Le moment fatidique approche: c'est le 17 avril que sera dévoilée la sélection officielle de Cannes 2014. Nous sommes allés invoquer l'esprit de Mme Soleil qui a décidé de se mouiller comme jamais. Voici nos pronostics raisonnables... ainsi que nos souhaits et fantasmes pour un Cannes encore plus beau.
Qui figurera en compétition de l'édition 2014 du Festival de Cannes ? Seuls Thierry Frémaux, Gilles Jacob, quelques acolytes et réalisateurs le savent, même si les listes de pronostics pullulent, et que sur Twitter, le concours du moi je sais de source sûre bat son plein. Après nos pronostics mi-sérieux mi-farfelus mis en ligne au lendemain de Cannes 2013 (que vous pouvez retrouver ici et qui, malgré leur mise en ligne avant toute forme de buzz, ne sont pas totalement aux fraises), nous sommes allés convoquer l'esprit de Mme Soleil et nous faisons un pari. Pas une liste de pronostics avec 47 titres, pas une liste avec 49 titres dont 47 pompés sur la première liste (créant parfois du buzz sur des candidats qui ne le sont même pas), mais juste 20 titres tout pile : soit les 20 qui à nos yeux (ou plutôt à ceux, perçants, de Mme Soleil), ont une tête à concourir pour la Palme d'or. Tout cela est parfaitement subjectif, on vous l'accorde. Comme les choix de Thierry Frémaux. Mais nous vous proposons de jouer quand même, tout en ajoutant quelques vrais souhaits perso pour le cru 2014...
A Pigeon Sat on a Branch Reflecting on Existence, Roy Andersson
Si Nous, les vivants avait dû se “contenter” d’Un Certain Regard, A Pigeon… qu’Andersson prépare depuis des années a une vraie tête de compétition. Tourist de son compatriote benjamin Ruben Ostlund ira plus probablement chercher son bonheur en sections parallèles.
Bande de filles, Céline Sciamma
Un Certain Regard pour Naissance des pieuvres, Berlinale pour Tomboy, présidence de la Semaine de la Critique... L'officielle tourne probablement autour Sciamma comme Winnie autour du miel - buzz polémique de Tomboy ou non. Bande de filles a t-il les épaules pour une compétition ?
Bird People, Pascale Ferran
Ferran revient avec un film ambitieux et un serpent de mer déjà présent dans les pronostics... l'an passé. Ce projet hors normes par une réalisatrice jamais sélectionnée en compétition a forcément un intimidant viseur point rouge sur le front.
Birdman, Alejandro Gonzalez Inarritu
Un réalisateur qui connait bien Cannes, mais qui changerait cette fois de registre en goûtant un peu à la comédie. Avec un gros cast à faire monter sur un tapis rouge. [EDIT: Le film apparemment ne serait pas prêt à temps. Désolé Mme Soleil !]
Coming Home, Zhang Yimou
Le retour de Zhang Yimou, presque vingt ans après sa dernière présence en compétition ? Au moins pour que Gong Li puisse dire au revoir à Gillou…
Deux jours, une nuit, Jean-Pierre & Luc Dardenne
Jean-Pierre Dardenne. Luc Dardenne. Frémaux n'aime pas qu'on parle d'abonnés cannois, mais un nouveau film de Dardenne peut-il être zappé de la compétition ? Un nouveau film des Dardenne avec Marion Cotillard ? Un nouveau film des Dardenne qui sort... le 21 mai ? Vraiment vraiment ?
Foxcatcher, Bennett Miller
Un gros buzz américain entoure le réalisateur de Truman Capote et du Stratège, plus habitué à la saison des Oscars qu’au printemps cannois...
The Golden Era, Ann Hui
Parce que Cannes aime les retrouvailles et que la prolifique et méconnue réalisatrice hong-kongaise est venue à Cannes à une période où Jennifer Lawrence n'était pas encore née - et n'a jamais été sélectionnée en compétition. Deux ans après le très beau (et primé à Venise) Une vie simple, il est temps de réparer cela.
The Homesman, Tommy Lee Jones
Sa sélection en 2005 était une surprise (et même s’il a été primé, Trois enterrements a peut-être été un peu oublié). Néanmoins, le buzz américain est fort autour du nouveau film de Tommy Lee Jones, qui serait aussi le fat come back d’Hilary ‘les Oscars m’ont tuer’ Swank.
How to Catch a Monster, Ryan Gosling
La surprise de la sélection ? Le premier projet (ambitieux) d’un acteur que tout le monde aime et qui passe à la réalisation : si le film est bon, il n’y a pas de raison.
Jimmy's Hall, Ken Loach
A moins que le facteur “ultime film” pousse Jimmy’s Hall hors compétition, on imagine mal le dernier Loach ailleurs que dans la catégorie reine – surtout quand certains de ses récents films pourtant anodins (voire pire) y ont eu droit.
Leviathan, Andrei Zviagintsev
Primé avec Le Bannissement, puis très bien accueilli à Un Certain Regard avec Elena (qui fut ensuite un beau succès en salles en France), Zviagintsev pourrait faire son retour en compétition avec son nouveau film.
Maps to the Stars, David Cronenberg
Un des rois sans couronne du cinéma mondial : ni Ours, ni Lion, ni Palme. Même si ce n’est bien sûr pas la seule raison pour le sélectionner. Là encore, il s’agit d’un film déjà daté : sortie prévue le 21 mai…
Mr Turner, Mike Leigh
La sélection vénitienne de Vera Drake, refusé à Cannes selon Leigh, a été effacé par l’excellent accueil de Another Year. Sauf que le film n’a eu aucun prix. Leigh fera t-il mieux avec ce biopic ?
On the Milky Road, Emir Kusturica
Un petit parfum 90’s en compétition ? Thierry Frémaux saura t-il (ou aura-t-il une raison de) dire non au nouveau Kusturica associé à Monica Bellucci ?
The Rover, David Michod
Sur le papier, un polar viril comme on en a vu pas mal ces dernières années à Cannes. Le tout par un jeune réalisateur qui sort d’un Animal Kingdom couronné de succès et d’applaudissements.
Sils Maria, Olivier Assayas
Il y a deux ans, la twittosphère aurait mis l'intégralité de ses membres à couper: Après mai en sera. Il n'en fut rien. Assayas revient mais on sait que la compétition française est aussi tendue qu'une pommette de Real Housewife. Assayas a une arme fatale: Juliette Binoche (dite JujuBee) qui tel Nicky Larson ne craint personne.
Sommeil d'hiver, Nuri Bilge Ceylan
D’ores et déjà le favori? On vous l’accorde, il est absurde d’en parler dès maintenant. Mais dans une année qui s’annonce assez ouverte sur le papier, Nuri Bilge Ceylan sera un nouveau prétendant sérieux au palmarès. Et donc à la sélection.
Still the Water, Naomi Kawase
Parce qu'elle le vaut bien. Parce qu'elle n'aurait pas volé une Palme en 2003 (Shara) ou en 2007 (La Forêt de Mogari). Parce que Frémaux l'aime d'amour - comme nous tous. Et parce que Jane Campion, la Marie Myriam de Cannes, rêve secrètement de passer le relai - non ?
Enfin, quelques souhaits :
Pour Cannes 2014, plus de réalisatrices (en compétition)
Thierry Frémaux a régulièrement été attaqué sur ce point. L’an passé, une seule réalisatrice était en compétition, et zéro en 2012, ce qui constituait une douche froide après les quatre réalisatrices retenues en 2011. On sait que s’il y a une réalisatrice pour vingt réalisateurs, lorsqu’on doit constituer une compétition de ténors comme à Cannes, trouver autant de femmes que d’hommes n’est pas évident. Mais franchement, sincèrement, simplement : quand il y a la place pour sélectionner des films tels que Des hommes sans loi, Cogan – la mort en douce, La Source des femmes, Fair Game, La Nostra vita, Soleil trompeur 2 ou Un garçon fragile – le projet Frankenstein, est-ce qu’il n’y a vraiment pas de place pour d’autres films réalisés par des femmes ?
Pour Cannes 2014, plus d’Asie (différente)
Même si à l’heure des multi-coproductions il est un peu absurde de penser ainsi, l’an passé, à peu près les deux tiers de la compétition se limitaient à un match France-Etats-Unis. Ces dernières années, l’Asie a souvent été calée sur 2 à 3 strapontins. Hormis les sélections audacieuses de Brillante Mendoza et Eric Khoo en 2008, ce sont souvent les mêmes noms asiatiques qui reviennent. Manque de nouveaux talents ou plutôt manque de curiosité pour l’Asie ? On espère en tout cas une compétition 2014 encore plus aventureuse sur ce point.
Pour Cannes 2014, plus de premiers films (ou au moins un)
En parlant d’aventures : l’un des piments de l’excellente compétition 2011 était la présence de deux premiers films que nous avons beaucoup aimés (Sleeping Beauty et Michael). Évidemment, Thierry Frémaux fait avec ce qu’il a. Mais ces deux dernières années ont manqué de surprises et d’inconnus. On dira ce qu’on veut de la Berlinale, mais, hormis ses traditionnels films politiques/à sujet, on entre souvent dans la salle sans savoir ce qu’on va voir. Pas sûr qu’on ressente la même chose le matin où l’on ira voir le Dardenne pour enchainer avec le Loach…
Pour Cannes 2014, plus d’autres pays (comme l’Allemagne)
Certains pays semblent à la diète à Cannes. C’est le cas de l’Allemagne qui fournit pourtant quelques uns des jeunes réalisateurs contemporains les plus passionnants. Certes, l’existence de la Berlinale fait que ces mêmes réalisateurs partent souvent à la chasse à l’Ours. Mais lorsque Cannes a des Allemands sous le coude (et on parle davantage de la sophistiquée École de Berlin que du ciné plus pépère de Fatih Akin), ils sont souvent, au mieux, à Un Certain Regard (comme Andreas Dresen – pas non plus vraiment issu de l’École par ailleurs). Si Phoenix de Christian Petzold est prêt à temps, sera-t-il du grand festin ou encore rangé chez les challengers ?
Pour Cannes 2014, plus de fantastique (et pas en séance de minuit)
L’ouverture au cinéma de genre s’est essentiellement traduite, ces dernières années, par une recrudescence de polars et/ou polar virils comme indiqué précédemment. Pour le fantastique, c’est beaucoup plus chiche. L’an passé, ni Real de Kurosawa ni Le Congrès de Folman n’ont fait un tour en compétition, tandis qu’un vrai-faux film fantastique y a obtenu une place (Only Lovers Left Alive). Frémaux a permis une grande ouverture en compétition, notamment à l’animation. On espère qu’il y aura un peu plus de fantastique cette année…