Etrange Festival: New York City Inferno
Jérôme part retrouver son amant Paul, qui a quitté la France pour s’installer définitivement à New York. Il va plonger en plein coeur du quartier homosexuel de la ville : The Village.
Film culte du porno gay, New York City Inferno est présenté à l’Etrange Festival dans le cadre de la Carte Blanche Jacques Audiard. Réalisé par le Français Jacques Scandélari sous le pseudonyme Marvin Merkins, New York City Inferno est un vrai film porno, mais il est resté dans les mémoires parce qu’il est aussi autre chose : un portrait de la ville, de sa vie nocturne et de son crépuscule. François About, chef opérateur du film présent lors de la projection, commente qu’il est probablement le dernier survivant de ce long métrage de l’avant-sida. Le point de départ de New York City Inferno est romantique : un Français laissé par son compagnon qui lui a préféré New York part à sa recherche tandis qu’il relit, de temps à autres, son courrier. Le film de Scandélari à New York ce qu’était The Savage Eye à Los Angeles ? L’esprit est là.
S’il n’a pas le lyrisme poétique de The Savage Eye, New York City Inferno traite aussi d’une ville, de ses ombres, de son altérité. On chante la liberté absolue que représente New York, alors que l’homosexualité est, à la même époque, durement punie en France. La liberté de baise est absolument totale dans New York City Inferno, comme en témoigne l’hallucinante séquence, longue comme un happening qui n’en finit pas, dans un baisodrome géant : alignement de glory holes, mec sur un sling entouré d’autres arborant des masques de démon, partouze non-stop tandis qu’un groupe de rock vocifère ses incantations. Le résultat est à mille lieues du glauque d’une balade dans les sous-sols du Dépôt : la liberté dont on parle, elle est là, absolument exaltante. Avant cela, New York City Inferno croque ses acteurs (qui parfois n’en sont pas, et passent juste par là) comme des parangons d’hyper-masculinité. En tête, le héros, un Will Ferrell moustachu débarqué d’Anchorman, puis une ribambelle de mecs gaulés qui feraient tomber dans les pommes les adeptes d’aujourd’hui de l’épilation intégrale. On se serre la pogne après une grosse baise, on s’attarde sur un mec à la chemise relevée sur les avant-bras, cigarette et queue de billard à la main. La mélopée quasi ininterrompue des chansons des Village People donne le ton : mucho, mucho macho. La première scène de sexe se déroule dans un abattoir – on parle bien de chair.
Le film n’est jamais glauque, à aucune seconde, il est au contraire très vivant, enflammé. Et ne manque pas d’humour : un chat observe placidement une étreinte puis préfère s’endormir, un gus prétend lire l’avenir dans les lignes d’une main… couverte de sperme. Et puis il y a, comme on l’a dit, New York. Un Père Noël dans la rue, des patineurs glissant devant le Rockefeller Center, des écoliers en rang, un Times Square qui bientôt n’existera plus comme tel. C’est ce mélange de soif, d’hédonisme et de mélancolie que New York City Inferno saisit avec maestria : ces silhouettes nocturnes dans la brume avant d’aller trouver un endroit pour faire l’amour jusqu’au levé du soleil. Et remettre ça.