Les Goonies

Les Goonies
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Goonies (Les)
The Goonies
États-Unis, 1985
De Richard Donner
Scénario : Chris Columbus, Steven Spielberg
Avec : Sean Astin, Josh Brolin, Jeff Cohen, Corey Feldman, Ke Huy Quan, Martha Plimpton
Photo : Nick McLean
Musique : Dave Grusin
Durée : 1h54
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De méchants promoteurs s’emparent quartier après quartier de la ville d’Astoria, en Oregon: une bande de copains, les Goonies, voient leurs existences menacées par un exil forcé vers Détroit. C’est alors qu’ils découvrent dans le grenier d’une des maisons la carte au trésor d’un pirate disparu dans la région il y a plusieurs siècles, le célèbre Willy-le-Borgne. Les gamins se lancent dans l’aventure, espérant sauver leurs foyers. Mais la quête est périlleuse, et des bandits italiens recherchés par la police, les Fratelli vont croiser leur chemin.

Le culte est là, dans cette juste adaptation des enthousiasmes de l’enfance. Il fallait avant tout reconstituer l’esprit de la bande de copains dont quiconque a pu faire partie. Il y avait toujours un petit gros baratineur et trouillard (Choco, interprété par Jeff Cohen), un mignon précoce à grande gueule (Bagou: Corey Feldman), un inventeur génialement foireux (Data: Ke Huy Quan, le Demi-Lune d'Indiana Jones et le Temple Maudit) et un grand frère rabat-joie (Brand: Josh Brolin). Quant à ELLES, on ne les comprenait pas encore. Les enseignes "ennuis" et "compliquées" clignotaient au-dessus de leurs têtes, mais on ne pouvait pas s’en débarrasser et ceci, finalement, pour le meilleur (Andy: Kerri Green, et Stef: Martha Plimpton). Une union cinématographiquement parfaite, qui permet au spectateur toutes les identifications possibles et une bonne tranche de rigolade au gré de dialogues truffés d’insultes, d’allusions sexuelles et de vannes en tout genre. Pour exemple ce dialogue entre Choco et Bagou:

- Hey, écoute un peu Choco…

- Quoi ?

- Tu sais que j’ai des photos de ta mère qui prend un bain, complètement à poil. Tu veux me les acheter?

- QUOI?

- Pas chères, bien sûr.

Car oui, à l’époque, on savait encore faire des films avec des vrais gamins à l’intérieur: qui peut croire qu’un producteur se permettrait cet humour dans la bouche d’enfants d’aujourd’hui? Toutes ces figures décapantes et jouissives ont une âme commune, un guide, un chef passionné et naturel (Mikey: Sean Astin), le véritable moteur du groupe, le croyant indéfectible, la voix de la légende.

Souvenez-vous: il fut un temps, pas si lointain, où il était possible de se lancer avec insouciance à la recherche d’un trésor caché. Rien ni personne ne pouvait constituer un obstacle suffisant à l’aventure, surtout pas la réalité triste et morne du monde des adultes. On pouvait tout, les risques ne résistaient pas à la promesse du merveilleux. Les Goonies puise directement dans cette réserve idyllique enfouie en chacun de nous, où les légendes, les trésors, les pirates et les monstres prennent corps, où la Mort elle-même est méprisée et niée ("Les Goonies ne pensent jamais à la mort"); ce faisant il ressuscite l’émerveillement tapi sous nos désillusions d’adultes. Il s’agit bien plus d’un appel à la foi que de nostalgie. Dans Les Goonies, l’enfance est invincible, enjouée et remplie d’espoir. Quand nous avions l’âge de Mikey, Bagou, Data ou Choco (en 1985 pour certains, bien plus tard pour d’autres…), cet état de fait n’était jamais remis en question. Il était évident que, comme ces héros, nous pouvions sauver la situation par un sésame providentiel et fantastique, avec la bénédiction d’une légende. Dix-huit ans plus tard, ce film sonne comme un rappel à l’ordre. Les parents? Ne comptez pas dessus! Ils sont loin derrière, se débattant inutilement dans la toile de la réalité, leurs rêves oubliés, largués, tout simplement. Oui, c’est bien Spielberg qui a fait de toutes ces évidences un film.

Qui en doutait encore? Les bandits sont de grands enfants, un cadavre congelé fait rire, on s’amuse des squelettes, le monstre (Cinoque: John Matuszak) est un fan de chocolat, et le salut vient du pirate. Car c’est bien là qu’est le cœur du film: on y accède par l’orbite obscure d’un crâne, et le parcours commence. La réalisation de Richard Donner ne dévie jamais de sa trajectoire: qu’ils soient extérieurs, caverneux, obscurs ou aquatiques, ses plans vivent tous pour un seul décor, le bateau pirate. Simple et dynamique, parfois surprenante, la mise en scène devient enfin majestueuse pour révéler fortune et gloire, misaine et foc, espèces sonnantes et trébuchantes. Willy-le-Borgne est le seul héros, "le premier Goonie" comme le dit Mikey. Il récompense les braves et punit les pleutres qui lui dérobent son dû. Son rôle terminé, il reprend la mer dans le soleil levant face aux familles enfin réunies. Ce plan magnifique (bien qu’un peu vieilli pour cause d'effets spéciaux obsolètes) assène une dernière fois l’évidence de ce film sacrément réjouissant: les trésors de l’enfance ne meurent jamais.

par Benjamin Hart

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