Bob Fosse - Le Show

Bob Fosse - Le Show

Les spectacles musicaux de Broadway ne traversent généralement l’Atlantique que pour se produire sur les scènes londoniennes. Fait exceptionnel, le show Bob Fosse a entamé depuis le début de l’année 2004 une tournée internationale proposant une vingtaine de dates dans notre capitale. Des Américains à Paris pour chanter et danser le génie de Bob Fosse, les reprises sauce froggy surfant sur la vague Chicago n’ont qu’à bien se tenir.

TAKE OFF WITH US

Danseur atypique, chorégraphe de renom, réalisateur inventif, Bob Fosse est l’un des artistes les plus marquants des années soixante-dix, début quatre-vingt. Au travers des différents médias que sont la scène, le cinéma, les shows télévisés, il a su imposer un style chorégraphique qui lui est propre, une esthétique reconnaissable entre mille. Chapeaux melons, gants blancs, tenues sexy noires pailletées, assortis de mouvements très jazzy et de claquements de doigts, c’est toute l’essence des créations du chorégraphe que Bob Fosse – Le Show propose de capter. Le tout est restitué dans un medley chorégraphique parfaitement agencé revisitant ses plus grands succès des années cinquante aux années quatre-vingt. En 1998, soit douze ans après la mort de Bob Fosse, ses trois plus grands collaborateurs (Chet Walker, son assistant chorégraphe; Ann Reinking, sa danseuse vedette et maîtresse; Gwen Verdon, sa femme et danseuse, directrice artistique sur ce projet) ont repris une idée développée par le maître en 1989 pour créer ce spectacle d’une heure trente divisé en deux parties comme l’étaient les grandes comédies musicales. A sa sortie, la pièce fut un énorme succès et sera auréolée en 1999 du Tony Award du meilleur show musical. Après avoir longtemps tourné sur Broadway puis sur les scènes américaines, les dix-huit danseurs et huit musiciens qui constituent la compagnie investissent donc les théâtres européens et font salle comble.

FOSSE’S WORLD

La salle s’éteint, la scène s’illumine de mille petites ampoules, laissant apparaître des structures de cadres de cabaret sur un fond de mur en briques, le tout séparé du public par un fin écran de tulle qui joue sur les ombres, la touche Fosse est en place, que le spectacle commence! Une introduction d’une grande douceur sur Life is just a bowl of cherries (The Big Deal, 1986), comme l’ouverture d’une porte vers un autre monde, un voyage dans le temps avec en maître de cérémonie l’incontournable Ben Vereen. Le chanteur s’efface quelque temps pour laisser la place aux danseurs, et réapparaître plus loin à leurs côtés, un jeu incessant entre la musique et la danse comme Bob Fosse l’a toujours fait. L’intensité des chorégraphies monte au travers des acrobaties masculines de From the Edge et Percussion IV (Dancin’, 1978) pour arriver au premier highlight de la soirée situé au cœur de la première partie. Big Spender (Sweet Charity, version filmique 1966) est un éclat de couleurs mélangeant le sexy et l’humour, une rangée de femmes accoudées, fumant, jouant sur les accents musicaux avec leurs mains et leurs pieds, Bob Fosse dans toute sa splendeur. S’en suivent des morceaux dérivés de l’œuvre du chorégraphe en hommage à sa carrière ou créés spécialement pour le show par Ann Reinking afin de clore cette première partie sur l’une de ses chorégraphies les plus anciennes et les plus inventives, Steam Heat (The Pajama Game 1954), un trio dansé sur des bruits de machine à vapeur.

I GOTCHA

Bob Fosse – Le Show a attrapé le spectateur sur son siège et n’est pas près de le lâcher. Une ouverture de seconde partie explosive et sensuelle sur le célèbre I Gotcha (show TV Liza with a Z, 1972, dont la musique sera reprise dans une version coup de poing sur la bande originale de Reservoir Dogs) pour enchaîner sur les trois morceaux les plus attendus du public français qui, la plupart du temps, ne connaît de Fosse que son travail cinématographique. Mein Herr identique à la version Liza Minelli du film Cabaret (1972). Sally Bowles et ses six danseuses sur leurs chaises en chapeau melon et petits voilages. Take Off with us, créée pour le film Que le spectacle commence, comme une incursion dans le milieu de la danse contemporaine dont la chorégraphie prend une autre ampleur sur scène, permettant de voir la structure dans sa globalité. Une séquence de génie qui envole le public. Enfin Razzle Dazzle (Chicago, 1975), un trio en noir et plumes roses avec Ben Vereen dans le rôle de Billy Flynn. Le Show se termine sur Benny Goodman’s Sing sing sing (Dancin’, 1978) en un bouquet final de musique et paillettes. L’orchestre sur scène diffuse un jazz endiablé de cuivres et percussions accompagnant des traversées acrobatiques parfaitement maîtrisées par les danseurs. Une explosion des sens. Les seuls regrets pourraient être la trop courte durée du show et une maigre sélection de Chicago. Pour en voir plus sur scène, rendez-vous sur Broadway ou à l’Adelphi Theatre de Londres.

par Julie Anterrieu

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