The Ward
États-Unis, 2010
De John Carpenter
Scénario : Michael Rasmussen, Shawn Rasmussen
Avec : Amber Heard
Photo : Yaron Orbach
Musique : Mark Kilian
Durée : 1h28
Un asile pour jeunes femmes est frappé par les apparitions meurtrières du fantôme d'une ex internée.
L'HOMME QUI N'ÉTAIT PAS LA
Cruelle ironie: à l'heure où se succèdent en salles les remakes (généralement tristes) de ses chefs d'œuvre, John Carpenter n'aura pas droit à une sortie au cinéma en France pour son dernier long métrage, The Ward. Cela faisait dix ans que le retour de Carpenter était plus qu'attendu, espéré. Les retrouvailles sont à la fois un plaisir (l'apparition du John Carpenter's au générique de début fera frémir n'importe quel fan de The Thing, Fog ou Prince des ténèbres) et... une souffrance. Car on ne peut s'empêcher, en voyant The Ward, de penser que l'envie n'y est peut-être plus vraiment. Ni scénariste, ni auteur de la bande son, Carpenter semblait de toute façon en retrait sur ce projet. Ça se confirme au visionnage de ce nouveau long métrage.
Il y a deux films dans The Ward. Il y a d'abord celui de l'absence, celle de Carpenter. Oui, le scope est là, oui, certains motifs de ses terreurs, de prison en paranoïa, sont également au programme. Mais, globalement, pour un cinéaste dont on n'attend que le meilleur (le sympathique Ghosts of Mars avait été chahuté alors qu'il est loin de s'agir de son pire film), c'est là bien peu de choses. The Ward souffre d'un manque de personnalité, la faute en partie au scénario pondu par Michael & Shawn Rasmussen, petit bras, lancé sur l'autoroute du déjà-vu. Mais la faute aussi à un emballage un peu timoré. On a déjà vu Carpenter, sur des projets très modestes (comme le téléfilm Meurtre au 43eme étage), s'en tirer avec un certain panache, avec, surtout, l'argument de l'œuvre de jeunesse comme circonstance atténuante. The Ward se complait ici ou là dans ses automatismes, à l'image de vilains jump-scares indignes de l'idée du cinéma d'horreur portée par l'œuvre entière du cinéaste. Il y a pourtant un autre film derrière tout ça. Celui servi par l'élégance classique de sa mise en scène, dénuée, hormis les jump-scares précités, d'effets vulgaires - voir le dernier Carpenter n'est pas voir le dernier Argento ou autre terne téléfilm. Une direction d'acteur efficace également: Amber Heard, déjà magnétique dans le superbe All the Boys Love Mandy Lane, fait une femme de tête charismatique, l'actrice se dépatouillant avec un talent évident d'un rôle pas très bien écrit. A l'image de son dénouement, ce The Ward-là est ludique et inconséquent. Film bière-pizza. Il y a certainement plus infamant, il y a plus excitant aussi.
Le même jour, en compétition au PIFFF, était présenté le somptueux The Innkeepers de Ti West, déjà repéré avec House of the Devil. Sortie prévue en vidéo en fin d'année aux États-Unis. Probablement la même chose chez nous. Cette nouvelle-là, au sujet d'un jeune cinéaste qui, avec ses deux derniers films, se situe aux avant-postes du genre, est peut-être plus triste encore que l'absence, regrettable certes, du dernier Carpenter en salles.