A la merveille
To the Wonder
États-Unis, 2012
De Terrence Malick
Scénario : Terrence Malick
Avec : Ben Affleck, Rachel McAdams
Sortie : 06/03/2013
Lothario, un coureur de jupons, se sentant désœuvré, voyage à Paris, où il entame une liaison avec une Européenne. Il revient ensuite en Oklahoma et épouse sa conquête (en partie pour des questions de visa). Quand leur relation commence à battre de l'aile, il renoue une idylle avec une jeune fille du coin, avec laquelle il a eu une longue histoire.
VERTIGES DE L'AMOUR
"Qui a allumé cette flamme en nous ?" s'interrogeait l'un des personnages de La Ligne rouge, il y a 15 ans. La question se pose toujours dans A la Merveille, le nouveau film de Terrence Malick. Sa caméra dans les airs filme le ciel comme on regarderait le plafond d'une église. Raconte des hommes en révolte contre dieu. En révolte aussi parce que les humains chez Malick savent que le paradis est perdu, cet éden éternellement corrompu que le réalisateur met en scène comme personne. Les vertiges de l'amour la tête à la renverse, puis l'amertume et la mélancolie. A la merveille emprunte et radicalise la narration abstraite et poétique de The Tree of Life, ses plans courts, cette façon anti-conventionnelle de raconter une histoire, ce courant de conscience. Parfois, les acteurs n'y sont qu'une silhouette (Ben Affleck, omniprésent mais muet) ou une apparition (fulgurante, celle de Rachel McAdams). Et pour creuser au plus profond du mystère humain, Malick expérimente, et accouche d'un poème qui ne ressemble à rien de connu si ce n'est à son cinéma.
"Tu dois voler voler voler" dit-on à l'héroïne (Olga Kurylenko) pour l'encourager, elle qui s'est enterrée dans un endroit trop petit et qui du temps de ses amours pouvait paraître immense. L'amour et la foi vacillent dans A la merveille tandis que Malick passe son temps à essayer de capturer quelques miracles par ses images. Une création miraculeuse (le Mont Saint Michel, la "merveille" du titre, que l'on visite et qui semble se dérober sous les pieds du couple), ou quelques visions plus triviales: une fête foraine à l'heure magique (et son manège qui chavire dans le ciel) ou un coucher de soleil sur des bisons. Il y a comme toujours cette sensibilité dans l'œil de Malick, poète immense qui parvient à rendre émouvants un lit défait ou une fenêtre ouverte. Tout est transcendé par ce lyrisme rayonnant. "Un mari doit aimer son épouse comme Jésus aime l'église". Le récit pourrait être prêchi-prêcha mais ce n'est pas ce qui intéresse Malick. Plutôt la hauteur des sentiments humains, leur ivresse, ces personnages qui un instant ne touchent plus terre, et l'instant suivant s'enfoncent dans une nuit d'Hopper, solitaire et désenchantée.