Soul of a Man (The)
The Soul of a Man
États-Unis, 2003
De Wim Wenders
Scénario : Wim Wenders
Avec : Laurence Fishburne, Skip James, J.B. Lenoir
Durée : 1h43
Sortie : 14/01/2004
Voué au blues, Wim Wenders explore ici les personnalités de quelques grands noms de la musique noire américaine du 20e siècle. Il retrace leur histoire à travers le parcours, les sons et le contexte historique d'une Amérique agitée par ses démons.
DEVIL GOT MY WOMAN
Après avoir éveillé le globe à la musique latino via Buena Vista Social Club, le réalisateur Wim Wenders rend son hommage au blues. Initié par Martin Scorsese et Paul G. Allen – co-fondateur de Microsoft et autorité en musique - The Soul of a Man est le premier film d'une collection de sept documentaires consacrés à cette musique issue des campagnes noires du deep south américain. Série à laquelle ont contribué des noms tels que Clint Eastwood, Marc Levin, Mike Figgis ou Antoine Fuqua. Après l'épisode Motown: la véritable histoire, le cinéma célèbre de nouveaux génies musicaux qui ont façonné le paysage musical actuel, du rock au hip-hop. Injustement oubliés, victimes de promoteurs peu scrupuleux, ces hommes furent spoliés et ne connurent qu'une gloire tardive voire posthume. Wim Wenders s'attarde sur trois bluesmen qui ont imprégné sa propre culture musicale: le pieu et aveugle Blind Willie Johnson, l'auteur du mythique Devil got my Woman, Skip James, et J.B. Lenoir, bluesman excentrique et engagé. Tous trois deviennent les enjeux d'une triste histoire racontée par un Blind Willie Johnson interprété en voix-off par Laurence Fishburne, au timbre sourd et chaud.
HAIL TO THE B.B. KING
Avec des séquences reconstituées, Wim Wenders présente ces musiciens à travers des anecdotes puissamment documentées. La reconstitution pousse le vice jusqu'à trafiquer l'image et le son pour lui donner l'aspect d'un film muet d'époque. Le réalisateur réutilise par la suite pour J.B. Lenoir les séquences d'un documentaire tourné dans les années 60 pour la télévision suédoise, qui ne fut jamais diffusé, devenant l'occasion de retrouver les malheureux auteurs de ce film. Vieillis et mutilés par le temps, ils évoquent à travers les rares interviews de Soul of a Man le souvenir de celui qui était devenu leur ami. Nostalgiques, détachés et respectueux, ils se remémorent l'homme et l'artiste qu'il fut sans pouvoir connaître la réhabilitation tardive d'un Skip James, adulé par Eric Clapton. Bien entendu la musique occupe une place prépondérante et outre l'utilisation des enregistrements originaux – grinçants et crachotants – des trois lascars, on retrouve des artistes fervents – Lou Reed, Eagle Eye Cherry, Beck ou Nick Cave – reprenant les standards de ce blues vital et essentiel. Plutôt axé sur l'immatériel, voire même le spirituel, ce documentaire n'oublie pas la dure réalité sociale des Etats-Unis à l'époque du combat des droits civiques. C'est ainsi que sont évoqués les spectres du racisme et de la guerre, qui n'ont de cesse de trouver sur leur chemin le blues et son insatiable capacité à abattre les barrières de l'intolérance.