Restless

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Restless
États-Unis, 2010
De Gus Van Sant
Scénario : Jason Lew
Avec : Henry Hopper, Mia Wasikowska
Photo : Harris Savides
Musique : Danny Elfman
Sortie : 21/09/2011
Note FilmDeCulte : *****-
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Bien qu’en phase terminale d’un cancer, la jeune et jolie Annabel Cotton est animée d’un amour profond de la vie et de la nature. De son côté, Enoch Brae a cessé d’avoir envie de faire partie du monde depuis que ses parents sont tragiquement morts dans un accident. Lorsque ces deux êtres à part se rencontrent à un enterrement, ils se découvrent d’étonnants points communs. Pour Enoch, dont le meilleur ami se trouve être le fantôme d’un pilote de guerre kamikaze, et Annabel, qui voue une fascination à Charles Darwin et à la vie de toute créature, c’est le début d’une relation exceptionnelle. En apprenant la mort imminente d’Annabel, Enoch propose de l’aider à vivre ses derniers jours avec intensité, au point de défier le destin, les traditions et la mort elle-même.

S'EN FOUT LA MORT

L'annonce de ce Restless sur le planning de Gus Van Sant, après sa monumentale tétralogie de la mort (formée par Gerry, Elephant, Last Days et Paranoid Park) et Harvey Milk, projet qu'il porte en lui depuis des années, avait toute les apparences de la respiration, d'une parenthèse mineure. Une commande confiée par Bryce Dallas Howard, productrice du film, la présence du film à Un Certain Regard plutôt qu'en compétition à Cannes (même si au final le niveau de la sélection Un Certain Regard était exceptionnel), ou ce commentaire, cannois encore, de Thierry Frémaux: "le film de Gus van Sant, Restless, c’est comme un grand auteur qui après des romans de 800 pages, écrit une longue nouvelle de 150 pages". Pourtant, Restless, peut-être moins ambitieux que certains des précédents films du cinéaste, est certainement la meilleure preuve de sa grandeur. Car du canevas de comédie romantique le plus classique, même voilé d'un linceul morbide, Gus Van Sant tire le meilleur, une grâce absolue qui jaillit du cadre conventionnel rencontre/amour/dispute/retrouvailles et il suffit de se poser une seconde la question de ce qu'en aurait fait un autre cinéaste pour évaluer l'immense réussite du réalisateur. On peut d'ailleurs dire la même chose de ses comédiens. La douceur lunaire de Henry Hopper, nouveau venu et fils de Dennis, et la finesse de Mia Wasikowska participent beaucoup à l'imprévisible réussite du film, parce qu'on n'attend pas ce couple là, ni leurs interprétations. Surtout celle de Wasikowska, graine d'immense actrice dans un rôle qui fait clignoter tous les warnings de la lourdeur (une jeune fille en phase terminale d'un cancer) et appelait tous les tics attrape-Oscar. Mia Wasikowska est juste mille lieues au-dessus de ça.

La mort est un des motifs obsessionnels de l'œuvre de Van Sant, la mort et aussi le chemin qui mène à elle, marche sans fin de Gerry, labyrinthes oniriques d'Elephant, chemin de croix de Last Days. La mort est accueillie différemment dans Restless, on s'invite d'ailleurs volontiers aux enterrements comme à une fascinante représentation, regard apaisé face au précipice. Autre figure mouvante dans ce Restless: le personnage féminin. Les femmes, jusqu'ici, étaient plutôt mal servies dans l'œuvre de Van Sant. Dans l'ouvrage qu'ils ont co-écrit sur le cinéaste, Stéphane Bouquet et Jean-Marc Lalanne séparent les personnages féminins en deux camps: la "poupée robotique" (l'immense salope merveilleusement interprétée par Kidman dans Prête à tout, les pom-pom girls de Elephant) et la "marginale ou marginalisée" (Michelle dans Elephant, l'amie du héros dans Paranoid Park). Le rapport à l'autre est dédramatisé dans Restless, Annabel (Wasikowska) est un personnage fort qui ne s'exprime pas contre. C'est de ces glissements que naît l'harmonie du film, sa beauté et sa hauteur dans l'automne de Portland, cette histoire d'oiseau qui chante d'être encore vivant, traitée avec une intelligence qui vaut de l'or. A voir ce Restless qui émeut aux larmes, on se dit que derrière tant d'humanité il ne peut y avoir que des gens bien.

par Nicolas Bardot

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