Règne du feu (Le)

Règne du feu (Le)
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Règne du feu (Le)
Reign of fire
États-Unis, 2002
De Rob Bowman
Scénario : Gregg Chabot, Kevin Peterka
Avec : Christian Bale, Gerard Butler, Alice Krige, Matthew McConaughey, Scott Moutter, Izabella Scorupco
Durée : 1h45
Sortie : 21/08/2002
Note FilmDeCulte : *****-

De nos jours, le jeune Quinn découvre dans un chantier sous-terrain un dragon, dont le réveil causera la perte de sa mère. 20 ans plus tard, le monde entier est encore sous la domination des créatures, qui se sont multipliées. Réfugiés dans les alentours de Londres, des rescapés menés par Quinn tentent de survivre. Ils font alors la connaissance de Denton Van Zan, chasseur de dragons, et de son armée de Marines...

À l'image des créatures légendaires qui peuplent le film, Le Règne du feu est le témoin d'un genre éteint. On ne voit plus de films comme celui-là et son statut de rareté devient ainsi l'une de ses principales qualités. Se situant au croisement de la fantasy et du film post-apocalyptique, Le Règne du feu, de Rob Bowman (The X Files, le film), constitue l'unique véritable outsider du panorama estival 2002. Son budget n'atteint pas les sommes mirobolantes de L'Attaque des Clones, de Minority Report ou de Men In Black 2. Il coûte la moitié d'un Spider-Man et chaque dollar est présent à l'écran. Le film se démarque alors de la production habituelle, mais cette différence ne se situe pas seulement au niveau des moyens. La prouesse de l'équipe du film est certainement d'avoir réussi à user de tout l'argent dont elle disposait afin de représenter un univers de façon crédible. Les ruines employées comme lieu central de l'action ne suggèrent pas un manque de moyens. On entendra peut-être certaines personnes se plaindre de ne pas avoir droit à une destruction massive des capitales mondiales, mais ce serait se tromper sur les intentions du film.

Il ne s'agit pas ici de réitérer les exploits de Godzilla. Roland Emmerich choisissait de montrer son gros monstre en train de détruire les plus célèbres immeubles de New York, substituant du spectacle pur sans émotion à l'absence d'intensité dramatique. Dans le cas présent, lorsque l'on voit un immense dragon transformer un château délabré en un gigantesque brasier, l'effet s'apparente à une véritable vision apocalyptique. Le Règne du feu n'est pas un film comme les autres, on l'a dit. Il ne peut donc être comparé aux quelques films catastrophes ou films de monstres récents tels que Independance Day ou Jurassic Park 3. Le Règne du feu est un divertissement à part. Que ce soit dans la structure même du récit ou dans les détails qui le composent, le film ne ressemble pas aux produits hollywoodiens banals auxquels on a droit chaque année. Pas de Jar-Jar, ni même un quelconque "sidekick" comique qui vient alourdir le film de blagues douteuses ou de répliques humoristiques déplacées. Le film est placé sous le signe du pessimisme. Nous sommes en 2020, dans un monde de cendres, quasi-monochromatique, où les rares pointes de couleurs sont celles de denrées disparues telles que les fruits et légumes. Cet univers, clairement inspiré des jeux de rôles, constitue cette caractéristique unique, rare, évoquée plus haut. Dès le début, nous y sommes plongés et pas un instant nous ne douterons de sa véracité.

Située de nos jours, l'introduction se déroule selon un bref crescendo et s'ensuit alors une rapide exposition des faits. N'étant ni grossièrement expédiée, ni bêtement didactique, cette scène explicative se charge d'informer le spectateur d'une façon très habile. Mêlant images d'archives réelles (comme les champignons de fumée créés par des explosions nucléaires) et faux articles de journaux (illustrés par une photographie de l'Empire State Building brûlant et entouré de dragons), ce rapide montage agrémenté d'une voix off est un des "mensonges" les plus convaincants jamais vus. Evidemment purement fictionnel, il confère cependant au film et à l'univers représenté un réalisme qui ne permettra jamais au public de remettre en cause ce qu'il voit. Parvenir à faire croire au spectateur blasé d'aujourd'hui à un tel film, qui plus est dénué de tout second degré, est un exploit remarquable. Le pitch original résumait bien à quel point la tâche n'était pas aisée: "Mad Max avec des dragons".

Néanmoins, tout est là pour nous offrir un vrai film épique, riche d'idées concernant chaque aspect de l'histoire, que ce soit les personnages ou l'univers. Les effets spéciaux et visuels sont au point. Ils sont magiques, car ils ramènent les dragons à la vie. On ne peut que féliciter Bowman, réalisateur qui n'a pas l'autorité des plus grands, de ne pas avoir cédé aux règles hollywoodiennes qui auraient certainement coulé le film dans le moule des conventions. Il signe une réalisation à part qui n'est peut-être pas personnelle mais qui au moins n'est pas identique à mille autres. Les acteurs habitent leurs personnages: Christian Bale est l'incarnation même du leader de la communauté, le père de tous les enfants, et Matthew McConaughey incarne l'essence du chasseur, avec ses yeux remplis de folie. Le Règne du feu ne restera peut-être pas dans toutes les mémoires, il n'en constitue pas moins une œuvre rare.

par Robert Hospyan

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