Nuit nous appartient (La)

Nuit nous appartient (La)
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film
Nuit nous appartient (La)
We Own the Night
États-Unis, 2006
De James Gray
Scénario : James Gray
Avec : Robert Duvall, Eva Mendes, Joaquin Phoenix, Mark Wahlberg
Durée : 1h45
Sortie : 28/11/2007
Note FilmDeCulte : *****-
  • Nuit nous appartient (La)
  • Nuit nous appartient (La)
  • Nuit nous appartient (La)
  • Nuit nous appartient (La)
  • Nuit nous appartient (La)

FESTIVAL DE CANNES 2007 -New York, fin des années 80. Bobby est le jeune patron d’une boîte de nuit branchée appartenant aux Russes. Avec l’explosion du trafic de drogue, la mafia russe étend son influence sur le monde de la nuit. Pour continuer son ascension, Bobby doit cacher ses liens avec sa famille. Seule sa petite amie, Amanda est au courant: son frère, Joseph, et son père, Burt, sont des membres éminents de la police new-yorkaise…

FANTOMES CONTRE FANTOMES

Premier plan. Sur le célèbre Heart of Glass chantée par Deborah Harry du groupe Blondie, Joaquin Phoenix (Bobby) caresse langoureusement Eva Mendes (Amanda) alors que dans la pièce adjacente leurs amis font la fête. Sexe, drogue et rock’n roll… Quelques séquences plus tard, Bobby assiste avec sa dulcinée à une soirée de la police de New York, sous les regards quelque peu réprobateurs des membres sa famille. En quelques minutes, James Gray établit ainsi le portrait psychologique de son héros et de l’environnement dans lequel il vit. Fils et frère de policier, il a choisi le monde de la nuit. Papillon trop attiré par les spotlights, l’alcool et les femmes, il fréquente la mafia russe et accepte les petites compromissions que son business implique… Comme Little Odessa et The Yards, La Nuit nous appartient, formidable troisième film de James Gray, est avant tout l’histoire d’une impossible rédemption personnelle et des sacrifices qu’une prise de conscience implique. Deux thèmes qui hantent véritablement le film pour lui conférer l’ampleur d’une tragédie grecque.

NOIR C'EST NOIR

D’aucuns ont reproché au long métrage son trop grand classicisme et son aspect programmatique. James Gray n’a jamais prétendu révolutionner le cinéma, bien au contraire. Son style s’apparente à celui d’un grand maître du passé, avec un refus du spectaculaire pour le spectaculaire. Si le film comporte quelques morceaux de bravoure, magistralement troussés, comme la poursuite sous la pluie, le deal de drogue et l’impressionnante séquence finale, ils s’inscrivent tous dans la logique interne du récit. Peintre à ses heures perdues, le cinéaste brosse par petites touches les différentes personnalités. Chaque regard, chaque parole, chaque coup de feu ont une influence sur le monde qui les entoure et une résonance particulière à l’écran. Au contraire d’un Alain Corneau dans Le Deuxième Souffle, qui remake le cinéma de Jean-Pierre Melville en singeant les tics du modernisme actuel, James Gray reste fidèle à la nervosité du cinéma américain des années 70 qu’il chérit tant. La poursuite sous la pluie déjà évoquée, par son intensité, pulvérise ainsi tous les efforts numériques des blockbusters. L'enfant de la Big Apple donne là une grande leçon de cinéma d'action, par son utilisation de l’espace, du montage et du son. Sa mise en scène virtuose renvoie bien sûr aux longs métrages de Martin Scorsese (Mean Streets), Sidney Lumet (Serpico) ou William Friedkin (French Connection), mais La Nuit nous appartient ne sombre jamais dans l’hommage, grâce à la qualité d’un scénario implacable.

LE PARRAIN IV

En interview, le trop rare James Gray a toujours scandé son ambition de mettre en scène un opéra filmique, dans la lignée du Parrain de Francis Ford Coppola. Si son nouveau long métrage n’a pas la même dimension mythologique, il parvient, par séquences, à égaler la fulgurance de la trilogie de Coppola. Thématiquement, le film est proche du premier Parrain, mais centré sur une famille de la police de New York à la morale chevillée au corps. Comme dans Le Parrain, le fils honni, pris dans un engrenage sans possibilité de retour, devra prendre ses responsabilités et assumer son statut de nouveau chef de clan. La présence du génial Robert Duvall au générique des deux films ne doit bien sûr rien au hasard, La Nuit nous appartient assumant totalement sa filiation. Enfin, si ce film d’une noirceur absolue reste aussi longtemps en bouche, comme un grand cru de Bordeaux ou de Bourgogne que l’on aurait laissé en cave depuis les années 70, c’est aussi grâce à une époustouflante direction d’acteur. Certes, Joaquin Phoenix nous avait déjà habitués aux compositions fiévreuses, mais Mark Wahlberg trouve ici son meilleur rôle depuis… The Yards. Quant à la belle Eva Mendes, habituée au rôle de bimbos, elle irradie ici la pellicule et parvient à donner de la profondeur à son personnage de femme amoureuse. Un très grand film assurément, donc, qui aurait mérité une récompense lors du dernier Festival de Cannes.

par Yannick Vély

En savoir plus

Quelques liens :

Partenaires