Hors compétition: Money Monster

Hors compétition: Money Monster
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Money Monster
États-Unis, 2016
De Jodie Foster
Avec : George Clooney, Julia Roberts
Sortie : 12/05/2016
Note FilmDeCulte : *-----
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Dans ce thriller mené en temps réel, Lee Gates, animateur d’une émission financière, et sa productrice Patty se retrouvent pris en otage dans leur studio de télévision par un spectateur furieux d’avoir tout perdu après avoir suivi les conseils d’investissement de Lee. Sous les yeux de millions de téléspectateurs, en direct, Lee et Patty vont lutter contre la montre et tenter d’élucider l’énigmatique conspiration qui semble se cacher au cœur des marchés mondiaux…

DES MONSTRES GENTILS, OUI C'EST UN PARADIS

Jodie Foster est une actrice exceptionnelle et il est évidemment lamentable qu'Hollywood lui tourne le dos comme à de nombreuses actrices de plus de 34 ans. Mais il serait tout aussi injuste de notre part d'attendre de Foster-réalisatrice des films exceptionnels parce qu'elle est une grande actrice. Ce qu'on pouvait attendre, par contre, c'était une voix, un regard et une personnalité. Après des premiers essais dans les années 90 qu'on doit avouer avoir un peu oubliés, Jodie Foster disposait avec Le Complexe du castor d'un sujet en or, avec son héros lessivé qui décide de ne plus communiquer qu'à travers une marionnette de castor. Le résultat était doublement déprimant : d'abord parce que le film n'était pas à la hauteur, ensuite parce qu'il était désespérément lisse et plat. Il faut du talent pour se sortir d'un tel sujet sans être ridicule, mais il paraît encore plus surprenant d'arriver à en faire un film aussi anodin, à regarder distraitement à la télé ou lors d'un long vol en avion.

Avec Money Monster, Jodie Foster allait-elle faire preuve de personnalité ? Les ingrédients n'étaient pas évidents avec ce type de Clooney movie comme on en a vu bon nombre dans les années 2000: ces films politiques Canada Dry qui lorgnent vers les grandes réussites des 70s, des productions que la critique (principalement américaine) a fait semblant de trouver formidables jusqu'à leur rapide date de péremption (généralement, au lendemain de la cérémonie des Oscars) - des Goodnight and Good Luck, des Syriana, des The American jusqu'aux flops tels que Les Marches du pouvoir. Le sujet de l'argent fou (ou monstre) dans Money Monster a un écho tout à fait actuel, et George Clooney campe un gourou télévisuel excité qui semble bel et bien vivre dans la même réalité qu'un Donald Trump. En direct, il va être pris en otage par un homme de la rue qui par sa faute a tout perdu. Sujet bouillant ? Rassurez-vous, personne ne s'y brûlera.

Le personnage incarné par Julia Roberts n'a pas peur de l'affirmer: "on ne fait pas de journalisme du tout". Dans ce show télé, on se soucie avant tout de savoir si le pigeon utilisé lors d'un gag sera vrai, et on cherche dans des vieux films d'horreur avec Joan Crawford des vignettes-choc pour pimenter le spectacle. Foster, très tendre, ne fait pas grand chose de ce spectacle monstrueux. Et ne fait pas grand chose de quoi que ce soit - en général. Money Monster est un thriller sans une seule ombre de tension - il fallait le faire avec un tel pitch. Mais le médiocre scénario semble davantage préoccupé par l'idée de dispenser des dialogues de petits malins qui sonnent comme autant d'artifices. Même avec une bombe autour du coup, George Clooney ne pourra pas se retenir de faire ses oeillades de lover à maman. La prise d'otage, dans le film, est vue par le public de l'émission (dans des pubs, à la maison) une bière à la main, tranquillou. Tout le monde semble être au courant qu'il s'agit d'une comédie, comme si ladite bombe (censée souffler un immeuble) était un joujou. Voilà ici une petite comédie totalement inconséquente dont le postulat n'est absolument jamais crédible ou pris au sérieux. Plus triste : plus le scénario se fout de la gueule du public (le vrai, dans la salle), plus le public rit. On n'a presque pas besoin de préciser qu'avec une telle qualité d'écriture, nous avons ici affaire à ce type de film dont le mystère final se résout en 3 clics sur Google.

On parlait plus haut du modèle des films politiques des 70s. Là encore, on ne demande pas à Money Monster d'être Network. Mais le fossé est grand entre ces classiques qui ne sont pas lisses, dont les héros peuvent être ambigus et ces films contemporains qui se sentent obligés d'être séduisants - la petite blague où il faut, des personnages qu'il faut à tout prix rendre aimables... à part le grand méchant, qui est véritablement méchant, dans un monde où l'on dresse un cordon de sécurité rouge entre les gentils et les méchants. Cette infantilisation du public est l'échec de ce type de films tièdes qui constitue une bonne partie du médiocre cinéma américain mainstream dont l'audience s'est détournée vers la télévision. Et lorsque Money Monster essaie de mordre, c'est avec d'inoffensives dents de lait.

par Nicolas Bardot

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