Ligue des gentlemen extraordinaires (La)

Ligue des gentlemen extraordinaires (La)
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Ligue des gentlemen extraordinaires (La)
The League of Extraordinary Gentlemen
États-Unis, 2003
De Stephen Norrington
Scénario : Kevin O'Neill
Avec : Sean Connery, Naseeruddin Shah, Stuart Townsend, Shane West
Durée : 1h50
Sortie : 01/10/2003
Note FilmDeCulte : ***---

Le XIXème siècle touche à sa fin et avec lui se meure l'âme de l'ancien monde, écrasé par l'implacable ère industrielle. Au tournant de l'histoire, de grands périls sont tapis dans l'ombre et un mystérieux bandit nommé le Fantom ourdit quelques machiavéliques complots. Au nom de la reine, le mythique Alan Quatermain sort de sa retraite, chargé de recruter une équipe de gentlemen aux talents réellement extraordinaires, afin d'enrayer les plans du coquin.

DES GENTLEMEN BIEN ORDINAIRES

Embarrassant cas de figure pour le critique, La Ligue des Gentlemen Extraordinaires fait partie de ces films qui souffrent d'une dichotomie gênante entre choses d'excellentes factures et d'autres beaucoup moins intéressantes. Basé sur une œuvre récente et déjà culte d'Alan Moore (qui fut déjà adapté via le raté mais curieux From Hell, spéculant sur l'identité de Jack l'éventreur), toute la force du film réside dans une puissante identité visuelle (parfois gâchée par l'insuffisant budget alloué au département effets spéciaux). L'histoire raconte les aventures de personnages hors du commun tirés de la littérature d'aventure de la fin du XIXème siècle. Ainsi, nous retrouvons Sean Connery en Alan Quatermain ou Stuart Townsend en Dorian Gray. D'autres protagonistes répondent à l'appel, tels qu'un Dr Jeckyll mal accompagné, un Tom Sawyer loin de l'Amérique et des bords du Mississippi, ou une Mina Harker vampirique, rescapée de ses affaires draculéennes. A priori, adapter le roman graphique de Moore pouvait relever de la gageure. Œuvre particulièrement sombre et adulte, mêlant mythologie moderne et audaces visuelles, le récit se distingue par un romantisme amer, une violence outrée et un lyrisme propre à l'Angleterre victorienne. A posteriori, le pari semble gagné, du moins en partie.

DOUCE TRAHISON

Si une édulcoration du récit était inévitable, on justifiera plus difficilement les extrapolations et les rajouts que le scénariste a semés dans le terreau d'origine. De l'ajout douteux de personnages à la modification du rôle et de la psyché de certains autres, les trahisons ne manquent pas. Mina Harker ou le capitaine Nemo deviennent de pâles figures réduites à la simple fonction de leur originalité. La femme n'est plus qu'une créature de la nuit et se voit destituée de son rôle de leader de la Ligue au profit de Quatermain, alors que le trouble indien Nemo perd son imposante carrure, son mystère et sa cruauté. Il est aussi difficile de pardonner l'ajout impromptu d'un Tom Sawyer totalement inutile, ne servant qu'à fédérer un public américain supposé rétif aux charmes de la vieille Europe. Sans oublier Dorian Gray, absent de l'œuvre de Moore, mais dont le charme, la stature et les talents apportent une certaine classe supplémentaire. Cependant l'échec majeur du film se situe dans la structure même de la narration. Les péripéties, pour être excitantes, n'en demeurent pas moins convenues et mal amenées. Le film passe de rebondissements en déconvenues sans prendre le temps de soigner les transitions, transformant le cachet bis de l'aventure en fouillis dramatique. Les rares thèmes sont réduits à l'état d'ébauches malhabiles et caricaturales (particulièrement dans la relation père/fils spirituel, vue et revue entre Quatermain et Tom Sawyer).

GOD SAVES THE QUEEN

Une fois passée la désagréable et brouillonne impression laissée par l'intrigue trop plate, La Ligue des Gentlemen Extraordinaire peut séduire grâce au soin particulier apporté au design d'inspiration Art Déco. Conséquence directe de la première révolution industrielle, les objets, les costumes et décors du film sont issus de l'heureux mariage du fer forgé et du bois. Mélange rustique d'ancien et de moderne, aspiration au futurisme, c'est l'esprit de H.G. Wells et de Jules Verne qui pulse dans ces veines. Alors, malgré son aspect épisodiquement cheap, le film devient la plus belle illustration des délires du dessinateur de l'œuvre, Kevin O'Neil. Et si, à l'instar d'X-Men 2, certains personnages sont sous traités, d'autres, dont le Dr Jeckyll (employant le numéro en vogue des miroirs schizophrènes), apportent au film la touche salvatrice de valeur ajoutée qui l'empêche définitivement de sombrer dans l'oubli. Si La Ligue ne sera pas celle des champions, elle a déjà remporté le match de l'été.

par Nicolas Plaire

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[…] Terme plus ou moins inventé par les journaux trop "prestigieux" pour désigner un comic book comme tel, le "roman graphique" est généralement l'appellation faisant référence à un ouvrage isolé, qui ne se situe pas dans la continuité hebdomadaire et épisodique d'une série, et/ou qui est plus adulte, plus mature que le cliché habituel selon lequel la bande dessinée n'est destinée qu'aux enfants. […]

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