Laurier Blanc
États-Unis, 2002
De Peter Kosminsky
Scénario : Mary Agnes Donoghue
Avec : Alison Lohman, Michelle Pfeiffer, Robin Wright
Durée : 1h49
Sortie : 12/11/2003
Astrid, 15 ans, est la fille d’Ingrid Magnussen, femme somptueuse et poétesse aux idéaux trempés dans l’acier. Lorsque celle-ci, dans un accès de rage, tue son amant, Astrid est confiée à une famille d’accueil. De foyer en foyer, il est difficile de se défaire de l’ombre de la géante.
MIGNONNE ALLONS VOIR SI LA ROSE
Ingrid, lointaine fille des Vikings, abandonne son brin de laurier blanc dans un verre de lait. Derrière sa beauté nue et son aveuglante pureté, sa plante distille pourtant un insoupçonné poison, aussi mortel que la plus sombre des ciguës. Ingrid vient du même jardin: femme superbe connaissant les choses de l’art, refusant toute compromission qui mettrait en péril la robe immaculée de ses idéaux, comme la médiocrité de l’entre-deux, il coule en ses veines une passion qui n’a que quelques lettres à tourner pour se transformer en poison. Notamment pour sa fille, Astrid, confrontée au plongeon dans le grand bain lorsque son étouffant et fascinant modèle de mère doit s’effacer de son foyer. Film sur l’art, ses vertus et ses démons, et sur les femmes, armées ou désarmées, aux archétypes révélant peu à peu leur complexité, Laurier Blanc parvient ainsi à garnir les atermoiements d’une orageuse relation mère-fille par une riche et pittoresque galerie de personnages féminins issus du magnifique roman éponyme de l’Américaine Janet Fitch.
CARNAL ART
Pour Ingrid, l’art est une force, pinceau, plume comme couteau au poing, aventurière d’un idéal qui disperse sa lumière céleste parmi les dangers. Ceux contre lesquels la carcasse de Claire se heurte violemment, ivre des étoiles promises qu’elle n’a pas su décrocher. Ceux qu’évite Starr, en quête de rédemption, et dont l’art est au service de la religion. Pour Astrid, l’art est un don, comme le sang de sa mère qui coule en elle, un joyau dont elle se pare et contre lequel elle se bat. Déchirure du cordon ombilical, la confrontation entre la mère et la fille devient le clash entre deux identités artistiques tranchées et voisines (voire unies dans la même chair) qui ne peuvent se rencontrer que dans l'affrontement. Pour les Magnussen, ces Vikings qui ont incendié la grande Rome, l’art est la manière de brûler la vie par les deux bouts. C’est sur ce feu sous-jacent que Peter Kosminsky pose son regard, emballant son film d’un voile blanc virginal et trompeur (comme les pétales de son laurier), et aidé par ses blondes et diaphanes comédiennes. Lohman, décidément prometteuse, Pfeiffer, charismatique en diable et rendant parfaitement l’ambiguïté de son personnage, Zellweger, particulièrement touchante ou Wright Penn, en roue libre, participent toutes à la beauté d’un portrait aux couleurs feutrées mais dont le pouls fait vibrer ses veines jusqu’à laisser les traces de ses rouges cicatrices sur la toile blanche, si blanche.