Harry Potter et les reliques de la mort - partie 1
Harry Potter and the Deathly Hallows - Part I
États-Unis, 2010
De David Yates
Scénario : Steve Kloves d'après d'après l'oeuvre de J.K. Rowling
Avec : Ralph Fiennes, Rupert Grint, Daniel Radcliffe, Alan Rickman, Emma Watson
Photo : Eduardo Serra
Musique : Alexandre Desplat
Durée : 2h24
Sortie : 24/11/2010
Le pouvoir de Voldemort s'étend. Celui-ci contrôle maintenant le Ministère de la Magie et Poudlard. Harry, Ron et Hermione décident de terminer le travail commencé par Dumbledore, et de retrouver les derniers Horcruxes pour vaincre le Seigneur des Ténèbres. Mais il reste bien peu d'espoir aux trois sorciers, qui doivent réussir à tout prix.
DEUX POUR LE PRIX D'UN
Entre la relative déception du précédent tome et le choix controversé d'adapter le dernier volume en deux films, il va sans dire que Harry Potter et les reliques de la mort était attendu avec méfiance. Les personnes ayant lu le dernier ouvrage de la saga littéraire connaissent les faiblesses du matériau de base. Même les fans les plus ardents sont lucides quant aux longueurs du livre. C'est donc sans grande surprise que ce premier de deux longs métrages s'avère plutôt inégal. La retranscription à l'écran gagne en approfondissement ce qu'elle perd en rythme. Quelque part, on pouvait s'en douter, c'était une mauvaise idée que de diviser l'adaptation de la sorte, parce que les événements de la première moitié du livre ne sont pas folichons. Du coup, les longs passages à vide chez Rowling - tout ce qui touche à la galère de nos héros dans les bois - sont retranscrits malheureusement très fidèlement et l'enquête donne alors l'impression de piétiner pendant 2h24. Finalement, malgré les frustrations de puristes n'ayant aucun sens des réalités en ce qui concerne les principes de l'adaptation d'un support vers un autre, on peut constater que porter les livres à l'écran sous forme de films et non d'une série télévisée n'était pas une mauvaise chose. Bien qu'ils n'aient jamais été parfaits dans leur transfert à l'écran, chaque long métrage de la franchise suffisait à condenser un bouquin, alternant l'action et l'enquête dans une structure épisodique, quitte à ce qu'elle soit un peu bancale. Ici, la construction l'est d'autant plus, même si elle autorise tout de même aux auteurs d’amplifier l’aspect humain de l’histoire.
DONNE-MOI LE TEMPS
Au cours d'une saison de série télévisée, généralement composée d'une vingtaine d'épisodes, il est nécessaire d'avoir de temps en temps ce qu'on appelle communément un épisode de "transition", où il se passe peu de choses et où l'on s'attarde sur les personnages. On creuse un peu l'univers, mais le gros de l'action arrivera dans un épisode ultérieur. Harry Potter et les reliques de la mort - 1ère partie s'apparente quelque peu un épisode de transition. Pour autant, le film n'est pas exempt de scènes puissantes. Loin de là. Le film apparaît justement déséquilibré parce qu'il alterne constamment ces moments forts avec des moments où le soufflé retombe. Yates continue donc d'être le réalisateur de certaines des meilleures séquences de la saga (comme l'émoi d'Harry en banlieue londonienne et le combat de mages dans Harry Potter et l'ordre du Phénix, ou bien le prologue muet et les souvenirs dans Harry Potter et le prince de sang-mêlé) mais des films les plus inégaux. Pour ce nouvel opus, on a droit à nouveau à de très belles séquences, comme les adieux durant l'introduction qui annonce la couleur, sombre et triste, de cette conclusion. Ou encore cette scène où l'on danse brièvement pour oublier la terreur. Comme à son habitude, le cinéaste compose également quelques morceaux de bravoure, à commencer par cette course-poursuite électrique au dernier plan ébouriffant, ou bien la scène assez effrayante et dérangeante du médaillon. Une fois n'est pas coutume, le film nous réserve même quelques surprises inattendues, telle que l'illustration du Conte des Trois Frères, sublime séquence qu'on croirait échappée d'un film de Guillermo del Toro.
POUDLARD BRÛLE-T-IL?
Bien qu'il embrasse la dimension fantastique de l'œuvre, Yates continue d'apporter une touche réaliste à ses adaptations. Pour ce doublé final, il est parti chercher Eduardo Serra, directeur de la photographie des films de Claude Chabrol, pour éclairer ce qui s'apparente davantage à un drame humain en temps de guerre qu'au dernier épisode d'une saga d'heroic fantasy. Les troubles du monde magique qui pénètrent définitivement le monde des moldus, ce mariage triste comme dernière lueur d'espoir, les messages radios des disparus, le cimetière... Par ailleurs, le film est presque dénué d'humour, on est plus vraiment dans du blockbuster d'adolescent, même s'il reste quelques embrouilles pubères (passant par un mauvais hommage, pour ne pas dire "pillage", du Seigneur des Anneaux). Le metteur en scène parvient même à rendre émouvant certains passages. Si la série a toujours su se faire touchante, elle devient de plus en plus poignante au fur et à mesure que l'on s'approche de la fin. Evidemment, Harry Potter et les reliques de la mort - 1ère partie est un épisode assez frustrant. Si l'on peut apprécier que la franchise cinématographique se permette enfin de s'attarder plus longuement sur les détails des chapitres littéraires, ce rythme plus posé et plus fidèle dessert également l'adaptation, qui aurait mérité de réduire le tome entier en un seul film absolument épique, quitte à s'autoriser la durée des trois heures. Une chose est sûre : la promesse d'un dénouement en apothéose, tant dans l’action que dans l’émotion, est bel et bien là.