Dirty Pretty Things

Dirty Pretty Things
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Dirty Pretty Things
, 2002
De Stephen Frears
Scénario : Steven Knight
Avec : Chiwetel Ejiofor, Sergi Lopez, Sophie Okonedo, Audrey Tautou
Durée : 1h47
Sortie : 03/09/2003
Note FilmDeCulte : ****--

Okwe, immigré illégal nigérien, travaille comme réceptionniste la nuit dans un hôtel londonien. Il partage un appartement avec Senay, une jeune Turque qui travaille dans le même hôtel. Tous deux rêvent de lendemains meilleurs, jusqu’à ce qu’une macabre découverte dans une chambre ne pousse Okwe à accélérer les choses…

HULLU YO

Au cœur de Londres, métropole anonyme, se trament des destins ballottés entre jolies fins et sales moyens. Sans noms parmi les sans noms, Okwe, Senay ou Juliette peuplent un hôtel où les visages inconnus se succèdent, où les corps se couchent un instant dans les draps blancs de refuges éphémères. Les piliers invisibles, ce sont eux, rouages d’une société secrète terrée dans le noir. Le jour n’y point jamais, les voyageurs sont invisibles et les organes quittent les enveloppes corporelles comme une marchandise sans étiquetage. Okwe le réceptionniste, Senay la femme de chambre, Juliette la prostituée ou encore Ivan, posté à l’entrée de l’Hôtel Baltic, font presque partie des meubles, et pour cause: immigrés illégaux, sans papiers valables, ils sont sans identité, comme les murs vierges de leur bâtisse désincarnée. Le paradoxe ici se niche dans les fluides: le ciment des cloisons a séché alors que le sang bat son plein dans les veines de ces personnages doublement refoulés dans un autre monde. Et Frears de teinter sa chronique réaliste en drame humain assez poignant.

PARTIR

Le metteur en scène anglais a souvent eu le coup d’œil, le doigté et la finesse pour créer des personnages aussi ordinaires qu’attachants, principalement dans la partie britannique de sa filmographie. Il est ici servi par une jolie gamme d’acteurs, quelques touches de peintures comme flammes de vie dans un paysage sombre. Le regard usé de Okwe (très bon Chiwetel Ejiofor), les poings serrés de Senay (touchante Audrey Tautou), ou la voix de Juliette (attachante Sophie Okonedo) donnent un cœur à l’errance désabusée dans un Londres quotidien où se passent de sales choses. Frears donne à voir l’autre face de Londres, celle qui nourrit ceux qui choisissent de l’ignorer et qui laisse pour compte ceux qui l’orchestrent, sans bruit, sous une cloche. Frears filme également l’instinct de survie, celui qui pousse vers l’horreur sans que celle-ci ne quitte le sillon du quotidien. Une contradiction parfaitement humaine à l’image d’un film chaotique où l’espoir peut fleurir dans de la cendre, où la renaissance peut éclore d’un purgatoire situé entre deux mondes. Dirty Pretty Things, sobre et humble, pose son regard généreux sur la furie en sourdine, et offre un bel écrin à d’anodines silhouettes, témoins muets aux cœurs à vif.

par Nicolas Bardot

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