Demain on déménage

Demain on déménage
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Demain on déménage
France, 2004
De Chantal Akerman
Scénario : Chantal Akerman, Eric de Kuyper
Avec : Lucas Belvaux, Aurore Clément, Jean-Pierre Marielle, Natacha Régnier, Sylvie Testud, Elsa Zylberstein
Durée : 1h50
Sortie : 03/03/2004
Note FilmDeCulte : ***---

Charlotte, trentenaire bobo compensant ses envies littéraires dans des livres érotiques de commande, vit, depuis la mort de son père, avec sa mère Catherine, expansive et épanouie, dans un duplex en constant foutoir. Les deux femmes s’envahissant mutuellement, elles espèrent retrouver un peu d’espace intime en déménageant…

LES PLUS OU MOINS CAPTIVANTES

Après sa trilogie documentaire (Sud, D’Est, De l’autre côté) quasi-expérimentale et, il faut bien dire, relativement soporifique, on n’attendait pas Chantal Akerman sur le terrain de la comédie rythmée, à gros casting et ambitions commerciales raisonnables. Pourtant, le retour à la fiction de l’héritière directe des cinéastes de la Nouvelle Vague, quatre ans après les ronflants amours proustiens de La Captive, se fait bel et bien sous le signe de la modernité et de la légèreté bobo façon Jeanne Labrune. Certes, ce serait méconnaître la dame que de ne voir, dans cette histoire burlesque de déménagement à cent à l’heure et ces lignes de dialogues tordus, qu’une passade joueuse dans sa filmographie. D’ailleurs, l’on sait trop bien ce qu’en sous-texte il faut aller chercher: terrible traumatisme de la déportation, souvenirs familiaux douloureux d’Europe centrale, collusion et collisions générationnelles... Toute cette chair thématique réside évidemment sous la peau ludique de Demain on déménage.

AGITÉ, PAS SECOUÉ

Pourtant, c’est surtout en surface que fonctionne le nouveau film d’Akerman. Les tentatives d’exploration du fond se soldent d’ailleurs bien souvent par un échec. Les réussites du film se font ainsi par paquet de séquences, comme autant de concepts de courts métrages compilés, méticuleusement empilés et remarquablement interprétés (sublime brochette d’actrices, Sylvie Testud, géniale, en tête). Là l’apparition diaphane d’une Elsa Zylberstein tentant de fuir un foyer étouffant, ici la valse foutraque des visiteurs inspectant sur une chorégraphie déréglée les moindres recoins du duplex, et là encore un aspirateur déposant plus de poussière qu’il n’en absorbe… Autant d’instants jolis et drôles, surnageant au sein d’une comédie trop longue parce qu’inégale, le cul entre la chaise du délire pur et assumé à la Ce Jour-là, et celle, matelassée, du sourire propret et sage d’un certain cinéma français fleurant la camomille. Un film agité, donc, beaucoup plus buvable que les dernières errances de la dame, mais pas encore suffisamment secoué à notre goût pour être tout à fait convaincant.

par Guillaume Massart

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