Deadpool & Wolverine

Deadpool & Wolverine
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Deadpool & Wolverine
États-Unis, 2024
De Shawn Levy
Scénario : Rhett Reese, Paul Wernick
Avec : Hugh Jackman, Ryan Reynolds
Photo : George Richmond
Musique : Rob Simonsen
Durée : 2h07
Sortie : 24/07/2024
Note FilmDeCulte : ****--
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Après avoir échoué à rejoindre l’équipe des Avengers, Wade Wilson passe d’un petit boulot à un autre sans vraiment trouver sa voie. Jusqu’au jour où un haut gradé du Tribunal des Variations Anachroniques lui propose une mission digne de lui… à condition de voir son monde et tous ceux qu’il aime être anéantis. Refusant catégoriquement, Wade endosse de nouveau le costume de Deadpool et tente de convaincre Wolverine de l’aider à sauver son univers…

LAST HURRAH FOR 20TH CENTURY

Il y a 20 ans, d'aucuns revendiquaient le terme "geek" pour le sortir du ghetto à l'heure où les studios se mettaient enfin à traiter correctement certaines licences mais face à l'état actuel du cinéma de divertissement hollywoodien, on se sent comme Oppenheimer à la fin du film éponyme. Qu'a-t-on fait? L'excitation ressentie jadis pour l'apparition de Nick Fury dans une scène post-générique d'Iron Man comme annonce d'un univers partagé à venir et le crescendo vers le premier crossover ont cédé la place à une blasance quasi-totale qui a fini par avoir raison de la fidélité même des spectateurs les plus clients. Pourtant, alors qu'il est tout autant mâtiné, si ce n'est plus, de références et de continuité, Deadpool & Wolverine surprend agréablement. Non pas parce que l'on dispose encore de quelques boutons sur lesquels il est possible d'appuyer pour provoquer une réaction pavlovienne mais parce que pour la première fois, les brisures du quatrième mur et le fan service ne sont pas là uniquement pour l'humour mais participent à forger un propos métatextuel improbablement touchant. Et le film de devenir ainsi un éloge funèbre de la 20th Century Fox à l'aune du rachat par Disney et un baroud d'honneur pour des super-héros destinés à être rebootés ou qui n'ont jamais pu voir le jour.

Le multivers et l'existence de la TVA (Time Variance Authority) qui le régule, présentée dans la série Loki, permettent une métaphore de ce qui se passe dans les coulisses : Deadpool est invité à rejoindre l'univers Marvel mais cela implique d'effacer son univers. Même si le héros du film ne savait pas qu'il était un personnage de fiction, l'intrigue est sans équivoque. C'est littéralement l'histoire d'univers pré-existants qui refusent de "go gentle into the night" pour citer le célèbre poème. Marvel avait déjà utilisé les mondes parallèles et les caméos dans Spider-Man : No Way Home (pour faire du sous-Spider-verse) et dans Doctor Strange : Multiverse of Madness (pour les lol maintenant qu'ils ont les droits) mais ici, l'exercice paraît moins être un étalage de synergie cynique - même si on pourra toujours y voir de l'exploitation de nostalgie, parfois pour des films nuls qui plus est - qu'une volonté sincère de donner une sorte de bouclage aux personnages qui furent les premiers de la vague.

Objectivement, l'écriture est un peu foutraque. Après un flash-forward amusant qui donne lieu à la scène d'action/générique de début et annonce la couleur de l'irrévérence (on n'a pas peur de marcher sur la tombe de Logan) et l'exposition suivie d'une séquence montage avalanche de clins d’œil, l'intrigue vire au simili-road movie pour la majeure partie du film, semblant aller de cameo en cameo de façon gratuite, mais chaque apparition sert en réalité le propos au même titre que ce décor - le "Void", une "décharge" pour personnages sans univers aperçue dans Loki et employée plus à-propos ici - et l'antagoniste - Cassandra Nova, jumelle maléfique de Xavier un peu sacrifiée ici alors qu'il aurait fallu approfondir le personnage pour la cohérence thématique sur l'abandon. En réalité, le film tient surtout sur l'alchimie entre Ryan Reynolds et Hugh Jackman, amis dans la vie depuis un X-Men Origins : Wolverine de triste mémoire qu'ils peuvent enfin exorciser ici, le griffu grincheux apportant l'équilibre salvateur au moulin à paroles à la fois pour l'humour, créant une dynamique de buddy movie plutôt efficace, mais également un ancrage émotionnel, bien là malgré sans doute deux ou trois blagues de cul en trop. Ce n'est pas le Logan que l'on connaît mais l'acteur est toujours un monstre de charisme et de gravitas. Et ils arrivent même à justifier le costume jaune au-delà du cadeau pour les nerds.

Shawn Levy a fait ses meilleurs films avec Jackman et Reynolds, ce qu'il confirme ici même si le réalisateur s'avère plus à l'aise dans le timing comique que dans l'action. Les morceaux de bravoure sont sympathiques, parce qu'il y a toujours une idée ou un gag, mais ne sont pas toujours bien découpés. Par exemple, l'introduction monte une scène de combat sur "Bye Bye" de N*Sync et ne joue pas vraiment sur la synchronisation à part lors de plans de coupe où Deadpool reprend la chorégraphie du clip, là où il aurait fallu lier les deux. D'ailleurs, la BO est trop prompte à balancer un tube pop en décalage sur les scènes d'action, la répétition désamorçant l'effet à force. Esthétiquement, le film est générique pour ne pas dire plat par moments (le Void n'aide pas), un peu fade et passe-partout. Et c'est vraiment dommage qu'un peu plus d'efforts n'ait pas été fait sur le visuel et sur l'écriture pour que l'ensemble paraisse moins paresseux parce que Deadpool & Wolverine est loin d'être désagréable et qu'il y a un cœur qui bat derrière la bite.

par Robert Hospyan

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