Angel
France, 2007
De Francois Ozon
Scénario : Martin Crimp, Francois Ozon
Avec : Michael Fassbender, Romola Garai, Sam Neill, Charlotte Rampling, Lucy Russell
Durée : 2h14
Sortie : 14/03/2007
En Angleterre, au début du XXe siècle, l’ascension fulgurante de la jeune Angel Deverell, écrivain prodige à qui tout sourit… jusqu’à présent.
LA VIE REVEE D’ANGEL
Sarah Morton, au bord de sa Swimming Pool azurée, méditait en polar, lecture estivale et un rien vulgaire où s’entrelaçaient dangereuse séduction, énigme dans le placard et fatal transfert. Angel Everett, écrivaine elle aussi, semble sans cesse hésiter entre "la vie vécue et la vie rêvée", glissement identique des réalités qui fait de son quotidien un embellissement permanent, de la récitation au collège faisant un palais d’une épicerie, aux morts embarrassantes maquillées en flamboyants trépas. Angel est d’abord raconté comme son héroïne conçoit la littérature: une succession d’envolées transies, une boursouflure Harlequin gorgée de plumes de paon, de cartes postales Lilicub aux quatre coins de la Méditerranée, et ce dès l’apparition du titre du film dans une typographie rose Barbie Cartland. Des Gouttes d’eau… à 8 femmes, on sait Ozon joueur impénitent. Angel est un nouveau terrain ouvert à toutes les libertés, où l’eau de rose pleinement assumée permet de tomber à la renverse lors d’un baiser en robe vermeille, suivi d’un pano ornant glorieusement le cadre d’un arc-en-ciel aussi exalté qu’effronté.
LA FASCINATION DU PIRE
L’ange a pourtant deux visages. Refrain maussade dans l’œuvre d’Ozon: "il n’y a pas d’amour heureux". La réussite insolente d’Angel, qui conjugue sa gloire artistique, sa vie de château et sa passion amoureuse, se doit d’être giflée par les montagnes russes d’un rise and fall classique, où l’on goûte innocemment à l’ambroisie avant de mordre la poussière sans le moindre ménagement. Dans l’œil du cyclone, Angel rappelle un peu de Romain, héros pas si aimable du Temps qui reste, mais surtout Scarlett O’Hara, délicieux choléra en froufrous virevoltants, interprétée par la nouvelle venue Romola Garai, dont l’abattage s’avère tantôt charmant, tantôt fatigant face à une Lucy Russell irréprochable. Les amours chiennes d’Ozon s’expriment davantage au premier degré dans une seconde partie qui embrasse sans honte un romanesque de robes de poupée technicolor et de temps de guerre, donnant chair au jeu et attachement à la figure ambiguë d’Angel, princesse cristal ou épouvantail d’un autre temps impitoyablement dénudé après une existence de représentation constante. Malgré d’évidents problèmes d’huile et de tempo, l’ange d’Ozon emmène ailleurs le cinéaste et ses obsessions, dans les illusions d’un jardin anglais fait de roses et de mauvaises herbes.