Harvey Milk
Milk
États-Unis, 2008
De Gus Van Sant
Scénario : Black Dustin Lance
Avec : Josh Brolin, James Franco, Victor Garber, Emile Hirsch, Diego Luna, Sean Penn, Black Phomtong
Photo : Harris Savides
Musique : Danny Elfman
Durée : 2h08
Sortie : 04/03/2009
De 1970 à 1978, la vie de Harvey Milk, premier élu gouvernemental ouvertement gay aux Etats-Unis.
LAST DAYS
Parenthèse fermée sur la tétralogie qui l'a consacré maître, Gus Van Sant revient vers un cinéma plus mainstream avec Harvey Milk, celui qui l'avait révélé à un plus large public grâce à Prête à tout et installé avec Will Hunting ou A la rencontre de Forrester. Milk n'a pas pour autant besoin de se maquiller pour montrer patte blanche de l'Oscarisable acceptable, Van Sant, plus classique, reste lui-même malgré tout. Parcours politique d'un homme mais portrait sensible où règnent motifs et entichements du cinéaste: la contre-culture, une fois de plus, l'exclusion, cow-boy camé, gigolo orphelin, présentatrice météo allant solo, surdoué incompris, fantôme suicidaire, lycéens sans repère, politicard pédé, le héros chez Gus Van Sant est seul, contre, pas par pose, juste que les choses sont ainsi. Pas moyen d'édulcorer les rapports amoureux chez un cinéaste aussi attaché à l'identité sexuelle et à ses enjeux, Milk raconte un San Francisco 70's sans drap joli sur sa faune queer, sexualité assumée et décomplexée, moustache et folle hors du placard, peignant à l'occasion une passion en pointillé entre Harvey Milk et Scott Smith (James Franco) avec une évidente authenticité.
Parsemé d'images d'archive, le récit lui aussi mise sur la reconstitution sincère. Si Van Sant choisit un traitement plus accessible, c'est aussi pour son message à diffuser, son idéal d'engagement, d'activisme, de liberté, qu'importe l'épée de Damoclès, lettres anonymes ou défiance télévisée. Harvey Milk capture une époque de sang dans le caniveau, heures chaudes vues dans le reflet brillant d'un sifflet de flic, menace comme souvent invisible chez le réalisateur, nulle part et partout comme les cieux agités qu'affectionne le cinéaste. Quelques réminiscences s'invitent, le dialogue pop des prostitués en une de magazines gays dans My Own Private Idaho en conversation téléphonique ici, l'apesanteur du travelling circulaire lors d'une réunion lycéenne ou les plans-séquences de dos d'Elephant repris aux abords du crime, brutal, aussi prévisible qu'improbable, destin annoncé mais souffle comme élan coupés, tragique de Tosca en dernier horizon. On pourra louer la qualité d'un casting de haute volée mais on ne tressera pas assez de lauriers à Senn Penn, qui livre probablement sa prestation la plus habitée. C'était il y a trente ans mais l'Harvey Milk de Gus Van Sant sonne cruellement actuel, le lendemain de l'adoption, avec une certaine ironie, de la Proposition 8 en Californie.