Wrong
De Dupieux Quentin
Éditeur : REALITISM
Zone 2
Nombre de disques : 1
Durée : 1h34
Sortie : 08/01/2013
Dolph a perdu son chien, Paul. Le mystérieux Master Chang pourrait en être la cause. Le détective Ronnie, la solution. Emma, la vendeuse de pizzas, serait un remède, et son jardinier, une diversion? Ou le contraire. Car Paul est parti, et Dolph a perdu la tête.
AM I WRONG ?
Quentin Dupieux poursuit sa balade funambule sur la frontière entre poésie absurde et ultra-réalisme avec Wrong, qui fait partie de ces oeuvre dont il vaut mieux savoir le moins possible par avance. De prime abord, le film a pourtant l’air étonnamment simple : peu de personnages, une intrigue limpide, a priori pas de parti-pris fantastique... Qu’est ce qu’il pourrait y avoir de wrong alors ? Car si ce nouveau long métrage semble à première vue moins jusqu’au-boutiste que Rubber ou jouer moins la carte de la comédie flagrante que Steak, il n’en demeure pas moins unique, une histoire de fou tout simplement imprévisible. Impossible en effet de deviner l’issue de chaque scène ou les directions dans lesquelles partira le récit, et pourtant le tout reste très cohérent, parvient toujours à retomber sur ses pattes. Combien de films peuvent s’en vanter ?
Pas évident de mettre le doigt sur l’origine de cette bizarrerie qui crève pourtant l’écran. Et tant mieux, car c’est à croire que l’écriture de Dupieux s’est affinée. Chaque scène de dialogue est légèrement étirée jusqu’à faire naitre un léger malaise, une inquiétante étrangeté dont on ne sait pas s’il faut en rire ou s’en inquiéter. On pense à l’humour lynchien bien sûr, mais aussi au grotesque pince sans rire et néanmoins poétique des récentes réussites grecques (Canine et surtout l’inédit L). Cet équilibre rare entre humour et amertume, entre premier et second degré, trouve sans doute son origine dans la direction d’acteurs. Autour de Jack Plotnick (aperçu entre autres dans les très queer Reno 911 et Girls will be Girls), Eric Judor et William Fichtner forment un ensemble aussi excellent qu’éclectique qui, en jouant avec la plupart du temps avec le plus grand sérieux, tire plus d’une fois le film vers le haut.
Cette folie ne fonctionne pas avec autant de succès à chaque scène, et bien que court, Wrong possède un rythme parfois inégal. C’est d’ailleurs justement lorsqu’il s’approche le plus du second degré ironique qu’il s’affaiblit (cf. la scène avec le détective), comme si le film ne se prenait plus lui-même aussi au sérieux qu’il le mérite. On aurait néanmoins tort de prendre ce nouveau long métrage pour une simple parodie stérile. L’audace et la singularité de Dupieux mérite plus de considération. Et cela n’est pas une surprise pour ceux qui suivent le réalisateur, mais ce dernier fait à nouveau preuve d’une technique et d’un sens esthétique rares. Ce n’est pas la moindre qualité de cette oeuvre décidément pas banale.
Bonus
Below the Scenes : making of de 15 minutes : Comme si Wrong n’était pas assez azimuté, Quentin Dupieux nous convie à une lecture du scénario du film, ladite lecture étant, comme de bien entendu, effectuée d’une manière qui semble aléatoire par les différents acteurs. Cela ajoute une distanciation supplémentaire par rapport au film pour un effet troublant garanti. Deuxième bonus, le premier épisode de Wrong Cops, pilote d’une série à venir (en tout cas espérons-le). Dans celui-ci, Marylin Manson, qui joue le rôle d’un adolescent (!) désœuvré qui écoute de la musique dans un parc, est kidnappé par un policier qui veut lui faire découvrir (par la manière forte) la vraie dance music. Au vu de ces premières scènes, on peut au moins dire que Quentin Dupieux ne semble pas être sur la voix de la normalisation. Voilà une bonne nouvelle. Attendons la suite. L'édition est complétée par une bande-annonce et quatre stickers collectors.