Vie de Michel Muller est plus belle que la vôtre (La)
De Muller Michel
Éditeur : Universal
Zone 2
Nombre de disques : 1
Sortie : 05/10/2005
L’humoriste Michel Muller a signé un contrat avec une équipe de télévision, autorisant un caméraman et un preneur de son à le suivre où et quand bon leur semble, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, pendant un mois. Il ne va pas tarder à regretter cette décision…
SUICIDE MEDIATIQUE
Qu’y a-t-il encore à attendre des humoristes français lorsqu’ils se frottent à l’expérience du grand écran? Bien forcés fils de TV, nos amuseurs se doivent, pour ne pas sombrer dans l’oubli, de tenter le passage de la petite à la grande lucarne, désormais étape obligée sur la route de l’affirmation artistique. Affirmation triple: reconnaissance publique et/ou critique, succès commercial, épanouissement personnel. Les résultats sont de tout ordre (des affreuses grimaces d’un Double Zéro, jusqu’aux vents ambitieux et aimables de Quand la mer monte, en passant par les plus fédératrices gauloiseries de Mission Cléopâtre) et, il faut bien l’avouer, les bonnes surprises de plus en plus rares. Reste une voie détournée, déjà éprouvée par Laurent Baffie et ses inégales Clefs de bagnole. Celle-là même que creuse plus avant Michel Muller dans son premier long: l’auto-parodie connivente. Foin de gros budgets gonflant les chevilles par paquets d’hélium. Il s’agit ici de taquiner le spectateur du coude et de ne pas le duper en prétendant faire autre chose que ce qu’on sait déjà faire. Dès le titre (qui, à l’origine, devait être Suicide médiatique, jugé au final trop négatif), cartes sont jouées sur table: Muller va faire du Muller.
FREQUENSTAR
Soit donc un vrai-faux reportage sur la bête, à la foire hors la scène. Pour son confort, sans doute, comme Baffie avant lui, l’amuseur sort son plan hexagonal du gotha cinéma: Depardieu, Semoun, Solo, Miller, Dujardin, Le Pogam… Et Muller s’amuse avec comme un grand enfant pervers. Sauf que, là où Les Clefs de bagnole s’empêtrait dans les limites du film référentiel, Baffie s’avouant infoutu d’écrire une vraie histoire, Muller se contente de faire comme si, pour que son film l’en démentisse mieux. Bonne nouvelle: souvent, le stratagème fonctionne. Endossant la défroque qu’on lui connaît du personnage immonde qu’il vaut mieux se passer d’inviter, s’entourant d’une équipe de bras cassés jouant bien le ridicule, et réfléchissant véritablement à ce qu’il montre et à la manière de ménager ses effets, plutôt que de chercher le rire-minute, Muller fait mouche. L’esthétique de docu-plan-plan, façon Fréquenstar partant en sucette, est finement pastichée, et l’humoriste parvient régulièrement à dépasser la simple potacherie du film de potes. Certes, la dimension auto-critique (notamment un savoureux et pertinent regard sur une filmo personnelle désastreuse et un milieu cinématographique à deux vitesses – belle giflette à Besson au passage) pourra échapper aux non-initiés.
C’EST ARRIVE PAR CHEZ LUI
Mais lorsqu’il envisage et même tutoie un autre cinéma, celui qui, de C’est arrivé près de chez vous à Strass, franchit ses limites artisanales pour donner dans ce qu’un vocabulaire réducteur nommerait trash, La Vie de Michel Muller est plus belle que la vôtre s’autorise à aller plus loin que prévu. Ainsi en va-t-il des grinçantes scènes de viols dans les WC d’un night-club minable, du chat crevé sanguinolent, ou de cette hilarante séquence épilogue qui accompagne le générique final... Dans ses meilleurs moments, en effet, La Vie de Michel Muller… relève, c’est heureux, moins de Jackass que de son grand frère spirituel Aaltra, modèle plus ou moins avoué. Reste que là où Benoît Delépine et Gustave Kervern avaient osé aller à fond dans leur logique (vrais partis pris de tempo, de découpage et d’esthétique), Muller refrène ses ardeurs et évite le jusqu’auboutisme vers lequel il aurait dû tendre – voir à ce titre la dernière partie du métrage, censée parodier la Nouvelle Vague, et soi-disant filmée via une caméra de surveillance, finalement très propre et donc déceptive. Dommage, car ce film-là, on aurait adoré le voir. Pour une vie meilleure?
Bonus
A petit film sans prétention, petit DVD ? La preuve que non. Réalisé avec les moyens du bord, distribué dans une minuscule combinaison de salles, ce faux documentaire devrait trouver une seconde chance grâce à son exploitation DVD.
Passons rapidement sur le making of, intéressant mais qui dans le cadre d'un faux documentaire n'offre logiquement pas réellement de nouveautés, et sur le bêtisier (strictement sans le moindre intérêt, si ce n'est l'hilarité qui prend Jean Benguigui lors du tournage d'une scène).
Les scènes manquantes n'apportent pas vraiment grand chose au film, mais on prend plaisir à retrouver certaines des guest stars, notamment Eli Seimoun et Jean Dujardin, dans un prolongement de leurs scènes. Ce moment du film, sans doute le meilleur, trouve un écho aussi drôle que méchant dans les commentaires des acteurs, filmés sur un fond noir, exprimant une mine triste et effrayée.
Mais tout ça n'est rien comparé à la véritable perle du DVD, le court-métrage complet réalisé par le vigile en fin de film, avec une caméra de surveillance. Très beau moment de poésie, sans doute supérieur au reste du métrage, ce court est un véritable instant de drôlerie grinçante (les retrouvailles familliales), mais aussi d'émotion (la scène finale auprès du barbecue).
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Interactivité :
A petit film sans prétention, petit DVD ? La preuve que non. Réalisé avec les moyens du bord, distribué dans une minuscule combinaison de salles, ce faux documentaire devrait trouver une seconde chance grâce à son exploitation DVD.
Passons rapidement sur le making of, intéressant mais qui dans le cadre d'un faux documentaire n'offre logiquement pas réellement de nouveautés, et sur le bêtisier (strictement sans le moindre intérêt, si ce n'est l'hilarité qui prend Jean Benguigui lors du tournage d'une scène).
Les scènes manquantes n'apportent pas vraiment grand chose au film, mais on prend plaisir à retrouver certaines des guest stars, notamment Eli Seimoun et Jean Dujardin, dans un prolongement de leurs scènes. Ce moment du film, sans doute le meilleur, trouve un écho aussi drôle que méchant dans les commentaires des acteurs, filmés sur un fond noir, exprimant une mine triste et effrayée.
Mais tout ça n'est rien comparé à la véritable perle du DVD, le court-métrage complet réalisé par le vigile en fin de film, avec une caméra de surveillance. Très beau moment de poésie, sans doute supérieur au reste du métrage, ce court est un véritable instant de drôlerie grinçante (les retrouvailles familliales), mais aussi d'émotion (la scène finale auprès du barbecue).