Last Life in the Universe
De Ratanaruang Pen-Ek
Éditeur : Océan Films
Zone 2
Nombre de disques : 1
Sortie : 10/03/2005
Kenji est un japonais exilé en Thaïlande où il travaille comme bibliothécaire. Un soir, son frère se fait assassiner chez lui par un inconnu que Kenji a à peine le temps d’abattre à son tour. Au cours de sa fuite, il tombe sur Noi, une jeune prostituée dont la sœur vient d’être tuée dans un accident de voiture.
LOST IN TRANSLATION
Elle semble bien loin, la naïveté acidulée de Monrak Transistor, conte où l’on s’adonnait aux plaisirs du karaoké pour oublier la rudesse des jours. Nouveau film du jeune Thaïlandais Pen-ek Ratanaruang, Last Life in the Universe enfonce ses ongles plus profondément dans la chair meurtrie par l’usure mentale (solitude d’un expatrié ou quotidien d’une prostituée). Lui est japonais et vit en Thaïlande, elle est thaïlandaise et rêve du Japon, il a perdu son frère, elle est orpheline de sa sœur, l’un étouffe sa déprime dans sa maniaquerie, l’autre la laisse s’échapper dans le chaos. Les reflets théoriques sont faits pour s’entendre. Ratanaruang érige l’incommunicabilité en une nouvelle voie de communication, à l’image des cassettes pour apprendre le japonais qui semblent passer en boucle sans que personne n’y prête attention. Sur une trame narrative à peine habillée (scènes de spleen et postures d’abandon), les refrains se font visuels (la maison de Noi, troisième entité magnifiquement photographiée par le prodigieux Christopher Doyle) et surtout sonores, comme ces vagues qui jamais ne cessent de lécher le front soucieux de ses personnages. Mer protectrice et pratiquement invisible, si ce n’est à l’occasion d’un plan qui révèle la désolante vérité: l’onde est envahie par la pourriture.
SPLEEN ET IDEAL
Pourtant, l’espace d’une saisissante et surprenante poussée onirique, le décor défriché retrouve de sa superbe et laisse entrevoir l’apaisement. Everything in its right place. La guérison n’est qu’une passagère infidèle et les tentatives de suicide de Kenji ne sont guère plus que retardées par les appels vitaux d’une cloche, d’une sonnette ou d’un réveil. A l’opposé, l’obsédante mélodie du téléphone ne cesse de brailler à l’oreille de Noi le besoin du départ. Dernière vie dans l’univers, et dans un monde sans repère précis - l’appartement blême ou la maison hirsute n’ont pas de chemin, ils ne sont plus que des points posés au hasard sur une carte nue - et dont les centres névralgiques sont encore ces deux âmes trébuchantes. A cet égard, l’élégance de Ratanaruang a un vice, celle de l’esthétisation chic, du flirt avec la pose. Les volutes de cigarettes sont d’une telle cinégénie, le rideau au dégradé de rouge, orange et rose fera si joli dans le cadre. L’inconsistance guette de son œil acéré, surtout lorsque le film a la mauvaise idée de rameuter des yakuzas ou des maquereaux dont on s’était si bien passé jusque-là. Sans réellement choisir son camp, le cinéaste thaïlandais tente de capturer l’évanescence d’un état mental en même temps qu’il s’y molletonne avec une demi complaisance affichée. Peut être que ce qui passe pour de la pose tient davantage de la résignation.
Bonus
Ce très joli film thaïlandais bénéficie d'une édition de belle qualité. Le travail sur le son et l'image de Pen-ek Ratanaruang qui contribue grandement à l'ambiance du long métrage est parfaitement respecté. Seul petit regret, l'absence d'une piste sonore en français pour les réfractaires à la VO...
Sur le plan des bonus, là encore, une belle surprise. Alors que certains films asiatiques récents sortent sans supplément spécifique, Océan Films nous offre un très long entretien (plus de 30 minutes) avec le réalisateur thaïlandais qui dissèque ainsi ses influences et explique ses partis pris de mise en scène. La parole est également donnée à Christopher Doyle, le chef opérateur attitré de Wong Kar-Wai, qui a signé la photo de Last Life in the Universe. Des bandes-annonces et des filmographies complètent ces bonus.
Yannick Vély
En savoir plus
Interactivité :
Ce très joli film thaïlandais bénéficie d'une édition de belle qualité. Le travail sur le son et l'image de Pen-ek Ratanaruang qui contribue grandement à l'ambiance du long métrage est parfaitement respecté. Seul petit regret, l'absence d'une piste sonore en français pour les réfractaires à la VO...
Sur le plan des bonus, là encore, une belle surprise. Alors que certains films asiatiques récents sortent sans supplément spécifique, Océan Films nous offre un très long entretien (plus de 30 minutes) avec le réalisateur thaïlandais qui dissèque ainsi ses influences et explique ses partis pris de mise en scène. La parole est également donnée à Christopher Doyle, le chef opérateur attitré de Wong Kar-Wai, qui a signé la photo de Last Life in the Universe. Des bandes-annonces et des filmographies complètent ces bonus.
Yannick Vély