Blow Out
De de Palma Brian
Éditeur : Carlotta Films
Zone 2
Nombre de disques : 1
Durée : 1h48
Sortie : 21/11/2012
Preneur de son, Jack Terry enchaîne les séries Z. Une nuit où il enregistre des sons d’ambiance, il assiste à un accident de voiture et sauve la vie de Sally, sa passagère. À l’hôpital, l’identité du conducteur décédé crée la stupeur : il s’agit du gouverneur McRyan, politicien pressenti pour être le prochain Président des États-Unis. Désormais persuadé qu’on a tiré sur la voiture, Jack réécoute de façon obsessionnelle les bandes de l’enregistrement…
Si certains plans, quoi que magnifiques, paraissent tout à fait artificiels (le travelling circulaire interminable dans la salle de montage dont on conçoit bien le sens mais qui demeure légèrement pompeux), le film reste un tel festival qu’on en garde presque le tournis. Charnière dans la carrière du réalisateur, passerelle vers un autre cinéma, pas forcément plus commercial, mais dont les plus gros budgets lui apporteraient plus d'opportunité de mise en scène, Blow out est une date pour De Palma qui, grâce à l'apport de Travolta qui propulse le film vers la série A, se voit confier des moyens inattendus et en profite pour s'éclater et faire ce qu'il veut. Forcément, tout ça peut paraitre un peu gratuit, constance chez le cinéaste, comme si l'idée de placer/déplacer sa caméra ici ou là lui venait brusquement sur le tournage sans qu'il se pose un seul instant la question du sens, sans qu'il cherche non plus à dépasser ou remodeler la scène par le montage. Ainsi , là où dans Pulsions la mise en scène me semblait toute tournée vers l'efficacité, elle semble ici bien plus concernée par elle-même, par sa beauté et son désir d'en mettre plein la vue. Des scénarios originaux de De Palma, celui-ci reste le plus carré, le mieux construit. Evidemment, il se fiche totalement de certaines incohérences (De Palma n'est finalement jamais aussi bon que lorsqu'il adapte le scénario ou l'histoire d'un autre), s'attachant plutôt à ses personnages et à une ambiance paranoïaque qu'il parvient à installer et déployer, marquée par les affaires JFK et Watergate (bien plus que par l'affaire Chappaquiddick qui ne constitue finalement qu'une béquille pour lancer le film) qui secouèrent les années 60/70. A ce titre, les dialogues sont savoureux et assez osés, puisque le réalisateur se permet, avec dix ans d'avance sur au hasard JFK, de remettre en question absolument tout le socle de la société (police, médias, politique...). Ce n'est certainement pas le seul film ni même le premier dans le genre, mais on a rarement ressenti une telle paranoïa, aussi prégnante, aussi incarnée, sauf peut-être chez Stone, justement (pas étonnant que les deux se soient entendus sur Scarface). Et même en connaissant la fin, on reste pris par cette atmosphère tendue, tant le réalisateur pour une fois semble s'attacher pour une fois à ses personnages (entre un Travolta quasi autobiographique et une Nancy Allen qui était encore sa femme à l'époque, c'est assez logique). Clairement un must, un de ses meilleurs films malgré (ou grâce à ?) cette gratuité presque arrogante évoquée plus haut.
Bonus
Comme Pulsions, sorti le même jour chez le même éditeur, Blow Out est accompagné de quelques interviews purement informatives variablement intéressantes. Si celle du producteur George Litto fourmille d’anecdotes (sur la recherche des fonds, sur la banqueroute de la boite de production Filmways Pictures, sur l’apport de John Travolta et le choix de Nancy Allen, sur le fameux vol de plusieurs bobines du film…), celle de Nancy Allen se révèle vite sans intérêt. Heureusement, contrairement à Pulsions, Blow Out bénéficie en plus de trois bonus de taille. Commençons avec l’analyse faite Jean Douchet, qui se tire sans doute un peu trop l’élastique mais livre quand même quelques clés pour comprendre et apprécier le film. Deuxième module, celui consacré à Pino Donaggio, qui revient sur ses débuts, sa rencontre avec Nicolas Roeg, puis celle avec De Palma, son choix de privilégier des musiques légères où prédomine le violon aux gros orchestres hollywoodiens. Il évoque Carrie, Pulsions, bien entendu Blow Out, parle du progressif retournement de veste des critiques à propos de sa musique… Donaggio étant relativement rare en interview, on boit chacune de ses paroles. Mais le gros bonus de taille, celui qui non seulement fournit un tas d’informations concrète sur le tournage et le film, mais également livre quelques éléments pour mieux le comprendre, c’est l’interview du chef opérateur hongrois Vilmos Zsigmond. Prédominance des couleurs bleu et rouge (celles du drapeau américain), utilisation de plans à plusieurs niveaux, désir de faire un film noir en couleurs, alternance des plans larges et serrés, tout y passe et l’on regrette que l’interview ne dure que vingt-cinq minutes tant on aurait pu l’écouter une heure ou deux. Au final, si les deux blu-rays consacrés à De Palma, Pulsionset Blow Out, méritent largement l’achat, celui-ci gagne d’une large tête en termes de bonus.