Les Yeux de Julia
Los Ojos de Julia
Espagne, 2010
De Guillem Morales
Scénario : Guillem Morales, Oriol Paulo
Avec : Pau Derqui, Julia Gutiérrez Caba, Lluis Homar, Belen Rueda
Photo : Oscar Faura
Musique : Fernando Velazquez
Durée : 1h56
Sortie : 22/12/2010
Quand Julia apprend la mort soudaine de sa sœur Sarah, tout semble clairement indiquer qu'elle s'est suicidée. Mais Julia n'arrive pas à accepter cette version des faits et commence à passer au crible les évènements qui ont eu lieu les derniers mois avant le drame. La découverte d'éléments déconcertants, en désaccord avec la personnalité de Sara, et sa rupture de contact avec son entourage, ne font que nourrir les soupçons de Julia quant aux circonstances réelles du décès. Décidée à résoudre l'énigme de cette ultime période, Julia devient l'objet d'une singulière menace qu'aucune autre personne autour d'elle, y compris son mari Isaac, ne semble percevoir, alors même que la maladie dégénérescente dont elle souffre prend le dessus, la plongeant petit à petit dans l'obscurité. La compréhension et l'amour d'Isaac avaient jusqu'alors eu raison des attaques de cécité de Julia, mais une série d'incidents inquiétants, et toujours p lus violents, menacent son équilibre, l'enfermant inexorablement dans le monde des ténèbres, à la merci de la présence terrifiante qui s'y terre.
ABRE LOS OJOS
On le sait, la cécité donne des visions, fait apparaître des secrets tapis dans l'ombre ou révèle certaines faces cachées. Les Yeux de Laura Mars, The Eye ou encore Ouvre les yeux ou suffisamment œuvrés dans ce sens-là pour que chaque nouvelle incursion du thème dans le cinéma de genre donne à chaque fois de nouveaux cheveux blancs à Alain Afflelou. Et lorsqu'on voit débarquer Guillermo Del Toro et l'équipe derrière la production de L’Orphelinat avec une nouvelle péloche du même type, on se dit qu'il faudra plus qu'une paire de Tchin-tchin pour venir à bout de ce mal des temps modernes. Convoquant une somme de règles venues du fantastique, certains artifices du giallo et quantité d'éléments de la plus pure tradition du thriller hitchcockien, le second film de Guillem Morales utilise une certaine grammaire cinématographique plutôt bien intentionnée, exempte de tout effet d'esbroufe et au service de son histoire pour mieux jouer avec l'élément fantastique tout en restant au final très terre-à-terre. Car en prenant le temps de poser toutes les pièces d'un puzzle qu'on imagine d'avance alambiqué, avant de les assembler et découvrir une vue d'ensemble forcément fatale, Les Yeux de Julia joue avec les sens en éveil, ouvre un véritable jeu de pistes et distille sa raisonnable tension tout du long sur les traces d'un passé que l'héroïne ne pouvait pas forcément anticiper (et nous de même). Problème, le film mise beaucoup (trop?) sur sa mécanique aux rouages apparents mais parfaitement huilés pour donner du corps à l'affaire et compte également un peu trop sur sa révélation finale pour nous bluffer. Heureusement, Morales n'est pas un manchot et sait faire parler sa caméra (excellente idée que de cacher les visages des protagonistes au fur et à mesure de l'avancée de la maladie de Julia) verrouillant ainsi chacun des éléments de sa narration. Mais même si le film va au bout de son idée sans vaciller, le processus paraît tellement bien pensé et manipulateur qu'il manque d'une véritable fraîcheur et surtout d'un semblant de spontanéité ne laissant au spectateur que très peu de chance de se faire balader et de faire sa propre enquête.