X-Men: Apocalypse
États-Unis, 2016
De Bryan Singer
Scénario : Simon Kinberg
Avec : Michael Fassbender, Oscar Isaac, Jennifer Lawrence, James McAvoy
Photo : Newton Thomas Sigel
Musique : John Ottman
Durée : 2h23
Sortie : 18/05/2016
Depuis les origines de la civilisation, Apocalypse, le tout premier mutant, a absorbé de nombreux pouvoirs, devenant à la fois immortel et invincible, adoré comme un dieu. Se réveillant après un sommeil de plusieurs milliers d'années et désillusionné par le monde qu'il découvre, il réunit de puissants mutants dont Magneto pour nettoyer l'humanité et régner sur un nouvel ordre. Raven et Professeur X vont joindre leurs forces pour affronter leur plus dangereux ennemi et sauver l'humanité d'une destruction totale.
L'EX-HOMME DE LA SITUATION
Revenu à la barre de la saga, tout d'abord à l'histoire et à la production de First Class puis en réalisateur de Days of Future Past, Bryan Singer a donné naissance aux deux films qui s'imposent sans doute comme les meilleurs de la saga et se permet une pique envers le troisième film de la première trilogie, réalisé par Brett Ratner, par le biais d'une réplique de Jean Grey qui dit : "on peut tous s'accorder sur le fait que les III sont toujours les pires". Tu ne croyais pas si bien dire, Bryan. Apocalypse est le troisième film de la nouvelle trilogie et, souffrant des mêmes problèmes que L'Affrontement final, s'avère être le pire. Difficile de croire que l'équipe derrière X2, dont on retrouve les scénaristes, et Days of Future Past ait pu accoucher d'un film aussi torché que celui-ci. Jusqu'à présent, la série avait su éviter la redite. Sur la trilogie originale, la surenchère épousait l'évolution des personnages de façon justifiée, cohérente, introduisant de nouvelles idées, de nouveaux ennemis, de nouvelles questions, afin de ne pas se répéter. Ici, après un pseudo-reboot sous forme de préquelle, apportant de la fraîcheur et ancrant davantage la saga dans une réalité historique, puis une diégétisation de cette tabula rasa grâce au voyage dans le temps, explorant mieux que jamais les personnages, Apocalypse s'apparente par moments à un remake accéléré de la première trilogie. Un peu comme le dernier Star Wars mais avec sentiment exacerbé de film de transition.
X-MEN DES ANNÉES 80, X-MEN JUSQU'AU BOUT DES SAINTS
Une introduction dans le passé (l'Egypte remplace Auschwitz), une découverte de pouvoir traumatisante pour un ado (jadis Rogue, ici Cyclops), un combat de mutants dans une cage, un passage par la base d'Alkali Lake d'X2...sauf qu'à chaque fois, c'est la même chose en moins bien. Cette impression de déjà vu se retrouve également dans les arcs des personnages. Avoir encore une fois un arc "on doit s'assumer comme tel" pour des persos principaux comme Mystique, ça tient du non-sens. Days of Future Past construisait une dramaturgie autour du trio principal (Charles/Erik/Mystique) en exploitant à fond ce que First Class avait instauré. Apocalypse choisit de ne pas vraiment utiliser ce que le précédent a installé, à l'exception du caractère messianique de Mystique qui s'inscrit dans le propos plus général sur la religion que (sous-)développe le film. Cette thématique est le nouvel angle que Singer, dont un des thèmes de prédilection est le rapport à la religion et la divinité, choisit pour apporter de la nouveauté à sa saga. Ainsi fait-il d'Apocalypse un gourou qui recrute des âmes perdues dans sa secte terroriste, mais le traitement de cette idée se limite à la phrase qui précède. Le traitement reste en surface. À l'instar des parcours de chaque protagoniste - mention spéciale à celui de Jean Grey, résumé en deux scènes : un cauchemar au début, un déchaînement à la fin, le fond du film est laissé en friche. On créé artificiellement un nouveau trauma originel superflu pour Magneto afin de lui remettre le pied à l'étrier, avec une très belle idée macabre (le pendentif), avant de réduire l'antagoniste quasiment à de la figuration pour le reste du film. Tout paraît fonctionnel, le recrutement des Chevaliers de l'Apocalypse comme la formation des nouveaux X-Men. En gros, l'écriture se limite à du fan service. De la part de Singer, c'est sincèrement étonnant.
DAYS OF FUTURE IMPERFECT
Il en va de même pour le destruction porn dont la série s'était tenue écartée jusqu'ici et dans laquelle le film se vautre quelque peu. L'équipe cite le film-catastrophe comme nouveau genre de référence après l'espionnage '60s de First Class et la SF de Days of Future Past mais là où les deux précédents volets citaient James Bond ou Terminator et Retour vers le futur, ce dernier chapitre pâtit d'une influence emmerichienne. Il n'y a même pas l'inventivité d'un Michael Bay ou d'un Zack Snyder en la matière. Par ailleurs, l'action est faiblarde. L'ouverture est sympathique bien que parasitée par le kitsch qui domine plus que jamais le film et le combat mental entre Xavier et Apocalypse est puissant mais le reste s'apparente à des ersatz de scènes déjà vues dans la saga. Même la scène de Quicksilver est une surenchère amusante du précédent mais sans l'effet de surprise. La deuxième trilogie est désormais bouclée, une nouvelle équipe est formée pour la troisième fois, et nous en sommes à neuf films en tout si l'on compte les spin-off sur Wolverine et Deadpool. Un troisième film consacré au mutant incarné par Hugh Jackman sortira en 2017, le carton de Deadpool lui a assuré une suite, Gambit devrait avoir son spin-off ainsi que les Nouveaux mutants. Difficile de se réjouir pour tout ça quand X-Men Apocalypse sonne comme l'épisode de trop.