Why Don’t You Play in Hell ?

Why Don’t You Play in Hell ?
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Why Don’t You Play in Hell ?
Jigoku de Naze Warui
Japon, 2013
De Sono Sion
Scénario : Sono Sion
Note FilmDeCulte : *****-
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Muto et Ikegami sont deux gangsters qui se détestent : l’un tente de réaliser le rêve de sa femme en cherchant un rôle de cinéma pour sa fille, l’autre est amoureux de cette dernière. Un réalisateur indépendant décide de la prendre comme actrice principale de son film. Évidemment, rien ne se passe comme prévu…

L’ENFER EST MON TERRAIN DE JEU

Présence accrue dans les plus grands festivals (Cannes, Venise ou Toronto), sorties inespérées dans les salles françaises : ces dernières années, l’œuvre prolifique de Sono Sion a été de plus en plus vue. Et tant mieux. Une œuvre éclectique dont le dénominateur commun serait moins le trash rigolard qu’une angoissante urgence. Il a souvent été dit, y compris ici, que Sono Sion parait réaliser chacun de ses films comme s’il s’agissait du tout dernier, avec une ardeur, une acidité, un désir de toucher le spectateur sans commune mesure parmi ses contemporains. Punk est le terme le plus souvent employé pour désigner son cinéma, et c’est un mot que l’on devrait retrouver dans les réactions face à Why Don’t You Play In Hell, farce violente et hyper-énergétique à la jubilation contagieuse.

Tout commence par une chanson. Une ritournelle idiote chantée par une gamine choupinette dans une publicité. Répétitive et collante comme un bonbon trop sucré, la ritournelle (ainsi que et la gamine) se retrouve plongée illico dans un immense bain de sang. Le ton est donné. Humour absurde et cabossage des registres, chaos et autres impolitesses : Why Don’t You Play In Hell combine des éléments de série B dans un scénario dans lequel rien ne devrait faire sens (plus on essaie de récapituler et d’expliquer cette histoire de yakusas, de jeunes cinéastes et de starlette dévergondée, moins on la comprend). Et pourtant, la formule Sono Sion fait un carton. Si le film met peut-être un peu de temps à passer à l’excès de vitesse, il est boosté par un montage à l’énergie rare, culminant dans un long dénouement branché sur 10.000 volts. Ce que Kill Bill et Tarantino avait emprunté au cinéma asiatique, Sono Sion le reprend aussi sec et le remixe sans hésitation dans des scènes de combat gargantuesques, climax de ce joyeux voyage en enfer, qui témoigne de l’habileté du cinéaste à mélanger violence et humour sans perdre de vue le sérieux de son sujet.

« Sérieux » et « Sujet ». Les mots sont lancés. Il y a en effet un double malentendu qui attend ici le réalisateur. Tout d’abord, certains se précipiteront (inconsciemment ?) sur l’équation suivante : « série B = soi-disant absence de propos sérieux ». Why Don’t You Play In Hell possède pourtant un sujet, la passion du cinéma, qui fait décoller les toutes meilleures scènes du film, vers un finale rien de moins qu’émouvant. On retrouve ici l’empathie du cinéaste pour la flamboyance juvénile de ses personnages et leur besoin irrépressible de se faire une place dans le monde incompréhensible des adultes. L’autre fausse idée serait que Sono Sion reviendrait à un cinéma contestataire après s’être assagi. L’équation « absence de violence physique = sagesse » est pourtant aussi erronée que la précédente. Himizu et The Land of Hope, les deux précédents longs-métrages de Sono Sion, abordaient certes un sujet inattaquable (l’après Fukushima), mais ils le faisaient avec un esprit bien plus révolté et frondeur. Qu’y a t-il qui ne soit pas contestataire dans ces deux films, qui laissaient eux aussi KO par leur manière d’aborder le drame avec un rebrousse-poil glaçant? Why Don’t You Play In Hell n’est pas un retour en arrière, il confirme simplement l’éclectisme par lequel s’expriment l’insoumission et l’audace d’un des cinéastes les plus passionnants du moment.

par Gregory Coutaut

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