Wallace et Gromit, le mystère du lapin-garou
Wallace & Gromit: the Curse of the Wereabbit
États-Unis, 2005
De Steve Box, Nick Park
Scénario : Bob Baker, Steve Box, Mark Burton, Nick Park
Avec : Helena Bonham-Carter, Ralph Fiennes, Peter Kay, Peter Sallis, Nicholas Smith
Photo : Tristan Oliver, Dave Alex Riddett
Musique : Julian Nott
Durée : 1h25
Sortie : 12/10/2005
Laveurs de vitre hier, Wallace et Gromit se sont depuis reconvertis dans la chasse au lapin et la protection de potager. A la veille d’un concours de légumes géants organisé par Lady Tottington, le duo est confronté à un problème de taille, un immense lapin goinfre.
LES CAROTTES SONT-ELLES CUITES?
Côté basse-cour, il y a eu Chicken Run, ses poules à la chaîne, ses coqs en pâte californiens et sa petite évasion hors du nid familial. Importé à Hollywood par Jeffrey Katzenberg, le fin stratège de DreamWorks, le studio Aardman défendait proprement ses couleurs, le cœur un peu ailleurs. Le cœur était resté à Londres, auprès du plus illustre binôme maître - chien, depuis Charlie Brown et Snoopy, Tintin et Milou et Obélix et Idéfix. Seize ans après sa naissance, trois courts métrages cultes, dix sketches sautillants, Wallace et Gromit a enfin droit à sa version panoramique, un ambitieux premier long métrage, dont le tournage héroïque force à lui seul le respect. Promis à l’excellence, les deux personnages créés par Nick Park, ne déçoivent pas et voient leur petit salon confiné s’agrandir d’un village prospère et d’un beau château. Propices aux jeux de piste, les trois épisodes aspiraient déjà à un horizon plus vaste. Les petits trains, la cabale nocturne et les crises conjugales reproduisaient en miniature, avec les moyens du bord, quelques scènes d’anthologie dérivées du grand écran et des facéties de l’enfance. Le système D perdure (les empruntes digitales sur la pâte à modeler ont volontairement été laissées), mais le budget plus confortable autorise de nouvelles glissades en toboggan. Le Mystère du lapin-garou semble la parfaite synthèse des courts métrages, le juste équilibre entre l’intrigue échevelée, le gag saugrenu, et l’accent à couper au couteau.
COMMENT CULTIVER SON JARDIN
La première nouveauté vient de l’environnement sonore, le passage du quasi-muet au parlant, même si Gromit daigne à peine un aboiement et que l’incontournable fanfare de Julian Nott, congédiée pour Chicken Run, fait ici son retour remarqué. Wallace renonce au soliloque, il est désormais secondé par des villageois rouspéteurs et trois excellents importuns. Un révérend cupide amateur de nonnes catcheuses, un ange en robe maïs, et un démon en postiche. La douce et molletonnée Wendolene Ramsbottom de Rasé de près cède la place à une délicieuse altruiste, Lady Campanula Tottington. Helena Bonham Carter campe une désopilante protectrice de lapins, aux côtés du très sournois mais très inspiré Ralph Fiennes. La deuxième innovation vient de l’apport de la 3D, injectée à doses homéopathiques dans Chicken Run. Dans Le Mystère du lapin-garou, ces inserts varient de l’impeccable (la brume, les lapins virevoltants) au superflu (une explosion un peu brutale, la trajectoire d’un projectile au ralenti). Le rythme haletant et les incessantes ruptures de ton gagnent en efficacité ce qu’ils perdent en poésie et en excentricité, cet humour affûté et pince-sans-rire qu’on retrouvait dans le format millimétré des Cracking Contraptions. Gromit hérite toujours du meilleur rôle, mais le recyclage des rebondissements (les lapins à la place des moutons, les numéros de voltige) contrarient un brin l’effet de surprise dans une deuxième partie plus empâtée. Avec Les Noces funèbres de Tim Burton dont il partage l’actrice principale, Le Mystère du lapin-garou reste pourtant l’un des derniers et spectaculaires représentants d’un artisanat enragé et hors du temps.
En savoir plus
La galerie photo (cliquez sur le lien situé sous l'affiche) montre quelques-uns des croquis, dessins préparatoires et "character design" qui ont servi au tournage du Mystère du lapin-garou.