Festival de Gérardmer: The Void
Alors qu’il effectue une patrouille de routine, l’officier Daniel Carter découvre un jeune homme blessé au bord de la route, le visage couvert de sang. Il s’empresse de le conduire vers l’hôpital le plus proche, mais découvre que les patients et le personnel de l’établissement se transforment peu à peu en créatures monstrueuses...
ENTER THE 80’s
Jeremy Gillespie et Steven Kostanski, les deux comparses aux manettes de The Void, ne sortent pas de nulle part. Impliqués dans les départements artistiques de nombreux blockbusters de ces dernières années (ils ont sur leurs cv du Suicide Squad ou du Pacific Rim), ils sont surtout membres fondateurs d’Astron-6, ce collectif canadien complètement frappadingue qui, en 10 ans, a su surfer sur le renouveau grindhouse instigué par Tarantino et Rodriguez, en livrant des revivals 80’s fauchés mais toujours délirants, faisant d’eux les seuls véritables héritiers de la boulimie Z de la Troma Films de Lloyd Kaufman. Si vous les avez vus, vous gardez certainement un souvenir émus de Manborg, du giallesque The Editor ou de leur Father’s Day, revenge movie aussi craspec que fun ! Avec The Void, les deux compères décident de gommer le second degré qui était le moteur de leurs précédentes réalisations, une évolution logique du statut de fan-film à celui de film-fan.
Ce qui est assez paradoxal vu l’intensité du film c’est que quiconque ayant fait sa culture cinématographique et forgé son goût pour les films d’horreur dans un vidéo-club des années 80 ne ressentira point d’inconfort devant ce que la tagline du film de Gillespie et Kostanki décrit comme «pire que l’enfer» ! Tout au contraire, l’amateur y ressentira un étrange sentiment de familiarité tant le film convoque à peu près tout ce qu’on a pu aduler en VHS ou sur Canal + les samedis où nos parents nous laissaient la baraque, avec en tête le cinoche renégat de John Carpenter, The Void tapant carrément des scènes entières de son Prince des ténèbres et s’inspirant également des cauchemars organiques créés par Rob Bottin pour The Thing dans les designs qu’on qualifiera d’évolutifs de ses créatures. Et pas seulement puisque sont aussi convoqués des pans entiers de L’Au-Delà de Fulci, les deux premiers Hellraiser et particulièrement leurs maquillages fous signés Bob Keen, Re-animator et From Beyond de Stuart Gordon ou les délires cinglés de Screaming Mad George dans le Society de Yuzna.
Un véritable festin, excessivement gore, où les effets spéciaux numériques sont majoritairement bannis au profit de bonnes grosses effusions réalisées à même le plateau. Un ride à l’ancienne des plus efficaces donc, mais dont les qualités évidentes et immédiatement jouissives peuvent aussi marquer les limites. On attend donc maintenant des fous furieux d’Astron-6 qu’ils dépassent leur envahissante déférence pour livrer des œuvres purement originales, qui ne regarderaient pas seulement vers le passé mais qui pourraient s’inscrire dans le présent et nous sauver du formatage qui ronge le genre horrifique de nos jours. Et si, au pire, leurs futures pelloches sont simplement aussi jouissives que ce The Void, sur-referenciel certes mais tellement efficace, eh bien que le diable, ou pire, nous emporte... On en redemande !
Clément Gerardo