Vérite sur Charlie (La)
The Truth about Charlie
États-Unis, 2002
De Jonathan Demme
Scénario : Jonathan Demme, Peter Joshua, Steve Schmidt
Avec : Christine Boisson, Ted Levine, Thandie Newton, Joong-Hoon Park, Tim Robbins, Mark Wahlberg
Durée : 1h45
Sortie : 15/01/2003
A son retour de vacances, une jeune mariée découvre son appartement et son compte en banque vides, et son mari assassiné mystérieusement. Avec l’aide de la police et d’un homme rencontré par hasard, elle tente de retrouver la trace de l’assassin, et d’échapper à trois gangsters désireux de s’approprier un hypothétique butin.
Il est assez étonnant de retrouver le mythique réalisateur du Silence des agneaux aux commandes d’un film quasi expérimental, dans lequel les effets de style résonnent comme ceux d’un apprenti metteur en scène. Objet informe, farfelu et insolite, La Vérité sur Charlie apparaît moins comme un remake du classique de Stanley Donen que comme un hommage à la Nouvelle vague à travers une flopée de références disséminées durant toute la longueur du métrage. Les chansons sont de Anna Karina ou Charles Aznavour, les hôtels ont tous pour nom "Langlois", Truffaut est régulièrement convoqué à travers des extraits de Tirez sur le pianiste ou des reprises de La Mariée était en noir, et la veuve d’un philatéliste est jouée par Agnès Varda. En évoquant régulièrement les films qui l’ont marqué durant sa jeunesse, Demme tente maladroitement de retrouver la liberté de cinéastes rebelles tout en reprenant leur marque de fabrique la plus évidente: la vision de Paris. Caricaturale à l’extrême, la capitale est ici montrée comme une ville sans âge, parsemée de vieilles voitures (les personnages ne roulent qu’en DS ou en Renault 14), de petites rues, de bérets… C’est dans cette tentative de jouer sur plusieurs tableaux (l’hommage, le burlesque, le polar) que le film trouve sa première limite. En cherchant une nouvelle liberté (nombreux effets de style "mode"), en évoquant ses glorieux aînés, en voulant rendre hommage à Paris, Demme accouche d’un film hybride, ce qui fait son charme, et bancal, ce qui fait sa principale faiblesse.
Malheureusement, le film se contente bien trop souvent de n’être justement qu’un simple exercice de style raté, et ne cherche jamais véritablement à transcender une intrigue prévisible et improbable. Les retournements de situation sont trop nombreux pour être honnêtes, et les personnages passent régulièrement du statut de méchant gangsters à celui de gentil espion. Leurs interprètes eux même ne semblent pas réellement y croire, et malgré tout leur enthousiasme, ils ont bien du mal à porter sur leurs frêles épaules ce curieux remake. Au final, La Vérité sur Charlie emporte malgré tout l’adhésion, notamment grâce à son aspect incroyablement ludique (l’un des personnages portant même le nom du scénariste du film), mais à la condition nécessaire de laisser le bénéfice du doute au cinéaste: se rendait-il vraiment compte de ce qu’il faisait? Le côté incroyablement ridicule de certaines scènes est-il assumé? Quelque soit la réponse, on aurait préféré retrouver Jonathan Demme aux commandes d’un film moins ambitieux formellement, mais au final plus abouti.
En savoir plus
Ex-poulain de l’écurie Corman pour laquelle il a réalisé deux immenses succès (Caged Heat et Crazy Mama), Jonathan Demme est également le metteur en scène de Dangeureuse sous tous rapports, qui a révélé Mélanie Griffith comme une actrice valable. Il a ensuite réalisé Veuve mais pas trop, Le Silence des agneaux (vainqueurs des cinq oscars les plus importants), Philadelphia (Oscar du meilleur acteur pour Tom Hanks) et Beloved, énorme échec au box-office mondial. Il est également le producteur du Diable en robe bleue de Carl Franklin, de That Thing You Do de Tom Hanks, de Mandela, et du prochain film de Spike Jonze: Adaptation.