Traqué

Traqué
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film
Traqué
The Hunted
États-Unis, 2003
De William Friedkin
Scénario : Peter Griffiths, Art Monterastelli, David Yates
Avec : Benicio Del Toro, Tommy Lee Jones, Connie Nielsen
Durée : 1h35
Sortie : 26/03/2003
Note FilmDeCulte : **----

Les corps de quatre chasseurs sont retrouvés sauvagement mutilés dans une forêt de Seattle. Pour enquêter, l’agent du FBI Abby Durrell s’adjoint les services d’un ancien traqueur des forces spéciales à la retraite, L.T. Bonham. Le tueur ne serait autre qu’un de ses anciens élèves, Aaron Hallam, porté disparu et véritable machine à tuer.

Au cinéma, pire que de voir un mauvais film lambda, il y a voir un mauvais film d’un excellent cinéaste. Un de ceux dont l’on attend chaque nouvel opus avec enthousiasme, motivé par le souvenir de ses réussites d’antan. Si William Friedkin sait filmer, il est de toute évidence moins doué qu’autrefois pour dénicher des scripts intéressants; la finesse du pitch de ce dernier film est là pour en témoigner. Oscillant tour à tour dans les univers d’Apocalypse Now, Predator, First Blood, Le Fugitif et une bonne centaine de séries B déviantes, le film est une honte scénaristique à tous points de vue. Comment peut-on, encore aujourd’hui, ne fonder les ressorts dramatiques d’un film que sur le thème éculé de la relation maître-élève? Comment peut-on encore miser sur une dramaturgie aussi pauvre que celle-ci, balancée sans respect ni morale en quelques répliques extraordinairement explicites? Comment peut-on croire qu’une histoire de ce type puisse motiver l’intérêt de spectateurs, tenus en laisse par la stupidité d’un tiercé de scénaristes aussi peu doués? Comment, enfin, peut-on espérer faire naître une quelconque originalité d’une idée de départ aussi affligeante de paresse? Dans l’intérêt de tous ceux qui ont participé à ce film, mieux vaut peut-être ne pas répondre à ces questions pourtant légitimes. Au diable la psychologie des personnages, la vraisemblance de l’intrigue et la crédibilité de l’enchaînement narratif, et place à l’action.

Techniquement, le film ne souffre que de quelques maladresses de montage entre les séquences. Mais si le tout est bien filmé et bien découpé, preuve que Friedkin s’amuse toujours autant en filmant des poursuites comme à la bonne époque (French Connection et Police Fédérale Los Angeles, réalisés par le cinéaste, restent à ce titre des modèles du genre), le film reste un enchaînement d’images sans émotion, d’une stérilité presque frustrante. Traqué est une œuvre égoïste et malhonnête par défaut, car le cinéaste y affiche sans pudeur son désir de réaliser, uniquement, se désintéressant totalement de l’intérêt éventuel du spectateur. Friedkin fait semblant de raconter une histoire, censée avoir la même signification pour lui que pour ceux qui paient leur place de cinéma, mais ne fait en réalité que lancer sur le marché un film brouillon, prétexte à une expérimentation personnelle sur le support filmique, réduisant le tout à un exercice égocentrique de pure mise en scène. Le réalisateur s’amuse, le spectateur s’ennuie. Triste symétrie. Il est néanmoins à mettre au crédit du cinéaste la sympathique intention d’écourter le film autour de l’heure et demie, sans quoi Traqué aurait sans doute été l’un des pires supplices de ce début d’année.

par Yannick Vély

En savoir plus

Quelques liens :

Partenaires