Titane
France, 2021
De Julia Ducournau
Scénario : Julia Ducournau
Avec : Vincent Lindon
Durée : 1h48
Sortie : 14/07/2021
Après une série de crimes inexpliqués, un père retrouve son fils disparu depuis 10 ans. Titane : Métal hautement résistant à la chaleur et à la corrosion, donnant des alliages très durs.
ALUMINIUM
Même en ayant vu (et adoré) le premier long métrage de Julia Ducournau, même en étant chaud comme un capot de voiture couvert de flammes sérigraphiées après avoir vu la bande-annonce de son nouveau film, il est difficile d'appréhender Titane tant le film apparaît aussi changeant, pour ne pas dire métamorphe, que son héroïne. L'introduction plante les prémisses des thématiques du film, de la métaphore transhumaniste de la transidentité du personnage principal, précédent même son accident, à son rapport à la filiation et la famille. Ces deux fils conducteurs vont gouverner le film, réussissant peu ou prou à donner un semblant de cohérence à un récit qui part un peu dans tous les sens, donnant parfois l'impression de voir deux (voire trois) films en un, relativement mal conciliés en un tout convaincant.
Dans un premier temps, on retrouve tout le talent formel de la cinéaste, capable comme nulle autre de rendre son body horror affreusement sensoriel. Un piercing trop tiré, une pénétration assourdissante et autres joyeusetés épidermiques font physiquement mal au spectateur. Néanmoins, les variations de ton et décrochages narratifs paraissent moins compréhensibles et plus arbitraires que dans Grave. Même dans un film où l'on accepte sans broncher une scène qui marie Christine et Crash, les agissements du protagoniste laissent interrogateurs et semblent n'exister que pour justifier la suite du film, son véritable postulat, qui va s'articuler autour de la relation entre Alexia et Vincent (Lindon). A vrai dire, ce personnage paraît bien plus entier que l'héroïne, et plus beau, dans ce portrait à la fois repoussant et attendrissant d'un commandant des sapeur-pompiers qui compense sa faute par une virilité exacerbée mais que le besoin d'amour paternel va transcender, au point d'annihiler toute barrière potentielle que pourrait présenter le genre.
Autant la bifurcation du film de genre choc vers une étude de personnages brisés et abîmés par la vie est louable dans ses intentions, avec des scènes où le malaise se fait autre, toujours dans un rapport au corps mais sans l'horreur graphique, mettant les personnages à mal psychologiquement (les pompiers face à la danse), autant le résultat peine à réellement emporter le morceau chaque fois que le genre fait sa réapparition, jusque dans cette fin qui sonne encore plus comme une chute type Les Contes de la Crypte que celle de Grave. La pirouette est plus poétique et la finalité présente un sens cathartique pour l'un des personnages mais achève de donner l'impression que le film a été fait pour quelques scènes-clé mal raccordées entre elle. Au fond, Titane ressemble davantage à un premier film que Grave.