Tip Top
France, 2013
De Serge Bozon
Scénario : Odile Barski, Serge Bozon, Axelle Ropert
Avec : François Damiens, Isabelle Huppert, Sandrine Kiberlain
Photo : Céline Bozon
Durée : 1h46
Sortie : 11/09/2013
Deux inspectrices de la police des polices débarquent dans un commissariat de province pour enquêter sur la mort d'un indic d'origine algérienne. L'une tape, l'autre mate, tip top.
DES TICS TOCS
« Ce n’est pas parce qu’un film n’est pas linéaire qu’il n’est pas clair » ; « Ne me demandez pas d’expliquer mon scénario, je revendique son mystère ». C’est par ces mots que Serge Bozon et sa coscénariste Axelle Ropert introduisent Tip Top, comédie pour le moins improbable. En théorie, on serait complètement d’accord avec ces revendications de singularité. Mais à quel point cette dernière peut-elle se réclamer sans contrepartie ? De sa première à sa dernière minute, Tip Top est en effet régi par un arbitraire sans limite. Pas seulement un humour nonsense à l’absurdité forcément déroutante mais bien une artificialité de chaque instant, des décalages trop permanents et grassement surlignés pour ne pas être complètement gratuits. Le décalage n’a d’intérêt (humoristique ou autre) qu’en référence à une normalité qu’il vient déformer. Ici tout n’est que décalage perpétuel. Une idée = une absurdité. Rien n’est normal mais du coup plus rien n’est drôle ou même vraiment surprenant. En découle un film à l’intrigue incompréhensible, anxiogène et sans horizon à l’image des déjà pénibles Une étoile violette ou Mods, précédentes œuvres de Ropert et Bozon qui donnaient déjà envie de les placer parmi ce que le cinéma français avait de plus poseur et pédant.
Il y a pourtant un élément qui permet à Tip Top de régulièrement se dégager de son systématisme étouffant : le duo Huppert-Kiberlain. Au cœur d’un casting dont l’hétérogénéité est déjà un gag en soi (François Damiens, Karole Rocher, Samy Naceri !), les deux comédiennes donnent aux films ses meilleures scènes. La Huppert, qui déclare régulièrement qu’elle rêve de jouer du Feydaux, trouve ici une précipitation permanente à l’hystérie toute vaudevillesque, comme si son personnage de 8 femmes était passé en accéléré jusqu’à tomber dans la violence. Peut-être plus surprenante est l’aisance comique de Sandrine Kiberlain dans un rôle de nunuche adolescente condamnée à faire tapisserie. Souvent tordante, sa timidité de Porcinet flageolant face à l’ouragan Huppert est le ressort comique le plus efficace du long métrage. Alors, un film peut-il être sauvé par son casting ? On pencherait plutôt du côté d’un petit non, mais ce duo furieux-zinzin-lunaire apporte enfin un peu de chair au film, lui permettant ainsi de se départir momentanément de sa lourdeur toc. Il était temps.