The Northman

The Northman
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The Northman
États-Unis, 2022
De Robert Eggers
Scénario : Robert Eggers
Avec : Nicole Kidman, Alexander Skarsgård, Anya Taylor-Joy
Photo : Jarin Blaschke
Durée : 2h17
Sortie : 11/05/2022
Note FilmDeCulte : ****--
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Le jeune prince Amleth vient tout juste de devenir un homme quand son père est brutalement assassiné par son oncle qui s'empare alors de la mère du garçon. Amleth fuit son royaume insulaire en barque, en jurant de se venger. Deux décennies plus tard, Amleth est devenu un berserkr, un guerrier viking capable d'entrer dans une fureur bestiale, qui pille et met à feu, avec ses frères berserkir, des villages slaves jusqu'à ce qu'une devineresse lui rappelle son vœu de venger son père, de secourir sa mère et de tuer son oncle.

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En trois longs métrages seulement, les obsessions formelles et thématiques de Robert Eggers continuent de prendre forme en un tout cohérent et pourtant jamais répétitif. Inspiré de la légende scandinave d'Amleth, celle-là même qui servit de source à la célèbre pièce de Shakespeare, The Northman est une nouvelle preuve de la fascination du cinéaste pour le folklore et les rites. Chez Eggers, on questionne sans cesse le réel, ce qui l'est ou pas, ce qui relève de l'hallucination, mais l'existence de la sorcellerie ou bien encore celle des dieux sont des données indiscutables dans les univers favorisés par l'auteur. Un parti-pris qui va de pair avec la désormais coutumière recherche de véracité d'Eggers, qu'il s'agisse de la reconstitution ou de la mise en scène. Néanmoins, pour s'atteler à cette épopée viking, Eggers a répondu aux sirènes de producteurs avec davantage de moyens que pour ses deux précédents films et donc avec davantage de contraintes. Sans aller jusqu'à se compromettre, il a choisi sciemment de livrer cette fois-ci une copie plus mainstream, et si le film est une réussite indéniablement personnelle, notamment dans le rapport à la foi, il s'avère également plus conventionnel d'un point de vue narratif.

The Witch puisait ses dialogues d'antan dans des retranscriptions de procès de sorcières tandis que The Lighthouse s'inspirait de journaux de bord tenus par des marins et gardiens de phares. L'authenticité qui naît irrémédiablement d'un vocabulaire aussi idiosyncratique y était beaucoup dans l'expérience particulière proposée par Eggers. Avec une action située pour la première fois ailleurs qu'en Amérique du Nord, Eggers avoue ne pas avoir osé "faire une Mel Gibson" et opté plutôt pour une entorse linguistique depuis toujours tacitement acceptée par le public : tout le monde parle anglais. Certes, il s'agit d'une grammaire singeant un phrasé "d'époque" mais il n'empêche que le langage n'est par conséquent pas aussi immersif que pour ses deux précédents essais. Néanmoins, là où le metteur en scène parvient à nous transporter, c'est par le biais de ses incroyables plans-séquences qui plongent le spectateur dans la réalité de l'époque tout en épousant la subjectivité d'un protagoniste mû par son destin, inéluctable.

Une nouvelle fois, après le puritanisme oppressant de la famille pèlerine de The Witch et la soumission dans l'espoir de l'illumination de The Lighthouse, Eggers questionne le rapport de son personnage à ses croyances. N'est-il pas absurde de dédier sa vie à une quête de vengeance quitte à passer à côté, sous prétexte que c'est écrit ou que l'honneur l'impose? En adaptant un texte ancestral qui a servi de modèle à bien des récits de représailles, en un sens le ur-conte de revanche, le cinéaste semble même interroger directement ce type d'histoire et de schéma narratif. Pour ce faire, il ne peut éviter toutefois quelques codes éculés qui participent à rendre le film plus accessible. Parfois un peu sur des rails, notamment dans son tiers central, The Northman tarde à retrouver la rage sauvage qui incarne son premier acte envoûtant, martelant son imagerie primale et fantastique. Renvoyant tout autant à Conan le Barbare, une référence assumée par Eggers, qu'au Roi Lion, une ressemblance peut-être moins volontaire, le voyage, pas si éloigné de l'expérience The Green Knight, a de quoi enivrer.

par Robert Hospyan

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