Ted 2
États-Unis, 2015
De Seth MacFarlane
Scénario : Seth MacFarlane, Alec Sulkin, Wellesley Wild
Avec : Amanda Seyfried, Mark Wahlberg
Photo : Michael Barrett
Musique : Walter Murphy
Durée : 1h55
Sortie : 05/08/2015
Nos deux compères vivent toujours à Boston, mais alors que John est désormais célibataire, Ted a emménagé avec Tamy Lynn, la bombe de ses rêves. Alors qu’ils traversent leurs premiers orages maritaux, ils décident de faire un enfant pour consolider leur couple. Leurs espoirs sont brisés lorsque la cour du Massachussetts refuse de reconnaître le statut de personne à Ted, et lui octroie celui de « propriété », ce qui le rend inapte à l’adoption. Les deux meilleurs amis du monde vont cette fois-ci s’aventurer en territoire totalement inconnu : le moment est venu de légaliser l’existence de Ted.
BAD NEWS BEAR
Il y a trois ans, Seth MacFarlane réussissait un coup de maître avec son premier long-métrage, Ted, petit bijou de comédie, et carton mérité. L’an dernier, l’embarrassant Albert à l’ouest venait mettre un petit bémol à notre enthousiasme, et montrait que MacFarlane avait tout de même besoin d'être un peu cadré. Du coup on ne savait plus trop quoi attendre de ce Ted 2, prévu à peine un an après.
Coupons court au suspense, Ted 2 n’est ni fait ni à faire ; ce n’est pas une catastrophe, juste un spectacle médiocre qui laissera les fans hardcore du premier film bien amers. On peut tout à fait imaginer que MacFarlane n’ait eu d’autre choix que de respecter la date de sortie imposée par le studio, lui étant redevable après la débâcle Albert…, mais force est de constater que c’était un bien mauvais choix que de ne pas s'être laissé le temps. Le premier mauvais choix d’une longue série puisqu’en l’état rien ne fonctionne, à commencer par le scénario. C'est bien simple, tout ce qui a été précédemment construit se retrouve dynamité dès les premières minutes : le divorce de John (Mark Wahlberg) et Lori (Mila Kunis) est balayé en UNE réplique, et on ne saura jamais pourquoi ou comment, tant pis pour ceux qui se sont attachés à eux, mais on justifie ainsi paresseusement l’absence de Kunis, enceinte au moment du tournage. Ted et Tami-Lynn se marient eux, mais on n'a même pas le temps de croire une minute à leur histoire qu’ils s’entrent-déchirent en flash-forward ; au bord de la rupture, plus qu'une solution : un bébé pour relancer leur couple - on ne peut s’empêcher d’être dubitatif - mais avant d'en arriver là il faudra d’abord que Ted retrouve ses droits dont il a été déchu, passé du statut de personne à celui d'objet. Entre alors en scène la jolie, jeune et inexpérimentée Samantha (Amanda Seyfried), avocate de Ted, et love interest tout désigné pour John…
Le premier opus construisait vraiment quelque chose, un cœur qui battait sous sa vulgarité en peluche, avec son ménage-à-trois à la recherche de l'équilibre. Les nombreux gags, répliques et références faisant partie intégrante de cette dynamique, au service de l’histoire et des personnages, comme dans toute bonne comédie qui se respecte. Ce second épisode se contente d’établir un maigre fil conducteur autour duquel il brode un enchaînement de sketchs plus ou moins drôles, et cette absence de chair entraîne de fait une relative indifférence pour les personnages et ce qui peut bien leur arriver. Il faut dire aussi que Mark Wahlberg n’a pas grand-chose à jouer et qu’il traverse le film dans une sorte d’apathie, et que si l’écriture de Lori n’était pas le point fort du film précédent, c’était du David Mamet comparé au traitement réservé aux personnages féminins ici, entre l’avocate qui foire lamentablement son coup et devra mendier l’aide d’un confrère plus expérimenté, et la propre femme de Ted qui doit cumuler au maximum quinze minutes de présence à l’écran. On passera sur la sous-intrigue avec Giovanni Ribisi, aussi inutile et plaquée que dans le précédent. Sur le plan de la pure mise-en-scène, MacFarlane emprunte également le toboggan de la mort, troquant le cadre serré, proche des personnages, et les belles scènes bien découpées du premier volet, pour un Scope dont il ne sait que faire, laissant ses acteurs se débattre en plan large, enchaînant paresseusement les champs et contre-champs, avec un rythme lymphatique bien hors-sujet.
Au final on sauvera Ted lui-même, toujours aussi délicieux, même si moins bien servi, quelques passages vraiment drôles (le montage à la bibliothèque, l’hommage à Jurassic Park, la salle d’impro), les deux numéros musicaux, et c’est à peu près tout. On ne peut s’empêcher de penser que le résultat eût été différent avec une année de développement supplémentaire… L’histoire aurait pu reprendre de manière plus cohérente, et on aurait peut-être eu moins l’impression de regarder un premier jet de scénario tourné-monté à la va-vite, car en l’état c’est quand même bien maigre et peu duveteux.
Olivier Sarrazin