Swiss Army Man
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États-Unis, 2016
De Dan Kwan, Daniel Scheinert
Scénario : Dan Kwan, Daniel Scheinert
Avec : Paul Dano, Daniel Radcliffe
Durée : 1h37
Hank, un homme désespéré errant dans la nature, découvre un mystérieux cadavre. Ils vont tous les deux embarquer dans un voyage épique afin de retrouver leur foyer. Lorsque Hank réalise que ce corps abandonné est la clé de sa survie, le suicidaire d'autrefois est forcé de convaincre un cadavre que la vie vaut la peine d'être vécu.
HOMMES A TOUT FAIRE
De Sundance (prix de la mise en scène) à Sitges (Grand Prix) en passant par Neuchâtel (pas moins de 3 prix différents), Swiss Army Man a traversé l'année 2016 en collectionnant les prix mais surtout en sidérant public et critique à chaque présentation. Réalisateurs de clips originaux et remarqués, les 2 réalisateurs rassemblés sous le pseudo Daniels (que nous placions l'an dernier dans notre liste des artistes qu'on aimerait voir se lancer dans le cinéma) signent un premier long métrage qui se place facilement parmi les plus fous et inclassables vus récemment. Oui, Swiss Army Man est bien à la hauteur de sa réputation barjo. La bonne nouvelle: le film est tellement généreux en surprises et coups de folie que, quoi qu'on en attende, il est forcément plus barré encore. La mauvaise nouvelle? C'est qu'on ne vous en racontera rien.
Difficile de donner une idée juste de ce à quoi ressemble Swiss Army Man sans trop en dire, difficile de rendre justice à l'imagination du scénario sans gâcher le plaisir de suivre bouche bée ses improbables virages. Mais la meilleure surprise ici à l’œuvre, c'est aussi que l'ensemble ne se résume pas à une compilations wtf de morceaux de bravoure pour séance de minuit. Swiss Army Man est drôle, mais il est surtout très sérieux, parfois même carrément triste. Ambitieux et émouvant, le film demande et mérite d'être davantage pris au sérieux qu'une potacherie bis pour festival. Potache, c'est pourtant l'un des adjectifs qui vient immédiatement en tête face aux premières scènes. Pet, masturbation, matière fécale... les deux réalisateurs mettent vraiment les deux pieds dans le plat. Mais pas uniquement par blague. En nous faisant rire sans nous méfier, ils nous emmènent ailleurs..
En effet, derrière cette histoire de dingue se développe peu à peu un point de vue bien particulier sur la fragilité masculine. Un sujet qui n'est quasiment jamais traité avec sérieux ou profondeur dans le cinéma (surtout le cinéma de genre), et qui se retrouve ici - quel paradoxe - traité avec plus de respect et d'intelligence qu'ailleurs. Le swiss army man du titre, c'est (si on traduit) un homme-couteau suisse, un homme à tout faire idéal, capable de tout en toute circonstance. L'air de rien, tout en leur donnant des coups de coude complices, Swiss Army Man invite justement les mecs à laisser tomber leurs postures, leur fausse pudeur, pour mieux assumer leur gigantesque besoin d'intimité et d'affection. La leçon est d'une bizarrerie sans limite, et pourtant d'une bienveillance proprement bouleversante. Doublement sidérant.
