Surveillance
États-Unis, 2008
De Jennifer Chambers Lynch
Scénario : Jennifer Chambers Lynch, Kent Harper
Avec : Michael Ironside, Julia Ormond, Bill Pullman
Durée : 1h38
Sortie : 30/07/2008
Une enquêtrice du FBI enquête sur un mystérieux serial-killer. Sur la trace de ce dernier, elle reçoit l'aide surnaturelle des victimes du meurtrier.
THE BLOOD
Plusieurs films cohabitent dans Surveillance, tout comme trois écrans se répondent dans la salle de contrôle. D'abord le film du sang, de l’héritage du père, bien sûr, difficile à nier, évacué dans une séquence d’introduction soufflante, photographie métallique évoquant INLAND EMPIRE, cris mixés en sirène d'aluminium, extrême violence à peu de frais. Le film du sang, celui du genre, est installé d'emblée. L'on suppose ensuite quelque démarquage Tarantinesque, digressions et costumes noir et blanc, tronches de flics rednecks, satires dans les coins. Un pastiche grimaçant et froid, à l'image des masques des tueurs, coulés dans une cire anonyme. Vient alors un autre film, plus attendu, film de pitch, de scénario : on songe à Rashomon, à Usual Suspects... On imagine, même on le craint, que s'y grefferont encore d'autres influences, Haneke peut-être, régimes d'images entrecroisés, moralisme bêta. La bonne surprise vient de ce que Jennifer Chambers Lynch tranche là les veines d'atavisme et creuse sa tranchée. L'artifice du triple-écran, de la simultanéité, n'est ainsi, par exemple, jamais exploité ; au contraire, Surveillance traîne sa temporalité flottante, quasi-flegmatique, avec humour et détachement. Le syndrome du petit-malin n'est certes jamais loin, mais sans abus. Importe surtout à Jennifer Chambers Lynch sa galerie de personnages, les petits riens qui les construisent, quelques gestes dissonnants, une attention aux détails humains, qui emportent le pli : les larmes d'un bad-ass humilié, la main dérisoire d'une mère sur la joue ensanglantée d'un grand fils soudain infantile, l'étrange complicité sensuelle et phallique d'un duo d'ignobles flics ripoux, une épectase forcée... Pas étonnant que la clef de l'intrigue réside dans un regard attentif sur un simple détail, résultat d'un montage mémoriel. Film d'horreurs brutales et douces, d'affects et d'attentions...