Spider-Man : Across the Spider-verse

Spider-Man : Across the Spider-verse
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Spider-Man : Across the Spider-verse
États-Unis, 2023
Scénario : David Callaham, Phil Lord, Chris Miller
Avec : Oscar Isaac, Shameik Moore, Hailee Steinfeld
Musique : Daniel Pemberton
Durée : 2h20
Sortie : 31/05/2023
Note FilmDeCulte : *****-
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Après avoir retrouvé Gwen Stacy, Spider-Man, le sympathique héros originaire de Brooklyn, est catapulté à travers le Multivers, où il rencontre une équipe de Spider-Héros chargée d'en protéger l'existence. Mais lorsque les héros s'opposent sur la façon de gérer une nouvelle menace, Miles se retrouve confronté à eux et doit redéfinir ce que signifie être un héros afin de sauver les personnes qu'il aime le plus.

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Cinq ans déjà qu'est sorti Spider-Man : New Generation et qu'il a révolutionné le médium outre-Atlantique. Non content d'avoir extirpé l'animation US du film destiné aux plus jeunes et influencé plusieurs productions de studios différents par son style si particulier (Les Mitchell contre les machines, Le Chat Potté 2, Ninja Turtles : Teenage Years), le film a également ouvert la manne du multivers, subséquemment récupéré par Marvel (Spider-Man : No Way Home, Doctor Strange & the Multiverse of Madness) et transcendé par d'autres (Everything Everwhere All At Once). Maintenant que la nouveauté n'est plus de mise, comment l'inévitable suite allait-elle pouvoir continuer à innover? Dès les premières secondes, alors que la musique enfle sur une succession de logos qui glitchent, la sauce monte, comme un condensé de la hype à ne pas décevoir, et la séquence d'ouverture, magistrale, vient non pas simplement rassurer mais carrément subjuguer par sa réponse. Dès son introduction donc, Spider-Man : Across the Spider-verse ose tout. Il ose changer de protagoniste, il ose ressasser certaines choses mais en les détaillant, mais surtout, il ose pousser les potards du pop-art à fond. La première fois, des personnages issus d'univers différents intervenaient dans celui du héros et pouvaient arborer un dessin de manga ou bien de cartoon. Cette fois-ci, c'est nous qui basculons dans différents univers et ce sont par conséquent les décors qui se colorent de façons diverses, qui adoptent des styles variés, - et l’œuvre tout entière qui se fait plus expressionniste que jamais. Ainsi Gwen Stacy évolue-t-elle dans un monde d'aquarelle où les couleurs changent selon ses émotions, et où l'on croirait se balader dans une case de Bill Sienkewicz, avant d'affronter un Vautour tout droit échappé d'un croquis de Leonard de Vinci.

Spider-Man : Into the Spider-verse a marché pour que Spider-Man : Across the Spider-verse puisse courir. Chaque univers a été conçu pour donner l'impression d'avoir été dessiné par un artiste différent. Rien d'étonnant vu qu'en BD, les dessinateurs se succèdent et réinterprètent les personnages à leur guise, qui plus est s'il s'agit de spin-offs ou d'univers alternatifs, mais au-delà des clins d'oeil qui reprennent délibérément à l'identique le dessin de tel comic book ou de telle série animée, l'équipe du film se permet d'aller encore plus loin. Le meilleur exemple n'est autre que le personnage de Spider-Punk, qui reprend l'esthétique du mouvement, du moins l'image que l'on s'en fait dans l'inconscient collectif, et qui incarne à merveille l'entreprise dans son ensemble : un patchwork rebelle, où le crayonné côtoie la texture 3D. Outre la valeur ajoutée cosmétique déjà enivrante de cette pluralité, réunie à l'écran dans une même œuvre, ce parti-pris illustre à lui seul l'approche de Phil Lord et Chris Miller, de retour au scénario et à la production, sur le fond. L'ouvrage n'est pas uniquement d'une densité formelle écrasante, il s'avère tout aussi riche d'un point de vue narratif, exploitant encore davantage que son prédécesseur la métatextualité pour tisser son histoire.

Si le premier film s'amusait de l'inéluctable origin story commune à tous ses personnages, ce deuxième volet surenchérit en explorant les dynamiques familiales des différents protagonistes, précisément dans ce qu'elles ont d'identiques, pour semblablement remettre en question le trope en soi et la nécessité de souffrance et du sacrifice inscrit dans le code génétique de ces archétypes. Par son récit, le film se soulève contre le "canon", terme littéralement utilisé dans le texte ("canevas" dans les sous-titres), pour évoquer la possibilité de réfuter la fatalité. Que ce soit visuellement ou narrativement, le film entend de briser tous les moules. La suite, intitulée Spider-Man : Beyond the Spider-verse (oui ils cherchent la merde) et prévue pour le 29 mars 2024, apportera sans doute la réponse et c'est d'ailleurs le seul regret face à ce film qui prend peut-être un peu trop son temps pour poser ses enjeux (même si c'était sans doute indispensable pour ancrer émotionnellement ce terreau théorique) : il s'agit encore une fois d'un film incomplet sans sa deuxième partie. Faites des trilogies mais bouclez vos histoires, que chaque film puisse tenir indépendamment. Néanmoins, ce petit bémol ne saurait entamer l'incroyable expérience qu'est Spider-Man : Across the Spider-verse. Régulièrement inventif, impressionnant dans l'action, toujours touchant, et résolument punk.

par Robert Hospyan

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