Festival de Gérardmer: Sonno profondo

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Sonno profondo
Argentine, 2014
De Luciano Onetti
Note FilmDeCulte : *-----
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Après avoir assassiné une jeune femme, un meurtrier, traumatisé par ses souvenirs d’enfance, reçoit une mystérieuse enveloppe. Le prédateur se transforme alors en proie quand il découvre à l’intérieur des clichés de lui tuant sa victime...

RED IS DEAD

Pour son premier film, l'Argentin Luciano Onetti a pour ambition de revisiter le giallo de la grande époque, et si, sur le papier, tueur psychopathe, fétichisme et ritournelles entêtantes sont bien réunis pour faire saliver le fan du genre, à l'écran le résultat s'avère très décevant, pour ne pas dire embarrassant. Le gros problème de Sonno Profondo, c'est d'avoir les yeux plus gros que le ventre, et pas grand chose d'autre sous le pied que son concept. Sur le plan formel, Onetti tente d'imiter la patine si particulière de la pellicule 70's, mais la combinaison image numérique hyper contastée, scratchée et salie sous After effects ne fait pas illusion très longtemps et nous sort du film au moindre mouvement de caméra un peu rapide tant l'image devient une bouillie de pixels. Si l'histoire était passionnante, ce ne serait pas forcément gênant, mais passée une brève introduction en forme de clin d'oeil aux Frissons de l'angoisse, et un générique hyper kitsch débordant de couleurs, le film embraye rapidement sur le meurtre inaugural puis commence déjà à tourner à vide, étirant ad nauseam la moindre situation, le long rinçage d'un couteau dans une fontaine - couteau sur lequel la peinture rouge a déjà eu le temps de sécher - n'étant que la mise en bouche. L'autre gros parti-pris formel du film est d'être quasi-intégralement en caméra subjective : pour passer un appel, il en coûtera trois panos filés, entre le cadran du téléphone et l'enveloppe sur laquelle est écrite le numéro. Chaque déplacement est donc prétexte à de longues errances visuelles sur les trottoirs pavés, ou les chemins forestiers.

Le meilleur, le clou du spectacle, ce sont ces longues scènes d'intérieur dans lesquelles... on caresse des trucs avec des gants. C'est bien simple, c'est probablement le plus grand film de gants jamais tourné. D'un côté les gants en caoutchouc blanc, avec lesquels on frôle du bout des doigts des fleurs en plastique, puis il y a ces instruments chirurgicaux rutilants qu'on soupèse et fait passer d'un plateau argenté à une trousse en cuir, un par un, en les faisant bien tinter. Et puis il y a les vraies stars du films, une belle paire de gants en cuir. Avec ceux-là, on caresse un rasoir, et puis une culotte sale, et on passe les doigts sur le couvercle d'une boîte à musique, dont en sort une seringue, avec laquelle on extrait une matière rouge et gluante d'une poupée pour s'en faire un petit cocktail avec des pilules de couleur. Et ensuite on fait un dessin avec des crayolas, toujours en vue subjective, en temps réel, et évidemment on dessine comme un enfant de 3 ans, parce que dessiner avec des gants et des crayolas, ce n'est pas facile. Ensuite on va se promener à la cave, et on s'attarde plutôt quatre fois qu'une sur les poupées, bibelots, statuettes et verroteries posées sur la commande, avant d'aller caresser des photos. Il faut vraiment le voir pour le croire. Onetti confond maniérisme et fétichisme, et pense sûrement que filmer des objets ramassés au hasard en brocantes avec force halètements sur une musique singeant le Morricone des grands jours va donner de la texture à son film, mais n'est pas Argento qui veut. Arrivé aux trois quarts du métrage, il ne s'est quasiment rien passé et dans la salle, les ricanements ont depuis longtemps laissé place aux soupirs. Le spectateur ne sait même plus ce qu'il regarde : si c'est une parodie, elle n'est pas assez poussée, si c'est un hommage, c'est totalement raté. Passés une résolution et un épilogue sursignifiants, c'est avec une joie non feinte qu'on accueille le générique de fin. De ces soixante-sept minutes interminables et d'une totale complaisance, un monteur un peu rusé pourrait probablement tirer un court-métrage classieux et efficace ; en l'état Sonno Profondo est une grosse coquille vide qui se réclame du Bis mais ne dépasse jamais le ZZZzzzzzz.

Olivier Sarrazin

par Palpix

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