Samaria
Corée du Sud, 2004
De Kim Ki-Duk
Scénario : Kim Ki-Duk
Avec : Kwon Hyun-min, Kwak Ji-min, Eol Lee
Durée : 1h35
Sortie : 27/10/2004
Yeo-Jin n’a pas vingt ans et vit avec son père veuf. Elle assiste sa camarade Jae-Young dans une tâche un peu particulière: Jae-Young se prostitue, tandis que Yeo-Jin trie les clients et veille, malgré elle, au bon fonctionnement de la petite entreprise. Jusqu’à ce que le drame éclate.
SOME BOYS KISS ME, SOME BOYS HUG ME
Après les prières de chaque saison dans son récent Printemps, été, automne, hiver…et printemps, Kim Ki-duk rempile pour une structure à chapitres. Une valse en trois temps autour de la Samaritaine, comme une extension à son Birdcage Inn qui mettait déjà en scène une prostituée. Œil crevé dans Adresse inconnue ou sourire forcé dans Samaria, la jeunesse n’est guère épargnée par un cinéaste inquiet qui distribue ses regards noirs, tous personnages confondus. Jae-Young, poupée de cire qui habille ses sombres énigmes d’une moue aimable et acidulée, ou Yeo-Jin, complice infortunée et figure sacrificielle. Le cinéaste mauvais garçon continue, pour sa part, à relire ses saintes écritures. Image christique au bord d’une fenêtre, offrant son corps et son autre joue, et Samaritaine marginale, objet de honte, compagnon de douleur, qui porte sur son dos une carcasse abandonnée, dans une dernière course affligée faite de sueur et de sang. Un récit biblique à hauteur d’adolescentes, où l’innocence et la candeur le disputent à la cruauté et à la tragédie.
LA NINA SANTA
A son duo de jeunes filles, Kim Ki-duk ajoute un personnage masculin, père veuf et rongé par l’humiliation, plus immédiatement identifiable dans le cinéma viril du réalisateur coréen. Relais d’un étrange et inattendu dernier tiers de film, qui rattache les pulsions destructrices de Crocodile ou du Coast Guard aux bras tendus vers l’intouchable extase spirituelle de Printemps, été, automne, hiver… et printemps. L’occasion de moments de grâce suspendus au balai d’un vieux qui disperse quelques feuilles au petit matin, et de violence furieuse étalée sur le carrelage des toilettes ou suggérée par un ruisseau de sang qui fait son chemin sur le trottoir. Du conte social au récit initiatique, Samaria brasse les thèmes avec habileté, si ce n’est quelques heurts de dialogues maladroits. Kim Ki-duk, dont la mise en scène est toujours plus soignée et maîtrisée, reste fidèle à son cinéma de symboles où les voitures s’embarquent sur des sentiers caillouteux, s’enfoncent dans une eau sacrée, bûcher des fantasmes morbides, avant de repartir, la conduite incertaine, sur une route qui s’annonce toujours aussi triste et aride.