The Ryan Initiative
Jack Ryan : Shadow Recruit
États-Unis, 2014
De Kenneth Branagh
Scénario : Adam Cozad, David Koepp
Avec : Kenneth Branagh, Kevin Costner, Keira Knightley, Chris Pine
Photo : Haris Zambarloukos
Musique : Patrick Doyle
Durée : 1h45
Sortie : 29/01/2014
Ancien Marine, Jack Ryan est un brillant analyste financier. Thomas Harper le recrute au sein de la CIA pour enquêter sur une organisation financière terroriste. Cachant la nature de cette première mission à sa fiancée, Jack Ryan part à Moscou pour rencontrer l’homme d’affaires qu’il soupçonne d’être à la tête du complot. Sur place, trahi et livré à lui-même, Ryan réalise qu’il ne peut plus faire confiance à personne. Pas même à ses proches.
THE RIEN INITIATIVE
La franchise cinématographique adaptée des romans de Tom Clancy compte cinq films… et presque autant d'acteurs différents ayant tenu le rôle principal. Il y a plus de 10 ans, à l'époque où le terme reboot n'était pas encore devenu un fourre-tout et où cet exercice n'était pas encore à la mode, Paramount avait déjà tenté de relancer les aventures de Jack Ryan avec le sous-estimé La Somme de toutes les peurs. Backlash de Ben Affleck, sortie trop proche du 11 septembre, profil bas au milieu des blockbusters de 2002, le film ne vit jamais de suite, malgré son succès, tandis que La Mémoire dans la peau, sorti le même été, allait donner naissance à la saga Jason Bourne et secouer le genre. Comment la licence se réinvente-t-elle à l'aune de ce nouveau modèle? Mal. The Ryan Initiative, avec son titre "français" surfant sur les titres originaux des Bourne, est un film complètement dénué d'intérêt qui accole une mise en scène fonctionnelle au possible à un scénario digne d'une production EuropaCorp qui n'a rien compris au personnage et à l'univers des livres de Tom Clancy. Jack Ryan est un analyste de la CIA qui n'a que son savoir et ses théories pour dénouer les situations géopolitiques épineuses, même s'il tâte un peu du terrain à chaque fois. C'est ce qui caractérise le personnage, le différencie des autres espions tels que James Bond ou Jason Bourne. Dans cette nouvelle interprétation, Chris Pine ne parvient jamais à vendre l'intelligence du personnage et incarne une version bien peu charismatique de l'agent de terrain. Il faut dire que le scénario réduit le personnage à un 007 sans le swag, dépêché sur place à Moscou par l'un des nombreux raccourcis du film ("Vous êtes le seul à comprendre le langage financier") qui fait également de Ryan un vulgaire hacker : le piratage d'un ordinateur est le seul moment où il utilise son cerveau et non ses muscles, le tout au sein de la séquence la moins crédible du film (la CIA enrôle la femme de Ryan, civile, dans une opération dangereuse où elle sera confrontée à un terroriste en col blanc).
Les deux meilleurs épisodes de la franchise sont À la poursuite d'Octobre rouge et La Somme de toutes les peurs, non seulement parce que ce sont deux films de tension très efficaces, mais surtout parce qu'ils proposent un véritable ancrage géopolitique, l'autre valeur ajoutée de la licence vis-à-vis des plus célèbres séries d'espionnage. Malheureusement, dans ce nouvel épisode, ce contexte est on ne peut plus superficiel, pour ne pas dire inexistant. On est plus proche du Saint ou de n'importe quel sous-thriller du genre des années 90. La première scène inscrit le film dans la continuité du 11 septembre mais le script n'en fait rien. En fin de compte, sans aller jusqu'à parler de propagande, le film s'avère tristement manichéen. Les russes figuraient également de manière importante dans les deux volets susmentionnés mais afin de mieux servir un propos montrant l'Amérique comme porteuse du blâme, rongée par le doute et la paranoïa de la Guerre Froide. Ici, il n'y a rien. Le film n'a rien à dire. Et rien à raconter. Par conséquent, The Ryan Initiative se limite à un produit générique, avec sa photographie soignée mais anonyme, semblable à celle de n'importe quelle série télévisée US, pauvre en action et dénué de suspense. Pourquoi être allé chercher Kenneth Branagh pour s'occuper d'un tel projet? Difficile de répondre à cette question quand on voit ce crash d'hélicoptère avec son effet de confusion cheap ou ce combat dans une salle de bain filmé comme n'importe quel post-Bourne sans la moindre inspiration. La palme revient sans doute à cette poursuite en voiture géographiquement et narrativement incompréhensible, le méchant fuyant le héros tout en lui disant de se dépêcher de lui rendre ce qu'il lui a volé. Passons sur la dernière séquence d'action, si faible qu'on est surpris de découvrir qu'il s'agissait du climax. Le film a coûté étonnamment peu cher et devrait se renflouer facilement à l'international mais il serait dommage que ce reboot réussisse là où le précédent a échoué.