Les Rencontres d'après minuit

Les Rencontres d'après minuit
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Rencontres d'après minuit (Les)
France, 2013
De Yann Gonzalez
Scénario : Yann Gonzalez
Durée : 1h32
Sortie : 13/11/2013
Note FilmDeCulte : *****-
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Au cœur de la nuit, un jeune couple et leur gouvernante travestie préparent une orgie. Sont attendus La Chienne, La Star, L'Etalon et L'Adolescent.

BEYOND THE BLACK RAINBOW

Il y a les gens qui racontent des histoires et les cinéastes qui font du cinéma. Avec son premier long métrage, Les Rencontres d'après minuit, Yann Gonzalez (lire notre entretien) fait indubitablement partie du second groupe, qui raconte certes des histoires mais qui ne met jamais le cinéma de côté. Soit l'antithèse de la grande majorité des premiers films français qu'on voit à longueur d'année, accrochés à leur scénario, obsédés par une drôle d'idée de "réalisme", par le "savoir-faire", par la "justesse", une conception riquiqui du cinéma dont l'imaginaire est totalement exclu. Les esprits formatés ne manqueront évidemment pas de ricaner devant Les Rencontres d'après minuit, y verront peut-être un nanar - dommage. Car s'il est risqué d'en faire un messie, Les Rencontres d'après minuit est certainement le premier film français le plus enthousiasmant depuis des lustres.

Peu de jeunes cinéastes travaillent aujourd'hui sur l'artificialité pour créer de l'émotion, comme ont pu le faire autrefois Resnais et Rohmer, comme l'ont fait avec une dimension camp supplémentaire des réalisateurs tels que Fassbinder ou Schroeter. Les Rencontres d'après minuit est glorieusement artificiel dès ses premières minutes, avec ses lumières fluo et crépusculaires de clip des 80's, ses dialogues ampoulés, ses personnages de Cluedo. Quelque part entre ce qu'avait accompli l'an passé Héléna Klotz avec un film cousin, le nocturne L'Âge atomique, et le labyrinthe mélancolique du Canadien Panos Cosmatos, Beyond the Black Rainbow. Dans son décor hors du monde, avec ses propres règles narratives, Gonzalez ouvre une grande porte vers l'imaginaire, le fantasme, la liberté totale. Dans Les Rencontres d'après minuit, les rêves et souvenirs des personnages s'enchevêtrent: grand récit mythologique à la Perceval le Gallois (l'histoire d'amour de Kate Moran et Niels Schneider) ou au contraire réminiscences de nazisploitation (l'affrontement de Béatrice Dalle et Éric Cantona). Le film est ludique, imprévisible, guidé par la poésie et le mystère.

Mystère et poésie: l'une des influences qui saute aux yeux est le cinéma de Jean Rollin. Largement moqué en son temps, le cinéma de Rollin était peuplé de créatures nocturnes, se déroulait dans une nuit qui était comme un monde parallèle, enfilait les improbables dialogues littéraires et était hanté par la mélancolie. Gonzalez est un gosse de Rollin qui aurait avalé 36 autres influences, et l'aspect cheap de certaines productions de Rollin se transforme ici en minimalisme assumé, en splendide jeu de maquettes et de toiles peintes. On n'est jamais dans du cinéma autiste pour autant. L'émotion déborde sans cesse, le juke-box inonde la maison du film avec une musique qui reflète les sentiments de ses personnages. Au faux soleil rouge peint dans l'une des scènes des Rencontres... répond le vrai soleil auroral de la toute fin du film. Car le réel, l'authenticité des sentiments, l'utopie bien vivante qui lie les personnages, s'exprime mille fois mieux dans la boite à fantasmes de Gonzalez que dans bien des films "réalistes". Ce songe est décidément d'une somptueuse beauté.

par Nicolas Bardot

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